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Un coup médiatique prémédité
Interview de Slim Chiboub sur Attounssia
Publié dans La Presse de Tunisie le 28 - 11 - 2012

Comment les acteurs du paysage politique national et de la société civile ont-ils réagi à l'interview télévisée tant attendue de Slim Chiboub ?
Le principal intéressé a-t-il répondu à toutes les questions qui lui ont été posées ou a-t-il escamoté celles qui dérangent ?
La Presse a approché certains parmi les protagonistes de la scène politique et civile pour leur demander ce qu'ils en pensent. Réactions.
Mohamed Jemour, secrétaire général du Parti des patriotes démocrates unis : Une prestation suspecte
Je trouve très important que l'interview de Slim Chiboub a été finalement diffusée. Les Tunisiens sont assez intelligents pour faire la différence entre la démagogie et la sincérité.
Il n'est pas le seul à avoir profité de ses alliances avec Ben Ali. Il a cherché à nous faire croire qu'il n'a pas amassé une grande fortune. Les Tunisiens ont compris qu'il n'est pas sincère. Je crois qu'il a voulu tendre la perche aux autorités en disant qu'il est disposé à revenir pour être jugé et restituer l'argent spolié, si par hasard il en reste quelque chose.
Il a eu assez de temps pour éliminer les traces des dossiers qui sont accablants. Il croit ne pas encourir de sanctions. Il n'a pas manqué de faire l'éloge du parti au pouvoir.
Est-ce qu'il s'agit d'une manœuvre ou est-ce qu'il propose ses services ? En tous les cas, sa prestation a été suspecte.
Il n'a cessé de défendre son beau-père, l'ex-président, et même sa belle-mère, qu'il présentait comme une rivale et il ne s'est pas désolidarisé de la famille.
Le fait que son interview a été diffusée était plus utile que d'interdire son passage. Au cas contraire, il aurait pu devenir une victime.
Les Tunisiens ont été convaincus davantage qu'il est un escroc, voire un filou, et je pense que personne ne va s'apitoyer sur son sort.
Il a omis, aussi, de parler de son frère Afif Chiboub, qui a ramassé une grande fortune aux dépens du peuple et qui dominait le secteur des assurances et y faisait ce que bon lui semblait.
Pour moi, toute la famille Chiboub a profité des largesses du régime déchu. Les Tunisiens doivent savoir que Slim Chiboub est une pièce maîtresse de l'ancien régime.
J'insiste sur ses interventions dans l'appareil judiciaire et sécuritaire où il nommait, à volonté, les responsables qui obéissaient à ses ordres.
Malheureusement, le journaliste qui l'interviewait ne lui a pas posé les questions qu'il fallait.
Me Amor Safraoui, président de la Coordination nationale indépendante pour la justice transitionnelle : Le gouvernement doit réagir avec la célérité requise
Je pense que les passages de l'interview qui n'ont pas été diffusés sont de loin plus instructifs que ceux que nous avons eu à voir.
Je me demande pourquoi Attounsia a opté pour cette solution. Est-ce le fruit d'un compromis avec le pouvoir en place ? La question reste posée tant qu'on ne sait pas pourquoi l'interview réalisée aux Emirats a été charcutée.
Slim Chiboub a reconnu avoir profité et de ses liens d'alliance avec le président déchu et avoir encaissé des commissions qu'il estime légales. Reste que personne n'est au courant des détails des marchés dont il a profité pour savoir si ces commissions sont légales ou non.
Je pense que beaucoup de brouillard plane sur cette interview. Beaucoup de questions posées ont été courageuses mais les plus audacieuses ont été posées par le journaliste, à partir du studio, après la diffusion de l'interview.
Je suis convaincu que Chiboub a refusé de répondre aux questions qui dérangent et qu'il n'a pas fait montre d'une volonté réelle de mettre le peuple au parfum du fonctionnement effectif du système de la corruption et de la malversation à l'époque du président déchu.
