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«Le CPR fait partie du passé, je lui souhaite bonne chance»
Entretien avec : Mohamed Abbou ou le démissionnaire
Publié dans La Presse de Tunisie le 15 - 03 - 2013

La nouvelle est tombée hier comme un couperet, l'enfant terrible ne reviendra pas à la maison. Mohamed Abbou, secrétaire général du Congrès pour la République a fini par claquer la porte, officiellement! Il a démissionné d'un parti membre de la trinité au pouvoir, celui-là même qui a porté Moncef Marzouki au Palais. Constat objectif : le CPR, qui a incarné pour beaucoup de Tunisiens, surtout les jeunes, l'esprit de la révolution, est en train de se réduire comme peau de chagrin. Une première dissidence menée par Abderraouf Ayadi lui a coûté près de onze députés. La débâcle, cette fois-ci, s'annonce pire. Abbou, Monsieur, ne partira pas seul. Il sera suivi par une autre Abbou, Madame. Sa femme, députée célèbre à l'ANC, coupe garçon et langue acérée. Et, par «d'autres députés du même CPR», nous annonce-t-il au gré de l'entretien. Ainsi, le coup porté sera d'autant plus dur qu'il sera probablement irréversible. Si Ayadi s'est contenté de former un groupe parlementaire, Wafa, à la Constituante, Mohamed Abbou, conformément au titre de redoutable carriériste politique qu'on lui prête, annonce d'emblée la formation de son parti. Une formation qui risque fort de faire de l'ombre, voire supplanter celle du grand frère.
Pourquoi en est-on arrivé à ce point de non-retour, au moment où un gouvernement vient de se former, où les ministres du CPR siègent en bonne place ? Justement c'est là que le bât blesse. M. Abbou aurait conditionné son retour aux affaires par la révocation de certains ministres Cpristes. Condition visiblement jugée irrecevable. Il a donc préféré partir. D'autres raisons moins avouées seraient à l'origine de ce fracassant divorce : la grande rivalité en serait la raison pivot. Celle-ci opposerait un «ambitieux» secrétaire général au président fondateur du parti et président de la République, en perte de légitimité.
Faute de prérogatives, faute de prises de position fermes, mais aussi mauvaise gestion de la communication présidentielle, Moncef Marzouki a disparu de l'espace public, au moment où le pays vivait des périodes graves de son histoire. Se voulant homme de consensus, le président est de plus en plus perçu comme homme de compromis. Pendant ce temps, Mohamed Abbou se revendique comme le porteur d'une ligne de refus de compromission avec les corrompus et les reliques de l'ancien régime, le défenseur de l'âme révolutionnaire, et l'homme, incompris, des grandes réformes de l'administration. Première démission du gouvernement, deuxième du parti, pour dire haut et fort qu'il ne tergiverse pas sur ses opinions et va au bout de ses décisions. Abbou a refusé un portefeuille et est parti creuser son sillon. Déçu, fait-il savoir, mais se faisant un point d'honneur de ne pas critiquer son ancienne famille. Plus décidé que jamais à offrir une alternative au peuple tunisien. Le parti qu'il est en train de former, dont il tait le financement, la composition et même le nom, M.Abbou le positionne volontiers au centre gauche, plaidant pour une accentuation de l'intervention de l'Etat. Un parti qui aurait pour fondamentaux la défense de l'identité arabo-musulmane, qui se veut laïque mâtiné de constantes comme la réhabilitation de l'instruction religieuse dans le système éducatif, ainsi que le contrôle des mosquées par l'Etat. Un parti qui caresse l'idéal du nationalisme arabe version moderne, entre «peuples arabes libérés du joug du despotisme». Ce parti dont le programme n'est pas tout à fait défini, pourrait d'emblée séduire, à commencer par les islamistes au pouvoir, qui se cherchent des alliés à valeur ajoutée, arborant l'étendard laïque, mais se disant identitaires. Un cocktail exquis et porteur pour le marketing local et surtout international. Du coup, les grandes lignes ainsi annoncées pourraient être perçues comme des appels du pied de M. Abbou à Ennahdha et, à terme, augurer d'une fructueuse et pragmatique alliance. Entretien...
Si on revient au commencement de l'histoire, vous avez démissionné du ministère de la Réforme administrative, quels sont les événements importants qui vous ont fait vaciller ?
