Les travaux d'un forum ouvert sur la révolution contre la pauvreté, organisé à l'initiative de la Présidence de la République en collaboration avec l'Organisation des Nations unies, ont démarré hier à Carthage. Dans son mot d'ouverture, le Président de la République provisoire, Mohamed Moncef Marzouki, assimile la pauvreté au fait d'être privé d'accès à l'information, au savoir, aux services de santé et administratifs et de ne pas bénéficier de libertés. Il a relevé que la pauvreté est un concept qui ne cesse de se compliquer, d'où la nécessité d'une mobilisation générale pour combattre ce fléau qui ronge nos institutions. Si la démocratie s'avère suffisante pour contrôler les institutions elle l'est moins en ce qui concerne la lutte contre la pauvreté, a-t-il soutenu. Il a ajouté que le défi majeur qui se pose est de sortir deux millions de Tunisiens de la pauvreté, en l'espace de cinq ans, faisant remarquer qu'aujourd'hui, nous sommes en état d'alerte face à des politiques trébuchantes, des institutions qui fonctionnent mal et des projets qui ne se réalisent pas. La réussite de la révolution tunisienne dépend étroitement du rapprochement entre démocratie politique et démocratie sociale, a-t-il indiqué. Prenant la parole, Dr Mohamed Belhocine, représentant du Pnud en Tunisie, a relevé que si l'approche monétaire de la pauvreté est certainement utile, notamment pour comparer les pays ou les régions entre eux, elle n'en reste pas moins réductrice si elle demeure le seul élément d'identification de la pauvreté. Il a indiqué que l'expérience, de par le monde, montre que les avantages de la croissance économique ne se traduisent pas automatiquement par une amélioration de la vie des gens comme on le suppose souvent. En l'absence de politiques et de dépenses publiques appropriées, la croissance peut déboucher sur le chômage au lieu d'offrir des opportunités aux gens. Elle peut être impitoyable, sans voix, en réduisant au lieu d'élargir la démocratie, sans racines, en faisant taire au lieu d'encourager la diversité et sans avenir, en exploitant les ressources naturelles sans prêter attention au futur et à la durabilité. Un rapport du Pnud publié en 2011 relatif aux défis du développement arabe souligne qu'en Tunisie, les inégalités d'accès notamment à l'emploi, à la protection sociale et un revenu décent ont alimenté le déclenchement de la révolution tunisienne et continuent à être au cœur de l'expérience de transition du pays. La lutte contre la pauvreté signifie aussi de développer les capacités pour les groupes marginalisés à l'intérieur d'une société. Elle signifie, également, de négocier la répartition des biens, des moyens de production, des ressources naturelles et du travail. En juillet 2010, le Pnud et l'université d'Oxford ont lancé une nouvelle mesure de la pauvreté présentant un tableau multidimensionnel des personnes vivant dans la pauvreté. Ainsi, l'indice de pauvreté multidimensionnelle a remplacé l'indice de pauvreté humaine. Deux grands thèmes ont été débattus pendant la séance matinale, à savoir évaluer la pauvreté et cibler les programmes sociaux et mesurer leur impact. Il n'y a pas d'agenda dans ce format de rencontre, le premier du genre organisé en Tunisie, a précisé Kaïs Hammami, chercheur conseiller en prospective stratégique qui préfère utiliser le terme de la page blanche où tout est à concevoir dans le cadre d'une démarche.