Le Gabon, pays hôte qui avait proposé un football chatoyant jusque-là, a craqué contre le Mali au terme d'une cruelle séance de tirs au but. Au prochain tour, les Aigles d'Alain Giresse sont condamnés à un autre exploit pour atteindre la deuxième finale de leur histoire après 1972. Ils devront en effet terrasser la Côte d'Ivoire de Drogba, grand favori du tournoi, qui a éliminé en quart le second pays hôte, la Guinée équatoriale C'est le meilleur joueur de l'équipe, Aubameyang, qui a raté son tir au but... Pourtant, la soirée avait bien commencé pour les Gabonais qui avaient ouvert le score par le Niçois Eric Mouloungui à la 55e minute, après un coup franc de Mandina, relayé par une passe en retrait d'Aubameyang. Cent vingt minutes ont été jouées, le temps réglementaire, les deux prolongations. C'est le moment des tirs au but et le Mali se qualifie. Après la Guinée équatoriale, c'est l'autre pays organisateur qui s'arrête en quart de finale. Et pourtant, les Panthères auraient pu l'emporter. Après un premier quart d'heure équilibré, les Gabonais accélèrent avec leurs deux attaquants Daniel Cousin et Aubameyang et deux gros pourvoyeurs de balle sur les côtés, Eric Mouloungui à gauche et Lévy Madinda à droite. Le dispositif est bien en place. Les occasions ne sont pas nombreuses en dépit de la mainmise sur le jeu des Gabonais portés par les quelque 35.000 spectateurs qui avaient investi le Stade de l'Amitié sino-gabonaise à Libreville. Jusqu'à la 28e minute quand sur une passe en profondeur de Cousin, Aubameyang voit son tir repoussé par la base du montant droit des buts de Soumaïla Diakité. Peu après, les Gabonais sont encore tout près de réussir mais le centre de Cousin est un poil trop long pour son jeune camarade. A la mi-temps, en dépit de leurs efforts, les Gabonais n'ont pas réussi à percer le mystère de la défense malienne, de Cédric Kanté et de ses frères. En mal d'oxygène, au bord de l'asphyxie... A la reprise, les protégés de Gernot Rohr continuent leur domination sur une équipe malienne qui joue beaucoup au milieu de terrain avec un seul homme posté aux avant-postes, Modibo Maïga. Seydou Keita, le Barcelonais, n'arrive pas à peser sur un jeu toujours à l'avantage des Panthères. Profitant d'un cafouillage à quelques mètres de la ligne de but, Eric Mouloungui ouvre le score en faveur de son équipe qui est à deux doigts de faire coup double deux minutes plus tard (58e), une reprise de Cousin sur un centre de Madinda échouant, pour la seconde fois, à la base du poteau droit. On prend petit à petit conscience que si les Panthères ne marquent pas un deuxième but rapidement, ils seront sous la menace d'une formation malienne qui a encore un bon réservoir de ressources physiques, alors que les courses permanentes des locaux depuis trois matches et demi ont épuisé les organismes avec aussi le poids des lauriers reçus depuis la qualification pour la seconde phase de la CAN 2012. Et c'est ce qui allait se produire à l'entrée des dix dernières minutes du temps réglementaires, le grand et solide Cheik Tidiane Diabaté, rentré peu auparavant, égalise 1-1. La fin de partie et les prolongations sont difficiles pour les Gabonais en mal d'oxygène, au bord de l'asphyxie. Ils n'ont plus de forces. Et ils vont sortir de leur épreuve sans démériter mais horriblement déçus. Ils ont dit Eric Mouloungui (Gabon): «Un grand sentiment de déception» «Vu qu'on mène au score et qu'ils égalisent lors des 10 dernières minutes, c'est compliqué à accepter... Il y a un grand sentiment de déception. On a joué un très bon tournoi. On a fait plaisir à la population gabonaise. On n'a pas à présenter des excuses (aux Gabonais). On était chez nous, c'est vrai. Le public est déçu comme nous-mêmes, je crois qu'on leur a fait plaisir, qu'on les a fait vibrer. Il y avait beaucoup de sceptiques, on a montré au peuple gabonais et aux connaisseurs qu'on avait notre place. L'équipe est jeune. On a péché sur de petits détails. On va continuer à travailler. Il y a une grande satisfaction, c'est qu'on sort de la CAN sans perdre de match». Gernot Rohr (sélectionneur du Gabon) : «On sort la tête haute» «Il nous a manqué un peu de réussite. On a eu deux poteaux. Au niveau des occasions franches, c'était jouable. Je voulais féliciter mes joueurs qui ont tout donné et quand on a tout donné, on peut sortir la tête haute en félicitant l'adversaire. C'était un match difficile contre une grosse équipe.» Alain Giresse (sélectionneur du Mali): «On a bien calculé notre coup» «Ce n'est pas une revanche. Je ne fonctionne pas comme ça. C'est mal me connaître. Aujourd'hui mon plaisir c'est d'être en demi-finale avec mon équipe, celle que je dirige... C'est une grande satisfaction. On a bien calculé notre coup, on a eu la patate nécessaire pour aller jusqu'au bout. Le coaching gagnant avec Diabaté? C'est une invention de journalistes. Si on savait qu'un joueur marquerait en le faisant entrer, on le ferait entrer plus tôt». Seydou Keita (milieu du Mali): «On n'a plus la pression, on n'a plus rien à perdre». «Je suis fier de porter ce maillot. (Quand j'ai marqué le dernier tir au but) C'était comme si j'étais dans les rêves. J'ai gagné avec Barcelone, mais on est en demi-finales et c'est comme si on avait gagné la Coupe. Quand on gagne, je suis comme un gamin, pourtant je ne suis pas jeune (32 ans). Il y en a dans le groupe qui ont 19 ans, mais je suis encore plus jeune qu'eux! Je suis revenu dans l'équipe du Mali pour les deux derniers matches des éliminatoires. Ça a été très difficile avec le coach. On ne s'était pas compris mais après ça allait. Je ne voulais pas revenir parce que je ne voyais pas le changement. Le coach ou moi, notre objectif c'est le résultat. Moi et le coach, on a un objectif. Aujourd'hui, on est complice. Personne ne nous a fait de cadeau. On a mérité notre qualification. Tout n'est pas parfait. On n'est pas Barcelone ni le Brésil, mais on est en demi-finales et on va jouer avec nos atouts. La pression c'est pour eux (Côte d'Ivoire). On n'a pas la pression, on n'a rien à perdre. Le passé ? (21 rencontres contre la Côte d'Ivoire, 14 victoires de la Côte d'Ivoire, 6 nuls, une seule victoire du Mali): En football, le passé ne compte pas».