D'autre part, je me demande pourquoi le gouvernement n'a pas encore réagi aux affirmations de Slim Chiboub indiquant qu'il est disposé à retourner en Tunisie et à comparaître devant la justice pour répondre de ses crimes.
J'aurais aimé que le ministre de l'Intérieur intervienne lors de l'émission pour informer Chiboub qu'il peut récupérer son passeport auprès du consulat tunisien aux Emirats si telle était réellement son intention.
A la Coordination nationale indépendante pour la justice transitionnelle, nous appelons le gouvernement à réagir rapidement et faciliter le retour de Slim Chiboub en Tunisie ainsi que de tous ceux qui ont déjà exprimé leur volonté de se rendre à la justice.
Au sein de la Coordination, nous distinguons entre les crimes de torture et de répression où seule la victime est habilitée à pardonner ou à poursuivre en justice son tortionnaire, d'une part, et les crimes à caractère économique, d'autre part.
Reste une dernière observation: la décision judiciaire d'interdire la diffusion de l'émission lui a procuré une publicité énorme. Malheureusement, nous avons assisté à une interview où Chiboub a débité des généralités n'apportant rien de nouveau et s'est contenté de faire sa propre promotion.
Hichem Safi, secrétaire général du Mouvement de l'unité populaire : Une manœuvre électorale
A mon avis, peu importe le contenu du discours tenu par les uns et les autres, entre autres Slim Chiboub, le fond est le même. C'est une manipulation médiatique dans un cadre de gesticulation politique qui ne profite nullement à mon pays.
Peut-être qu'elle aurait un apport pour une classe politique qui cherche sa voie.
Que cette classe soit dans l'opposition ou à la tête du pouvoir, les motivations sont les mêmes : se placer dans une course électorale sans souci de projets ni de programmes. Lorsqu'on n'a rien à dire et surtout lorsqu'on n'a rien à faire, on fait appel à ce genre de manœuvre tel que ce qu'on appelle le projet d'immunisation de la révolution, ou on a recours à des coups médiatiques.
L'essentiel pour nous au Mouvement de l'unité populaire, c'est de dresser le diagnostic de la situation actuelle et de faire des propositions aux gouvernants pour réaliser les aspirations des masses populaires qui ont été à l'origine de la révolution et donc du changement. Le MUP reste fidèle à sa vocation en tant que laboratoire d'idées et parti de l'action. A.DERMECH
La diffusion de l'interview de Slim Chiboub, gendre de l'ancien président et symbole du régime déchu, lundi, sur Attounissia, après son interdiction, dans un premier temps, par les autorités concernées, a provoqué une grande polémique. Entre opposants et partisans, les repères se brouillent souvent. Mais les questions que se poseraient fort probablement bon nombre de Tunisiens seraient les suivantes: dans quelle mesure un média dans un contexte post-révolutionnaire peut donner la parole à quelqu'un qui est recherché par la justice? Ne vaudrait-il pas mieux laisser ce genre d'affaire pour les mécanismes proposés à la justice transitionnelle? A-t-on diffusé l'intégralité de l'enregistrement ? Afin de mieux éclairer ses lecteurs, La Presse a donné la parole au juriste, au journaliste et au politique:
Mustapha Letaïf (juriste) : La démocratie n'est pas un règlement de comptes
Dans cette affaire, il faut dire que l'on est face à deux questions complètement différentes. D'un côté, on a un interviewé faisant l'objet de poursuites judiciaires, et de l'autre côté, on a la question de la déontologie professionnelle. S'agissant du premier volet, il faut dire que la justice est en droit d'interdire la diffusion d'une matière médiatique qui peut nuire à l'ordre public et menacer la paix sociale et l'équilibre de l'Etat. Pour ce qui est du deuxième volet, il me semble avant tout évident que la démocratie n'est pas un règlement de comptes. C'est que dans un pays démocratique, le public a le droit d'être informé sur des questions confuses. D'autant plus que la censure ne fait qu'étouffer la liberté d'expression, facteur sine qua non pour le développement d'un climat démocratique. Sur un autre plan, il faut reconnaître que le fait de voir des journalistes tendre la main à des symboles de la dictature peut s'avérer choquant. Toutefois, cela peut être justifié par une quête de la vérité afin de mieux informer. Je pense, du reste, qu'un journaliste, conformément aux règles de la déontologie et aux lois en vigueur, peut transmettre son produit tant que cela ne présente pas un danger réel pour la stabilité du pays. J'ai vu cette interview et je pense que sa retransmission ne présente aucun risque.
