France : ils servent du porc pour empêcher les SDF musulmans de manger, on en est là…    Vol et vandalisme à El Fouladh : émission de sept mandats de dépôt    La campagne de démolition des constructions sur les plages de Bizerte se poursuit    Gaza : "Près de 450 000" civils ont fui Rafah suivant le plan de Netanyahu, Washington lève son faux veto, qui les arrêtera?    Siliana: Un mort et cinq blessés dans un accident de la route    Festival de Carthage: Les préparatifs avancent à grands pas    Coupe Arabe : Le Qatar accueillera les 3 prochaines éditions    Sécurité et souveraineté alimentaires en Tunisie | L'objectif : répondre aux besoins du citoyen par nos propres ressources    Report de l'audience de l'avocate tunisienne Sonia Dahmani à lundi prochain    Célébrez la fête des mères avec Ooredoo et gagnez 10 000 DT !    Pourquoi | Ça n'arrive pas qu'aux autres…    La société Ciments de Bizerte arrête la production de clinker    Mark Zuckerberg : Carthage doit être détruite !    Tunisie: Le t-shirt de Mark Zuckerberg enflamme les réseaux sociaux    À la Galerie Selma-Feriani : Image, récit et représentation    Vient de paraître – «Kef Al Ajayeb » de Bahri Rahali : Le mont des merveilles !    «Revival», nouvel album de Gultrah Sound System : Une authenticité renouvelée    Le pain ou la clé - Une métaphore du quotidien en Tunisie    Aéroport Tunis-Carthage : Un passager arrêté avec un pistolet cachée dans sa valise    Le gouvernement présente de nouvelles législations sur les congés parentaux    Aujourd'hui, coupure d'eau dans ces zones    MDWEB : Classement des sociétés de Leasing sur le web et les médias sociaux (Mai 2024)    Vient de paraître: Des sardines de Mahdia à la passion des mathématiques de Béchir Mahjoub    Le député Mohamed Ali Fennira appelle au rapatriement des migrants subsahariens (Déclaration)    FARK : Ghazi MABROUK    Nomination d'un mandataire judiciaire pour Somocer    La STB Bank poursuit sa politique prudente tout en améliorant ses fondamentaux    Météo de ce mercredi: Des températures jusqu'à 44°C dans certaines régions    AVIS D'APPEL D'OFFRES N° 06/2024    CONDOLEANCES : Feu Ammar ALAIMI    Nizar Ayed : ni Borhen Bssais ni Mourad Zeghidi ne sont coupables de diffamation ou de calomnie    Abdelaziz Kacem: De «Genocide Joe» à Meyer Habib, dit «Le Phacochère»    MEMOIRE : Fatma Kilani JRAD    Tunisie : l'AMA retire les sanctions, le sport reprend son souffle    USA : Un milliard de dollars d'armes destinées à Israël en cours d'approbation du Congrès    Le Drapeau Tunisie de retour à l'intérnational avec la fin de l'affaire Antidopage    L'Agence mondiale antidopage lève les sanctions infligées à la Tunisie    Des artistes Tunisiens au Québec en Tunisie dans une exposition conjointe à Montréal    10 mille billets pour les supporters de l'EST face à Al Ahly    L'IFT défend les artistes tunisiens victimes d'agression verbale et physique    Météo : Temps partiellement nuageux sur la plupart des régions    Un joueur du Barça fait jouer son jumeau à sa place    Habib Touhami: La politique américaine au Moyen-Orient et le sionisme chrétien    Tunisie : enquête ouverte sur l'incident du drapeau national    Tout ce qu'il faut savoir sur la tempête solaire    Tournoi KIA Tunis Open du 13 au 18 mai 2024 : Le sponsor officiel UBCI vous fait gagner des places!    Décès du premier patient ayant subi une greffe de rein de porc    De la ligne de but à la ligne de conduite : Entraîneur de gardiens, un poste à part entière    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



L'INS dans les abîmes de la (contre) révolution
On nous écrit
Publié dans La Presse de Tunisie le 06 - 08 - 2011

L'Institut national de la statistique, qualifié de «bateau ivre» dans les colonnes du journal La Presse le 19 avril dernier, ne cesse de sombrer depuis le début de l'année, et ce, dans une quasi-indifférence générale. Cette trajectoire abyssale l'a mené depuis un mois à une cessation d'activité totale. En effet, les portes de l'INS sont closes en raison d'un sit-in des agents occasionnels réclamant une titularisation immédiate. Ces agents empêchent par la force l'accès aux bureaux et paralysent, par conséquent, l'ensemble de l'activité de l'institution. La situation est bloquée, et un dialogue de sourds qui s'était engagé entre le gouvernement et le syndicat n'a abouti à aucun accord. Les deux parties se sont résolues à jouer la montre en attendant que l'une d'elle cède à l'essoufflement.
Pour la première fois depuis l'Indépendance, les chiffres de l'inflation pour le mois de juillet ne paraîtront pas. Il en est de même pour le reste des indicateurs socioéconomiques : indice de la production industrielle, enquêtes d'opinion, comptes nationaux trimestriels (et donc les chiffres de la croissance), enquête emploi trimestrielle (chiffres du chômage)… La liste est indicative et non exhaustive.
