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Là où règnent les pétrodollars, la poésie et la liberté d'expression trépassent!
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 18 - 12 - 2012


Par Mohamed Larbi BOUGUERRA
Euripide, le grand dramaturge grec du Vème siècle avant J.C. disait : «le silence est aveu.»
Pour le Tunisien, la poésie est le pain quotidien et l'hymne national. Face à l'anachronique condamnation à la réclusion à perpétuité du poète qatari Mohamed Al Ajami alias Ibn Al Dhib, prononcée le 29 novembre 2012, un an après son arrestation, les compatriotes de Jalaleddine Naccache, de Salah Garmadi, de Bayram Ettounsi, d'Aboulkacem Chebbi, de Mahmoud Kabadou, de Mahmoud Bourguiba et de tant d'autres versificateurs talentueux ne peuvent garder le silence, car cet homme a eu l'audace d'écrire, deux jours après la fuite de Ben Ali :
«Nous sommes tous la Tunisie face à une élite répressive.»
Tel Kaffour que les philippiques d'Al Mutanabbi (915-965) irritaient au plus haut point, l'émir du Qatar s'est senti «insulté» par ce poème où l'on peut lire (grâce à la traduction du poète Tahar Bekri) :
«Réjouis-toi pays dont le maître est ignorant. Il croit que la dignité est grâce aux forces américaines» et y a vu un crime de lèse-majesté. Dans son ouvrage «Rien n'est sacré, tout peut se dire » (La Découverte, Paris, 2003), Raoul Vaneigem écrit : «Il n'y a ni bon ni mauvais usage de la liberté d'expression, il n'en existe qu'un usage insuffisant.» Cette vérité, hélas ! n'a pas encore cours dans certaines contrées au XXIe siècle, là où fleurissent les fleurs vénéneuses des «vérités-sanctuaires et les secrets d'Etat».
D'après l'interprétation étriquée des autorités qataries, les vers d'Ibn Dhib constitueraient une «incitation au renversement» du régime car Ibn Dhib dit :
«Pourquoi ne cherche-t-il (le peuple) pas un gouvernant qui le libère du pouvoir arbitraire?» oubliant que l'actuel émir est accusé d'avoir lui-même renversé son propre père, sans l'aide d'un poète mais par la grâce de son portefeuille de ministre de la Défense !
Ce verdict scandaleux a été rendu «au terme de six audiences, pour la plupart secrètes» affirme l'avocat du malheureux poète qui a interjeté appel. Comme on le voit les prétentions démocratiques du Qatar — où il n'existe aucun parti politique — et de sa chaîne de télévision ne sauraient s'appliquer à son propre pays. Faut-il rappeler ici que le Qatar, qui s'active chez nous, en Syrie, en Libye et ailleurs, aurait pris une part active dans la répression du soulèvement populaire à Bahrein en 2011 ?
On aimerait entendre nos dirigeants et les leaders de nos partis et notamment M. Rached Ghannouchi — qui rencontre l'émir— , condamner cette privation antédiluvienne de liberté d'un homme de lettres qui rêve de liberté et rejette le pouvoir absolu. Pour sa part, M. Laurent Fabius, le ministre français des Affaires étrangères n'a pas été ému outre mesure par cette condamnation et fidèle à la «diplomatie économique» de son gouvernement déclare : «S'en prendre à des poètes, ce n'est évidemment ni ce que souhaite ni ce qu'admet la démocratie française» pour ajouter, pragmatique, voire un tantinet méprisant : «Ce pays a la troisième réserve de gaz au monde et dégage 50 milliards d'euros consacrés à son équipement intérieur et ça peut faire vivre les entreprises françaises.» Victor Hugo — qui a été forcé à l'exil pour avoir condamné le coup d'Etat du 2 décembre 1851 dans ses poèmes ciblant «Napoléon le Petit» — et Charles Baudelaire– condamné pour des vers jugés licencieux par un tribunal «syphilitique» — doivent se retourner dans leur tombe face au raisonnement de boutiquier du gouvernement socialiste!
Mais, chez nous, du côté de la Kasbah, on pourrait faire bien mieux en faveur d'un poète qui chante notre Révolution, notre peuple et notre jasmin, lui, qui a compris la portée universelle de l'héroïsme des Tunisiennes et des Tunisiens.
A l'endroit de Qatar, on peut dire que la modernité et le progrès, en tout cas, ne se mesurent ni à la taille des comptes bancaires ni au nombre de résidences dans les quartiers huppés de Paris ou de Londres ni en fonds souverains obèses. Il y a trois siècles, Voltaire affirmait : «Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites mais je me battrai pour que vous puissiez le dire librement.» et, plus près de nous, Raoul Vaneigem demande : «Autorisez toutes les opinions, nous saurons reconnaître les nôtres, nous les combattrons, nous apprendrons à annuler la force attractive des nuisances.... Nous les combattrons par la seule critique qui les puisse éradiquer : en pensant par nous-mêmes...»
Nos peuples sont adultes et n'ont besoin de personne pour juger une opinion en dépit du fait «qu'avec la richesse pétrolière, le monde arabe a été rattrapé par l'arriération des pays de la péninsule Arabique» (Samir Kassir, «Considérations sur le malheur arabe», Sindbad- Actes Sud, Arles, 2004).
S'adressant aux officiels de son pays, Ibn Dhib achève son poème en posant une question pleine de bon sens :
«Puisque vous importez tout de l'Occident,
Pourquoi n'importez-vous pas le droit et la liberté ?»
Exigeons tous la liberté pour le poète Ibn Dhib. Diffusons son poème et réclamons de tous les potentats... le droit et la liberté car le Tunisien ne saurait rester silencieux face à un homme qui voit par-delà l'horizon et qui lui déclare, admiratif :
«Toi le révolutionnaire, allume la révolution avec le sang du peuple
Sculpte le salut des peuples pour toute personne vivante.»


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