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La réforme de la police : de la parole aux actes (1érepartie )
Publié dans La Presse de Tunisie le 17 - 03 - 2012


Par Jamil SAYAH*
La Tunisie est elle condamnée à avoir mal à sa police. Pourtant, depuis la Révolution, un étonnant consensus politique s'est dégagé autour de l'idée de la réforme de notre appareil de sécurité. Rien n'est encore fait. Pis encore, depuis quelques temps, à tort ou à raison, on accuse le gouvernement, et notamment le ministre de l'Intérieur d'instrumentaliser la police à des fins partisanes. Or des telles accusations ne peuvent, dans le contexte actuel, que déstabiliser encore plus une structure déjà en grande souffrance. Aussi, il faut restaurer la confiance. Il faut vite tordre le cou aux rumeurs en prouvant le contraire. Pour ce faire, il faudrait donner à comprendre comment se dessinent le sens et les nouvelles orientations de la politique de sécurité de ce gouvernement, et comment pourraient se dégager, à la lumière de nombreux défis auxquels la police doit faire face, les contours de la réforme à venir. Jamais l'enjeu de l'efficacité et de la modernisation des politiques publiques de sécurité n'a été à ce point au cœur des débats sur l'ancrage définitif de notre société dans la démocratie. L'usage et la pratique des services de police en constituent incontestablement un indicateur fiable.
Dans l'état de servitude où se trouvait hier encore la police, pour ne rien dire sur la justice, aucune mesure ne pouvait être légitime qu'elle n'ait un caractère d'autonomisation et d'émancipation de ce service de l'emprise politique. Sans doute, une telle option semble pouvoir être imposée par la force du bon sens démocratique et de l'intérêt général. En vérité, en la matière, il n'y a pas de milieu entre l'acceptation dégradante d'une police de régime et l'effort d'avoir une police démocratique, c'est-à-dire entre la servitude et la démocratie. Nos concitoyens ont déjà payé le prix fort en subissant, pendant plusieurs années, l'arbitraire d'une police inféodée. Ils n'en veulent désormais plus. Ils aspirent à un service public de police assurant leur sécurité et garantissant leur tranquillité.
Dès lors, c'est de la responsabilité des gouvernants que de transformer ce souhait virtuel en un droit réel. Certes, il a pu sembler, à certaines heures sombres de la violence salafiste qui viennent de s'écouler, que la police est retombée dans ces travers pathologiques en consacrant le triomphe de l'inaction et du « laisser faire ». Mais, dans ce cas même et à sa décharge, on ne peut nier que les directives de leurs responsables politiques étaient peu lisibles et mal coordonnées. Bref, elles étaient par leurs incohérences et leurs duplicités déroutantes. Or, sur quoi s'appuie-t-on aujourd'hui, en dehors de la déception à l'égard d'un gouvernement qui tarde à vouloir mettre sur agenda politique une réforme sérieuse de la police, sinon sur un vain espoir qu'un jour on arriverait à prendre conscience de l'absolue urgence de ce projet. Car, il est peu probable qu'on puisse encore obtenir des Tunisiens la renonciation sincère à cette légitime demande : la réforme de notre système de sécurité publique. Le temps commence à manquer.
La présente analyse tentera modestement de dégager les priorités de cette réforme. Sans prétendre épuiser un objet aussi complexe, elle se propose d'apporter de nouvelles pistes intelligibles du fonctionnement d'une police au service des citoyens et son rôle au sein d'un Etat droit. Il s'agit de donner à comprendre comment apprendre à mieux piloter l'appareil de sécurité par le biais des «meilleures pratiques» qui ont fait leur preuve dans des démocraties plus avancées que la nôtre. Outre la nécessaire modernisation organique et fonctionnelle de l'appareil (à laquelle nous avons déjà consacré plusieurs contributions dans ce journal), se dégagent trois autres types de priorités : une priorité structurelle, une priorité éthique et une priorité opérationnelle.
