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Des réseaux d'artisans à Kasserine à l'assaut des marchés
artisanat - Au secours des métiers d'antan dans les régions
Publié dans La Presse de Tunisie le 04 - 10 - 2011

• Une alliance avec le secteur privé sous le signe du commerce équitable
Le Centre Sadika pour la promotion de l'artisanat organisait, il y a quelques jours, une exposition d'une collection d'objets artisanaux de tissage, fabriqués par les artisanes des villages de Foussana, Hassi Lefrid, Hydra, Layoun et Berino, du gouvernorat de Kasserine. Il s'agit d'une première, en tout cas dans le cadre du projet " Par la femme et par le travail, atteindre la dignité" qu'a lancé le centre. Projet mené en collaboration avec les têtes de réseaux des diverses localités de la région, dans l'optique de redonner vie aux filières artisanales et au savoir-faire des artisanes et des artisans dans les régions défavorisées. Le but est aussi de les assister, leur fournir conseils et techniques de production, de les orienter vers les matières premières de qualité et vers les designs à la fois en vogue et typiquement tunisiens.
Ce projet vise également à faire découvrir aux artisanes et aux artisans de ces régions les circuits à suivre pour une meilleure commercialisation des produits et leur permettre ainsi de contribuer efficacement à la dynamique socioéconomique.
Il faut dire que le Centre Sadika se préoccupe depuis bien des années de la question de la promotion de l'artisanat en focalisant sur celui qui se conforme aux exigences qualitatives. Après la révolution, et en réaction sans doute aux multiples dégradations qui ont atteint le secteur de l'artisanat, ledit centre, déjà certifié par des experts hollandais en tant que centre de commerce équitable, s'est engagé dans une expérience qui commence à donner ses fruits. "L'idée fondamentale consiste à réhabiliter l'artisanat tunisien. Le secteur de l'artisanat concerne toutes les régions, avec un nombre extraordinaire de personnes. La filière du tissage dans la région de Kairouan compte, à elle seule, 20 mille artisans", indique Mme Sadika Keskes, directrice du Centre.
Le gouvernorat de Kasserine, et plus précisément les villages défavorisés qui enregistrent un taux de chômage et de précarité élevé, a été choisi comme point de départ de cette démarche. Ce choix n'est en rien arbitraire : les localités éloignées de la ville de Kasserine et situées sur la frontière algérienne regorgent de richesses naturelles et de savoir-faire ancestraux à même de booster le secteur économique dans cette région, d'atténuer sensiblement le problème du chômage, de contribuer à l'essor du secteur de l'artisanat au niveau tant local que régional, voire international. Toutefois, et faute de moyens, de mécanismes de promotion et d'investissements, bon nombre de métiers typiques et de produits authentiques et fort originaux se sont éclipsés.
"Nous, artisanes de Foussana, nous nous distinguons par un savoir-faire et une expérience confirmés. Cependant, les moyens nous manquent, car nous sommes dépourvues de mécanismes d'appui. Même les prêts qui étaient destinés à la promotion des métiers de l'artisanat étaient gaspillés pour d'autres projets, ou plus précisément pour d'autres intérêts, et j'assume pleinement mes propos", indique Melle Rakia Laifa, tête de réseau à Foussana.
Pis encore, les démarches jadis en vigueur pour la promotion de l'artisanat dans ces régions allaient davantage dans le sens d'un commerce "mafieux" : les artisans étaient exploités comme une main-d'œuvre ne méritant pas plus que quelques dinars de salaire par jour. Les artisanes étaient payées à raison de 8DT le mètre de margoum ou de klim alors que ce produit était vendu à pas moins de 70DT le mètre. Le prix des tapis d'artisanat pouvant atteindre, quant à lui, les 500DT le mètre.
Démotivés, donc, les artisanes et les artisans ont fini par lâcher prise et opter pour d'autres activités, moins artistiques et plus basiques, afin de lutter un tant soit peu contre le besoin. Pourtant, il suffit d'un coup de pouce matériel, technique et créatif pour aider ces artisans à repartir du bon pied.
La démarche est simple. Elle consiste à désigner une "tête de réseaux" qui se chargera de regrouper les artisans et les artisanes et de veiller sur le bon déroulement des prestations. Pour ce qui est du Centre Sadika, il se propose de se charger, grâce à l'assistance de designers, d'enrichir les connaissances des artisanes et des artisans sur les nouveautés en matière de design. Il leur permettra de se perfectionner techniquement et de les aider à maîtriser désormais les nouvelles technologies, tout en veillant sur l'aspect typiquement artisanal du métier. " Notre rôle en tant que secteur privé diffère de celui de la société civile. Si les ONG accordent aux artisans des prêts et des dons, nous veillons à l'initiation technique et créative des artisans... Nous ne leur donnons pas du poisson, mais nous leur apprenons à pêcher", souligne Mme Keskes.