Rachid Khchana (journaliste et activiste politique) : La censure favorise l'installation d'une nouvelle dictature
Vous parlez d'un contexte post-révolutionnaire, mais moi, je préfère dire un contexte démocratique. Cela me permet de mieux enchaîner les arguments que je vais avancer. Dans cette optique, il ne faut pas perdre de vue que dans les Etats démocratiques, même les gens emprisonnés ont le droit d'accès aux médias et vice-versa. Même en Israël, on peut interviewer un prisonnier. Cela pour finalement admettre que l'opinion publique a le droit de savoir davantage sur des questions d'intérêt général.
Autrement, toute sorte de censure ne peut que baliser le terrain devant l'installation d'une nouvelle dictature. L'on commence par un contexte ou un prétexte pour ensuite parvenir à contrôler tout et à étouffer la liberté d'expression.
Parler, par ailleurs,d'interconnexion de rôles entre presse et justice transitionnelle pour dire que le journaliste aurait-servi de trait d'union entre l'accusé et le peuple me semble à bien des égards, disproportionné. Car la logique fait que chacun a son rôle à jouer. Le journaliste est là pour informer. Alors que toute reddition des comptes ou réconciliation entre les parties opposées incombe à la justice transitionnelle.
Le fait de diffuser uniquement une heure sur un enregistrement de deux heures, il est vrai, cela peut être associé à un arrangement entre les deux parties (le support médiatique et la partie ayant précédemment interdit la retransmission de l'interview en question). Il va sans dire qu'il a fallu certainement batailler pour décrocher son droit à la diffusion de son travail.
Rachida Enneifer (juriste et journaliste) : Il vaut mieux parler de publi-interview
Je pense que le problème se pose davantage sur le plan éthique et politique que sur le plan juridique.
En parlant éthique, l'on admet nécessairement qu'un journaliste se doit d'informer. De là, toute investigation devrait avoir pour objectif d'éclairer l'opinion publique. Vue sous cet angle, l'interview n'a pas rempli son principal objectif qui est l'information du téléspectateur sur des questions floues. Elle s'apparente ainsi à un autre genre journalistique, à savoir la radio-trottoir, dans la mesure où l'on tend le micro à une personne pour qu'elle exprime ce qu'elle a envie de dire. Je dirais cela pour éviter de faire un procès d'intention à la chaîne concernée. Il me semble qu'au lieu de parler d'une interview, il vaut mieux parler de publi-interview.
Sur le plan politique, cette interview pourrait-être conçue comme s'inscrivant dans une tendance qui essayerait de banaliser tout ce qui serait en rapport avec les dérapages et les crimes commis par des défenseurs de l'ancien régime. Cette tendance mérite d'être analysée par rapport aux risques encourus par le pays , deux ans après la fuite de l'ancien président. Force est de constater, au demeurant, qu'on a besoin d'un vrai journalisme d'investigation afin de mieux informer et éclairer l'opinion publique sur des questions encore floues. Dans ce sens, il faut reconnaître que l'interview doit être le couronnement d'un important travail d'investigation. Ce qui n'est pas le cas pour ce qui est de l'interview menée avec le gendre du président déchu. Sinon, un journaliste est libre de choisir sa position, de décider de diffuser intégralement ou partiellement à condition que cela n'aboutisse pas à une désinformation ou à une manipulation de l'opinion publique. Propos recueillis par M.H.A.


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