Vers une nouvelle doctrine : de la «sécurité intérieure» à la « sécurité globale»
Toute société, et tout particulièrement la nôtre est en permanence confrontée à des mutations auxquelles chacun (individu comme institutions) doit s'adapter. La police ne saurait échapper à cette problématique récurrente, mais semble-t-il, elle aurait plus de mal que d'autres à s'y faire. Ou, tout au moins, parce qu'elle est au carrefour de tous les enjeux de la société, les craquements que produit inéluctablement tout processus d'évolution y sont-ils plus perceptibles, voire bruyants. Il est vrai que notre société est devenue plus dangereuse qu'elle n'était avant la Révolution. Pas tant à cause de l'augmentation de la criminalité «ordinaire», que du fait du risque que porte désormais l'instabilité politique du voisinage, de l'émergence du grand banditisme (trafic d'armes...) et de l'irruption d'un jihadisme (religieux) belliqueux. L'onde de choc provoqué par la découverte des caches d'armes puis la bataille guerrière que ces jihadistes ont menée contre les forces de sécurité et les militaires, a fait ressentir ses effets diffus non seulement au sein de la société, mais surtout au sein même des armatures de protection. Le temps de l'insouciance est terminé. La nécessité d'adapter notre appareil de protection à cette nouvelle insécurité s'impose comme une évidence. Elle doit logiquement conduire à l'élaboration de nouveaux référentiels d'action.
Une nouvelle doctrine est apparue. Elle cherche à transcender le classique clivage entre force militaire et force de police. L'ancienne conception dite de « sécurité intérieure » ne semble plus être en mesure de parer aux risques et aux menaces globalisés. Elle a cédé la place à une nouvelle doctrine d'Etat : «la sécurité globale». Ce concept alternatif s'est construit autour d'une logique du réalisme absolu. La complexification des sociétés et les mutations structurelles qui ont affecté l'intensité et la variété des violences dont elles sont porteuses impliquent d'instituer une autre stratégie d'action. Des troubles graves et même des conflits majeurs (militaires) ne sont plus à exclure. De plus, la distinction entre l'ennemi extérieur et le délinquant intérieur est complètement dépassée. Le tout est désormais dans le tout.
Il serait alors illusoire de croire qu'un seul intervenant (en l'occurrence ici les forces de police) pourra embrasser tous ces problèmes et avoir les compétences adéquates pour y répondre. La coordination des acteurs, au-delà de leur corps d'appartenance, suppose une évolution profonde dans la stratégie d'action. Ainsi, la perspective d'une menace permanente conduit à développer une capacité d'anticipation et de connaissance, d'une part, et des capacités d'adaptation et de réaction rapide, d'autre part. Le tout doit se faire au profit d'une réorganisation des forces de sécurité publique qui doivent désormais agir pour prévenir, dissuader, protéger, surveiller et punir. Autrement dit, il faut amener police et armée à gérer en continu l'imprévisibilité politco-sociale.
Cela suppose un rapprochement opérationnel des forces militaires de celles des dispositifs de sécurité intérieure. Synergie et polyvalence sont la matrice de cette idéologie. Dans cette démarche solidaire, le but de la «sécurité globale» n'est point de fusionner structurellement les différentes forces engagées, mais de mettre en place un système de couplage permanent afin de mieux assurer la sûreté de l'Etat et de mieux garantir la sécurité des citoyens.
C'est pourquoi, dans une perspective à venir de modernisation de nos forces de sécurité l'adoption d'une telle doctrine s'impose par elle-même. En termes de réponse à l'insécurité, elle mettra la Tunisie au niveau des autres grandes démocraties. Paradoxalement, la situation actuelle de notre pays est favorable à la mise en place rapide de cette méthode opérationnelle. En effet, depuis la Révolution l'armée est omniprésente pour garantir la paix sociale. Elle a la confiance des citoyens. Elle a démontré à maintes reprises qu'elle est au service de la nation. Cette mission doit se pérenniser. L'armée doit pouvoir être employée dans une démarche de gestion de risque. Il ne s'agit pas de demander aux militaires de faire la police. Il s'agit de créer un système de coordination avec les forces de sécurité publique afin que l'armée soit mobilisable à bref délai en fonction des changements de l'intensité des risques à gérer. Par ailleurs, la notion de « sécurité globale » exige aussi une modernisation organisationnelle des forces de sécurité elle-même (police et garde nationale). Actuellement, la répartition des moyens humains en matière de sécurité publique est inadaptée aux réalités de la délinquance et à la dangerosité de la société. En effet, la répartition du territoire entre zone de police et zone de garde nationale doit être corrigée. Et la territorialisation des forces de police est totalement à revoir par le prisme de la police de proximité. La coordination de leur action constitue une question centrale.
Toutefois, pour qu'un tel système soit appliqué sans crainte, il faut le cumul de deux conditions essentielles. D'une part, il faut que l'idée de démocratie dans sa version institutionnelle d'Etat de droit (séparation des pouvoirs, contrôle des pouvoirs, contre-pouvoir....) soit reconnue comme irréversible et au-dessus toute autre considération, notamment idéologique. A défaut, le système se transformera en piège très dangereux. D'autre part, il faut laver l'institution policière dans son ensemble de tout soupçon partisan.
(A suivre)
* (Professeur de droit public)


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