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Lorsqu'on s'en remet aux grands-parents
Enfance — Education
Publié dans La Presse de Tunisie le 20 - 01 - 2010


Souvent trop accaparés par une vie professionnelle prenante, les jeunes parents ne trouvent pas assez de temps pour s'occuper de leurs enfants en bas âge. Crèche, jardin d'enfants, pouponnière… représentent, alors, l'alternative à laquelle ils ont recours pour assurer la garde de leurs chérubins. Mais, lorsqu'ils en ont la possibilité, les parents préfèrent plutôt laisser les enfants chez les grands-parents qui sont, alors, sollicités pour faire la « nounou». Or, au-delà d'un simple rôle de garde, les grands-parents tissent des liens profonds avec leurs petits-enfants, en leur inculquant, à travers la transmission orale de leur propre expérience et de leur histoire, des leçons de morale et des règles de conduite essentielles à l'intériorisation des normes sociales. Riches d'un savoir-faire, d'une expérience et d'une sagesse accumulés au cours de toutes leurs années, les grands-parents représentent un maillon essentiel dans l'éducation, en jouant un rôle dans la transmission des schémas de pensée, de la culture orale ainsi que du comportement relationnel, nécessaires à la socialisation de l'enfant en bas âge. «C'est de 0 à 6 ans, que l'éducation se joue. C'est un âge transitoire entre la tendre et la prime enfant. Pendant cette étape de l'évolution de l'enfant, la prise en charge éducationnelle, affective… est primordiale, souligne F.M., responsable dans une entreprise publique. Or, les parents, souvent des jeunes actifs, préférant, au début de leur vie professionnelle, s'investir à fond dans leur travail, ne sont pas très disponibles pendant cette période et ce sont alors les grands-parents qui prennent le relais pour assurer et faciliter la socialisation et l'intériorisation des normes sociales par l'enfant en bas âge. Contrairement aux parents, les grands-parents ont un grand allié qui est le temps. Ils sont disponibles pour leurs petits-enfants et partagent avec eux des moments privilégiés empreints de beaucoup d'amour et d'affection au cours desquels ils leur transmettent un idéal de comportement social, de culture, un savoir-vivre très important pour faciliter leur intégration au sein de la société. Cette transmission de la culture orale et du comportement relationnel se fait par le biais d'une pédagogie spontanée». Amour, affection et discipline Pour R.C., assistante de direction dans une entreprise privée, et mère de trois enfants, âgés de cinq à huit ans, qui ont été éduqués pendant leur enfance par les grands-parents paternels, la prise en charge affective et éducationnelle des enfants par les grands-parents est une condition nécessaire à leur équilibre. «Le rôle des grands-parents dans l'éducation des enfants est essentiel, estime la jeune femme. D'ailleurs, on s'aperçoit de la différence lorsque la garde est assurée par une femme de ménage ou par une jardinière. Cette dernière se contente juste de les garder et de les surveiller. Le rôle des grands-parents va au-delà de la simple surveillance des enfants pendant l'absence des parents. Ils inculquent une certaine discipline ainsi que des règles de conduite qui sont importantes pour pouvoir s'intégrer dans la société. Il s'agit en effet de leur inculquer une façon de se conduire dans la société. Les grands-parents sont là pour apprendre aux enfants en bas âge ce qu'ils doivent dire, ou ne pas dire, faire ou ne pas faire, ce qui est bien et ce qui est mal, avec des mots simples, en jouant avec eux, en leur racontant des histoires qui se terminent par une morale. Mais surtout, ce qui est très important, c'est qu'ils leur prodiguent beaucoup d'amour et d'affection, nécessaires à la construction de leur personnalité». Tisser des liens profonds Les grands-parents, gardiens de l'histoire de la famille ? C'est l'avis émis par O.B., cadre dynamique dans une institution publique. La jeune femme a été témoin d'une magnifique histoire d'amitié qui s'est tissée entre sa petite fille âgée de six ans et sa mère septuagénaire, qui en a assuré la garde pendant des années. «Elle lui a transmis, en lui racontant des anecdotes, l'histoire de la famille. Elle lui a raconté des anecdotes sur elle, son grand-père, ses oncles et ses tantes… Ma fille connaît toute l'histoire de sa famille. Sa grand-mère a contribué à une étape importante de son évolution qui est la construction de son identité et la prise de conscience de ses racines. Les grands-parents assurent la transmission des souvenirs, de l'histoire de la famille. Ils représentent la continuité avec le passé familial. Sans eux, il y aurait une rupture avec les valeurs et l'histoire familiale». Si les grands-parents jouent un rôle dans la socialisation de l'enfant en bas âge, ils ont, parfois, tendance, sans le vouloir, à s'immiscer dans l'éducation des enfants et concurrencer des parents qui, obnubilés par leur activité professionnelle, optent, alors, pour cette solution de facilité, en se déchargeant de leur mission éducative auprès de ces derniers. «Je ne suis pas d'accord sur le terme éducation des enfants. L'accepter, c'est accentuer et accepter, la démission des parents, qui, déjà, est par trop perceptible, avec les obligations et pressions sociales de notre époque. Les parents sont de plus en plus occupés, obnubilés par leurs obligations professionnelles, leurs carrières, leur image, etc. Négligeant tout l'aspect affectif et relationnel enfants- parents, qui en est fortement bousculé, ils rejettent, en toute inconscience ou en toute bonne foi, leurs responsabilités parentales sur les grands-parents justement, dont le rôle ne peut être que complémentaire et non principal dans l'éducation et la formation des générations montantes. Les grands-parents sont les gardiens d'un certain nombre de valeurs qu'ils ont l'obligation de transmettre. C'est déjà très important. Chacun le fait à sa manière, mais, sans rien enlever à l'importance de ce rôle, il me semble que l'on doit savoir ce qu'on veut et ce qu'on demande aux parents et ce qui revient aux grands- parents. La confusion est actuellement totale», observe pour sa part K.G., journaliste et grand-père de deux petits garçons. Transmettre des valeurs ou éduquer ? La frontière est bien fragile et il ne faut surtout pas la franchir, conclut S.B., jeune cadre commercial. «Les grands-parents ne doivent pas se substituer aux parents. Je pense qu'en tant que parents, nous sommes tout à fait capables d'éduquer nos enfants comme nos parents nous ont éduqués et de leur transmettre les valeurs qu'ils nous ont transmises. Le rôle des grands-parents doit se limiter à donner de l'affection, jouer avec leurs petits-enfants sans intervenir dans leur éducation. Cette mission, comme je l'ai précisé, revient aux parents et à personne d'autre».

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