• Un traitement à base d'immunodépresseurs testé actuellement à l'Institut national de neurologie Chez certains, elle sommeille et se réveille de façon intermittente par des poussées. Insidieuse, sournoise, elle fend sur sa proie saine sans crier gare, transformant du jour au lendemain sa vie en cauchemar. Cette pathologie, dont on ignore toujours les causes exactes, s'appelle sclérose en plaques ou, plus communément, SEP et s'en prend à des sujets âgés, entre vingt et cinquante ans, qui ne présentaient pas jusqu'ici de maladie particulière. En Tunisie où un cas se déclare par semaine à l'échelle du territoire, ils sont environ 5.000 à être atteints de sclérose en plaques, dont deux tiers de femmes et un tiers d'hommes. Samedi dernier, l'Association tunisienne de la sclérose en plaques a célébré la Journée nationale et mondiale de la sclérose en plaques en organisant un séminaire au cours duquel le professeur Fayçal Hentati, chef de service à l'Institut national de neurologie, a présenté une communication sur le thème " L'évolution de la SEP durant les deux dernières décennies et le rôle moteur de l'Institut national de neurologie dans le traitement de la maladie». Le professeur Patrick Hautecœur, neurologue à l'Université catholique de Lille, était là aussi et s'est exprimé sur "le concept des nouvelles approches thérapeutiques de la prise en charge dans sa globalité de la SEP". Inflammation du système nerveux central Si elle existe depuis des siècles, la sclérose en plaques est décrite pour la première fois le 14 mars 1868 par le docteur Jean-Martin Charcot, neurologue à l'hôpital de la Salpêtrière et fondateur de la neurologie moderne, qui la différencie de la maladie de Parkinson et la nomme sclérose latérale amyotrophique (SLA) ou maladie de Charcot. Il arrive à en établir les symptômes cliniques à travers l'observation de sa propre servante qui en était atteinte à l'époque et qui en présentait les symptômes, dont une élocution mal articulée, des mouvements saccadés des yeux et un tremblement des bras. Depuis, de nombreux cas ont été diagnostiqués et les examens ainsi que les autopsies réalisées ont montré que la SEP est causée par un dysfonctionnement du système immunitaire, provoquant une infection inflammatoire à l'origine de la démyélination des nerfs. Or, c'est la myéline qui est responsable de la transmission rapide de l'influx nerveux, permettant à un individu d'exécuter des mouvements rapides et coordonnés. C'est ce qui explique que les personnes atteintes de sclérose en plaques éprouvent, parfois, de grandes difficultés à se tenir debout et à effectuer des mouvements coordonnés, comme marcher ou tenir un verre à la main. Le calvaire de la maladie Si certains s'en accommodent, la vie finit par se transformer, pour d'autres, en un véritable calvaire. Commerçante et ancienne handballeuse, Saloua Sanhaji voit apparaître chez elle les premiers symptômes de la sclérose en plaques en l'an 2000. A l'époque, la jeune femme, âgée aujourd'hui de 48 ans, ignorait tout de la maladie. Au début, cette dernière, qui ressent une faiblesse de la jambe et traîne du pied, n'y prête pas attention. Le médecin qu'elle consulte ne se doute de rien non plus et suspecte un simple manque de calcium. Le 11 janvier 2000, la jeune femme, qui ressent, alors, une grande lourdeur aux jambes et qui a du mal à marcher, se rend chez un neurologue qui lui prescrit une IRM. Le verdict tombe : sclérose en plaques. Les injections d'interférons, qui rythment la vie de la jeune femme courageuse, ne l'empêchent pas, pourtant, de mener une vie normale, de sortir avec ses amis et de voyager. Mais la SEP finit par prendre le dessus et la cloue dans une chaise roulante. " Je ne peux plus me tenir debout sur mes pieds. Je suis devenue dépendante d'autrui. Ce sont ma sœur et ma nièce qui m'aident à faire les gestes du quotidien. J'ai fini par accepter mon sort ", avoue-t-elle d'un air résigné. Sous-chef de service dans une société d'assurances, Ali Souissi, la quarantaine, est un ancien sportif dont la forme et la bonne santé ne prédisposaient pas à la SEP. Le jeune homme, qui est très actif et joue dans l'équipe sportive de la société, est loin de se douter que la SEP sommeille dans son organisme. Celle-ci se déclare, pour la première fois, en 1993 et se manifeste au début par un tremblement du pied. Le jeune homme doit, pour marcher, s'appuyer sur le mur. Le scanner effectué, à la demande du médecin, révèlera " une inflammation du système nerveux central, appellation barbare qui n'a, au début, aucune signification pour le jeune homme."Quand le docteur m'a annoncé la nouvelle, je n'avais jamais entendu parler de la sclérose en plaques et je ne comprenais pas ce que j'avais. J'ai été, par la suite, mis sous bolus et j'ai fini par m'y faire ". Si les facteurs à l'origine de la SEP restent encore indéterminés — on soupçonne surtout le facteur environnemental d'être une des principales causes —, la recherche a, par contre, permis de faire de nombreux progrès quant au traitement de la sclérose en plaques. Actuellement, un traitement à base d'immunodépresseurs, permettant de diminuer les cellules inflammatoires à l'origine de la maladie, est en train d'être testé à l'Institut national de neurologie. En attendant probablement l'utilisation des cellules souches, encore au stade expérimental, dont l'efficacité n'a, toujours, pas été prouvée et qui permettront probablement, un jour, la remyélination des nerfs atteints par l'inflammation.