Nous nous étions convenus sur un certain nombre de prérogatives me permettant de combattre la corruption qui sévit dans l'ensemble des rouages du système administratif. Il y a eu un temps de réflexion pendant six mois, ensuite les revendications de me conférer certaines dispositions ont été refusées net, j'ai préféré partir.
Vous avez fini par démissionner du CPR ! Vous avez annoncé votre démission à maintes reprises sans la faire aboutir .
Je l'ai annoncée seulement, mais la situation du pays était délicate. D'autre part, certains m'ont annoncé que le parti pourrait se désagréger à cause de moi et que les adhérents sont inquiets. Donc je suis revenu sur ma décision. Les négociations en cours étaient importantes et concernaient le pays et non pas les problèmes de chaque parti séparément. Maintenant, je dois dire qu'au sein du parti deux points se posent : la gestion démocratique du parti, et la formation du gouvernement. Nous n'avons pu aboutir à des solutions claires. Je trouve que certains n'ont pas été à la hauteur et qu'il fallait qu'ils partent et engager des figures nouvelles, que ce soit au gouvernement ou au CPR. Je n'ai pas été écouté. J'étais moi-même proposé, mais j'ai préféré décliner.
Vous allez donc créer votre propre parti, quel serait son nom, et les personnalités qui le composent ?
Je n'ai pas encore le nom mais il y a une représentation inscrite dans un texte, les pourparlers sont en cours. Ce ne sera pas une partie du CPR, mais une formation avec de nouvelles figures, des compétences dans leurs domaines, des personnes connues pour leur intégrité. Il faut que ce parti essaye de donner une image nouvelle et positive de la classe politique parce que pour le moment, il faut le reconnaître, il y a beaucoup de défaillances.
D'où vient le financement de votre parti ?
Ce sont les règles observées au CPR, le financement ne doit pas être conditionné, les fonds des personnes ayant un lien avec le système corrompu de l'ancien régime ne seront jamais acceptés. Le financeur ne doit pas avoir des intérêts propres à défendre auprès de l'Etat.
Vous avez annoncé que votre parti pourrait inclure des personnes des ligues de la révolution, est-ce vrai ?
Les gens ont fait un lien entre un démissionnaire des ligues et ma démission. C'est une mise en relation étrange. Quelle est ma relation avec ces ligues, avec tout mon respect ? Je suis pour le droit de réunion, le droit associatif, je suis allé les voir et j'ai fait des déclarations, et je reste ferme sur l'usage de la violence qui annihile donc le droit de réunion et celui de créer des associations. Mais on ne peut pas se prétendre militants des droits de l'homme et appeler à la dissolution des ligues sans jugement, et via une pression sur l'Etat. Il faut d'abord aviser, suspendre et ensuite dissoudre; ces trois étapes doivent être respectées.
Combien de députés auriez-vous à l'ANC ?
Certains députés du CPR suivront cette nouvelle formation. Je ne peux pas me prononcer sur le nombre et dire que nous aurons dix députés pour former un groupe parlementaire. Nous avons commencé les contacts, nous espérons les voir aboutir.
Vous allez être dans l'opposition, comment allez-vous voter ?
Appuyer le gouvernement dans ses réformes et le critiquer dans ses erreurs. Nous devons offrir le modèle d'une opposition sérieuse, et non de sabotage systématique, en participant au chaos, ou encore en mettant en doute la légitimité.
Quel est le programme de votre parti, quelles sont les grandes lignes ?
Un parti social-démocrate qui encourage l'initiative privée et la propriété. L'Etat intervient dans le domaine social pour garantir la gratuité de l'enseignement et la couverture sociale. Le rôle régulateur de l'Etat doit être maintenu. Renforcement du service public avec une mise à niveau du secteur public. Il faut que les secteurs vitaux restent sous la gestion de l'Etat. Je pense aussi que la réduction du rôle de l'Etat ne s'adapte pas avec la réalité tunisienne.
La relation entre la religion et l'Etat, comment est-elle perçue par votre parti ?
Nous sommes un parti qui définit cette relation à travers des points précis : d'abord l'identité arabo-musulmane, ensuite que l'islam est la religion de la majorité des Tunisiens. L'Etat se charge de superviser les lieux de culte «amaken el ibada», contrairement à la laïcité française. Autre différenciation par rapport à cette laïcité, l'Etat garantit l'instruction religieuse dans nos écoles . Hormis ces quatre points, nous ne croyons en aucune relation possible entre la religion et l'Etat.