Outre l'orientation, le Centre Sadika met l'accent sur le critère de commerce équitable. Cette notion-droit a été longtemps écartée, divisant les artisans en deux groupes : ceux qui sont privilégiés et ceux qui sont soumis à la machine dictatoriale du secteur. Le commerce équitable a pour finalité de respecter le droit de l'artisan, en tant que talent et en tant que créateur, et de lui garantir le rendement matériel et moral qu'il mérite. "Les artisanes sont payées tous les dix jours, à raison de 220DT pour deux pièces de tissage", indique Mlle Laifa.
"Femmes, montrez vos muscles"
C'est l'appel lancé par le Centre Sadika et adressé aux femmes artisanes. A cet appel, plusieurs femmes ont répondu présent. Mais celles issues du village de Foussana, du gouvernorat de Kasserine, ont répondu de la façon la plus franche. En effet, près d'une centaine de femmes se sont rassemblées le 19 août devant le siège de la municipalité pour répondre à cet appel et réclamer leur droit à un salaire digne. Ces femmes, qui travaillaient dans des organismes étatiques, étaient payées le tiers du Smic. Elles se sont, de surcroît, trouvées délestées de leur salaire. Mme Keskes s'est dirigée le lendemain sur les lieux. Là, près de 500 femmes étaient présentes pour réclamer travail et dignité.
L'expérience de Foussana a donc été entamée le 20 août, date de cette réunion avec le Centre Sadika, mais aussi date de ce pacte d'honneur entre femmes artisanes. Cette région fort réputée pour ses tissages mais aussi pour ses nombreuses plantes médicinales, constitue actuellement un atelier de fabrication de tapis traditionnels et de plantes distillées. Au bout de quelques semaines déjà, 250 familles ont retrouvé un emploi qui leur rapporte pas moins de 400DT par mois et peut atteindre jusqu'à 680DT. Ces familles ont été, des années durant, livrées à la précarité. Actuellement, le village de Foussana compte six têtes de réseaux actifs, dont quatre femmes, 200 familles œuvrant dans le domaine du lavage de la laine, du filage et du tissage, cinq artisans sont devenus spécialisés dans la collecte des plantes aromatiques et dans la fabrication de petits sacs d'emballage et deux familles spécialisées dans la fabrication des huiles essentielles. "Les idées ne manquent pas dans ces contrées. Outre le tissage et les plantes médicinales, les montagnes de Berino accueillent quantité d'abeilles. Faute de moyens, cependant, les habitants ne peuvent acquérir le matériel nécessaire pour créer une activité d'apiculture. D'autres ne peuvent même pas se procurer le matériel nécessaire à la distillation des plantes aromatiques", souligne Mlle Laifa.
M. Mohamed Amine Mansouri est tête de réseau à Foussana. De niveau bac, il était chômeur avant le démarrage de cette expérience. "Ce qui manque, actuellement, à la promotion du tissage à Foussana, n'est autre qu'un petit atelier de teinture. Sinon, nous avons besoin de mécanismes et d'appuis pour la promotion de la vie socioéconomique à Kasserine", souligne-t-il.
Aujourd'hui, autant de projets prometteurs, autant d'espoirs et de familles qui s'ouvrent à la vie. Foussana, ce petit village, renaît enfin grâce à un secteur privé, conscient des défis et des enjeux de la Nouvelle Tunisie : une Tunisie harmonieuse. "Au bout de quelques semaines, nous avons dépensé 12 mille dinars pour la promotion de l'artisanat dans ces villages. Mais le parcours ne fait que commencer", ajoute Mme Keskes, qui précise que la création d'un atelier de teinture est envisagée à Foussana.
Il est à préciser que le Centre Sadika n'est pas le seul à développer cette approche. D'autres espaces d'art confirment leur volonté d'aider les artisans, issus des régions défavorisées, à s'imposer sur le marché et à apprendre les nouveaux abc d'un artisanat compétitif et intéressant à l'échelle tant nationale qu'internationale.
Mais cette contribution n'aura jamais de résultats sans un savoir-faire confirmé et une volonté collective d'aller de l'avant pour en finir avec la pauvreté et la marginalisation. Ce qui est encore plus satisfaisant, c'est que cette démarche n'est pas limitée à un seul gouvernorat ni à une filière artisanale précise. Les villages de Hassi, Lefrid, Hydra, Layoun et Berino sont également concernés par cette approche. Le Centre Sadika avait, auparavant, engagé une action similaire dans les villages de Ghar el Melh, mais aussi dans la région du Sahel et dans les îles Kerkennah pour la promotion de la dentelle artisanale: des actions qui ont permis de booster la production, de promouvoir la qualité des articles et de promouvoir la commercialisation et l'exportation de ces produits qualifiés ayant désormais leur place parmi les produits de luxe.


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