On pourrait croire que les gouvernants sont alarmés par un tel désert statistique. Il n'en est rien ! Une lettre ouverte au Premier ministre dénonçant la fermeture forcée de l'INS et signée par les directeurs centraux de l'institution est ainsi restée lettre morte. Cette situation n'est pas très étonnante, car ceux qui détiennent les rênes du gouvernement aujourd'hui, et particulièrement au sein du ministère de la Planification et de la Coopération internationale (ministère de tutelle de l'INS), ont été formés à l'école du flou statistique, à tel point qu'ils y sont passés maîtres. Pour preuve, lorsqu'une délégation de l'INS, excédée par le pourrissement de la situation, est allée à la rencontre du ministre de la Planification, celui-ci n'a rien trouvé de mieux à leur dire que de tenter de sortir par leurs propres moyens de l'ornière dans laquelle son prédécesseur a contribué à les placer. Car n'oublions pas que c'est l'ancien ministre du Développement qui a congédié le directeur général de l'INS (poste resté vacant depuis) et signé un accord syndical des plus obscurs.
A cette même rencontre, lorsqu'on signala au ministre que si les choses demeuraient en l'état, on ne saurait probablement pas quel est le chiffre de la croissance du deuxième trimestre, il rétorqua simplement : «Vous» ne savez pas mais «Nous» savons ! Autrement dit : on fera sans vous ! Une telle réponse n'est guère surprenante de la part de celui qui fut longtemps le directeur général de la prévision et qui avait la mainmise sur l'élaboration du plan de développement ainsi que du budget économique durant les deux dernières décennies. L'actuel ministre était alors aux avant-postes dans l'entreprise d'édulcoration du bilan économique de l'ancien régime, où les statistiques étaient triées sur le volet en mettant en valeur celles qui renforcent le mythe d'un modèle de réussite et en cachant sous le tapis les chiffres qui peuvent froisser le pouvoir. Une entreprise qui continue de prospérer aujourd'hui, à lire la première version du «Programme de développement économique et social de la Tunisie 2012-2016» daté de juillet 2011 et exposée par le ministère de la Planification.
Ainsi peut-on y lire au sujet de la politique économique sous l'ancien régime : «Aussi les actions et mesures engagées et entreprises par la Tunisie conformément à cette approche de développement basée sur le principe de la conciliation entre l'économique et le social se sont-elles traduites par une avancée non négligeable sur la voie de la réduction de la pauvreté et de l'amélioration du niveau de vie des citoyens, par un élargissement de la classe moyenne, par la réalisation d'importants acquis dans les domaines de l'éducation, de la santé, de la couverture sociale, de la promotion de la femme ainsi que par une implication plus grande des jeunes dans la vie publique (sic)».
Plus loin, on nous rappellera que «en matière de revenus et de salaires, ceux-ci ont bénéficié d'un suivi continu durant les périodes passées, reflété à travers la poursuite des négociations sociales, la révision des conventions collectives, la réforme des régimes de rémunération, la révision des salaires minimum, l'amendement du code du travail et l'introduction de plus de souplesse dans les relations professionnelles, dans la perspective de favoriser un climat social serein. Durant cette période, le pouvoir d'achat des smigards a pu être préservé grâce aux nombreuses réévaluations de cette catégorie de salaires. Le pouvoir d'achat du salaire moyen a pu pour sa part être amélioré, sinon préservé».
Mais la palme revient sans doute à la section traitant du développement régional et des équilibres sociaux où, d'emblée, on affirme que «composante essentielle de la politique globale de développement, la politique régionale de développement mise en œuvre par la Tunisie au cours des périodes écoulées s'est fixé comme objectif prioritaire d'améliorer les conditions de vie à travers l'ensemble des régions et au profit de toutes les catégories de population. A la faveur de cette démarche, la Tunisie a pu réaliser des avancées assez significatives en matière de confort social, d'amélioration des indicateurs de santé et d'éducation, d'atténuation des risques d'exclusion et de vulnérabilité et d'accès aux sources de revenus». Bien sûr on y fait quelques concessions sur certains «écarts» mais le bilan global serait des plus satisfaisants.
Il est à noter que ce programme fut élaboré sans consultation des services de l'INS dont on continue à manipuler les statistiques. Ainsi on y retrouvera en bonne place le fameux taux de pauvreté de 3,8% qui avait pourtant cristallisé les polémiques durant les mois précédents. En guise de seul rectificatif, le lecteur attentif remarquera que l'adjectif «extrême» a été parfois adjoint au mot «pauvreté» mais sans toutefois faire référence aux 11,5% de la population qui se situent sous le seuil haut de pauvreté que l'INS considère désormais comme celui reflétant le mieux la réalité socioéconomique en Tunisie.
Les velléités d'indépendance de l'INS, exprimées au lendemain du 14 janvier 2011 et illustrées par une fin de non-recevoir au forcing ministériel voulant imposer un recensement irréaliste au printemps 2012 n'ont fait qu'alimenter encore plus le dédain gouvernemental envers son fournisseur officiel de données statistiques. Veut-on faire payer à l'INS ce crime de «lèse-ministre» à travers sa marginalisation ? On n'aimerait pas le croire. Mais que signifie donc le maintien de l'INS sans directeur général depuis plus de six mois ? Pourtant, des candidatures de valeur se sont manifestées : elles se sont heurtées à une administration kafkaïenne où de mystérieuses voix très haut placées continuent à influer sur les nominations. Jusqu'à quand va durer cet imbroglio qui prive le pays de ses principaux baromètres économiques ? Peut-être faudra-t-il une fois encore attendre que la sommation vienne, malheureusement, des institutions et organisations étrangères (FMI et Banque mondiale en tête) pour que soient de nouveau respectées les normes de diffusions statistiques internationales signées par la Tunisie.
Toutefois, cette crise révèle tout le chemin qui reste à faire pour qu'une véritable culture statistique soit ancrée dans la société. Celle-ci doit prendre conscience que, dans une démocratie, le système statistique public revêt une importance cruciale car il constitue un juge de paix pour l'élaboration et l'évaluation des programmes économiques et sociaux et permet aux différents intervenants (gouvernement, partis, syndicats, associations, chercheurs, citoyens…) d'avoir une base commune de débat et d'action.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.