Quels sont les fondamentaux de l'identité arabo-musulmane ?
L'identité arabo-musulmane s'est formée depuis des siècles, la reconnaître parmi les fondamentaux de l'Etat n'est pas sujet de débat. Nous respectons ceux qui disent le contraire mais de toutes les façons, c'est un consensus entre la plupart des Tunisiens.
Est-ce que le nationalisme arabe relève de cette identité ?
Le nationalisme arabe n'est pas notre idéologie, mais une clause de notre programme qui figure également dans celui du CPR. Notre rêve qui sera réalisé, nous l'espérons, par les générations futures, c'est de fonder l'Union des peuples arabes libres sur la base de la démocratie et des droits de l'homme, et non pas par canons interposés et par la violence à l'instar des courants nationalistes quand ils avaient pris le pouvoir.
Quelle religion enseigner dans les écoles, celle des salafistes, celle prônée par le ministre des Affaires religieuses, M.Khadmi, celle développée dans les livres de M. Ghannouchi ?
Contrairement à la laïcité française à laquelle tient une partie de l'élite, nous insistons sur l'instruction religieuse, mais non pas l'enseignement religieux à l'instar de ce qui était enseigné par la Zeitouna, dont le retour n'est pas envisagé. Cette institution a été l'une des premières à s'engager dans la bataille de la modernité au début du vingtième siècle. En revanche, l'instruction religieuse dans les écoles et les lycées est fondamentale à nos yeux. La matière enseignée actuelle doit être perpétuée. Ce qui se fait actuellement, ni plus, ni moins.
Et le contrôle des mosquées, comment vous l'envisagez ?
C'était un des débats de notre collectif du 18 octobre, il est prouvé qu'actuellement ce sont les salafistes qui dominent les mosquées, ce qui conforte a contrario notre thèse, il faut que l'Etat joue pleinement son rôle et garantisse parallèlement leur neutralité.
Revenons à Mohamed Abbou, le CPR est-il devenu trop petit pour lui ?
Si c'était le cas, j'aurais agrandi le CPR, mais j'ai choisi de me retirer.
C'est donc une révolte de l'intérieur ?
Disons que je ne peux plus continuer, c'est vrai qu'il y a ceux qui appellent à rester et à faire des réformes de l'intérieur, j'ai répondu que ceux qui croient en cette possibilité adoptent cette option. Personnellement, je pense et je l'ai annoncé qu'il y a un véritable combat dans le pays à mener et que ces luttes internes ne mènent nulle part.
Si les islamistes se reconnaissent dans le parti Ennahdha, les progressistes démocrates laïques ne se reconnaissent pas dans le CPR. Il y a comme une dualité entre la façade idéologique annoncée et celle prônée par certains dirigeants du parti, ceci a-t-il participé à accentuer la ligne de fracture qui divise le parti ?
Je ne pense pas que la différence idéologique ait été la raison directe des problèmes qui ont causé la fracture dans le CPR. Je ne pense pas, mais c'est tout ce que je peux dire.
Il a été reproché au CPR l'incompétence de ses ministres et leur acharnement public à garder leurs postes.
Je ne peux pas être franc sur ce sujet non plus. Quand je quitte un parti je ne peux plus critiquer frontalement mes amis. Aujourd'hui, je parle de l'avenir, le CPR fait partie du passé. Je leur souhaite bonne chance.
Quelle est votre évaluation de la situation du pays ?
La formation du gouvernement a trop duré. Cette période qui s'annonce est courte, mais nous pouvons réaliser beaucoup de choses. Notre rôle sera dans l'opposition constructive, nous n'appellerons pas aux grèves sauvages et aux sit-in systématiques. D'un autre côté, il y des erreurs faites que nous connaissons et que nous relèverons.
Est-ce que votre parti se présentera aux élections?
Notre premier objectif n'est pas de se présenter aux futures élections, mais si nous serons prêts, la réponse est oui. Il faut que le parti se compose de personnes, dont moi-même, qui auront de l'ambition pour mettre en application leurs projets, qui ont un problème avec l'échec. Notre projet est porté par des gens déterminés et motivés et notre parti se présente comme une alternative à tous les autres.


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