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«La plus grande difficulté des constituants tunisiens est d'avoir un texte cohérent»
Entretien avec : Xavier Philippe, expert international
Publié dans La Presse de Tunisie le 15 - 06 - 2013

«La constitution est une vision, mais c'est aussi un bus, un texte qui vit, évolue et un mécanisme qui diffère selon la manière dont on l'habille... ». Xavier Philippe revient aux définitions et se défend de tout jugement politique et idéologique sur le contenu du 4e projet de constitution. Il en fait une lecture critique à la lumière des standards de droit constitutionnel comparé. Expert international, spécialiste des contentieux et des jurisprudences constitutionnelles comparées, il a participé, en tant qu'observateur étranger, à la rédaction de la Constitution sud-africaine de 1996. A Tunis, il était l'invité de Democraty Reporting International partenaire de l'Association tunisienne de droit constitutionnel dans la Lecture du projet du 1er juin...
Vous faites une lecture du projet de constitution au regard des standards de droit constitutionnel comparé. D'où viennent ces standards et sont-ils applicables partout et de tout temps ?
Les standards sont nés d'un certain nombre d'observations d'expertise comparée. C'est l'ensemble des dispositions communes que l'on retrouve dans le monde entier, comme la séparation et l'équilibre des pouvoirs, l'indépendance de la justice, la garantie des droits et des libertés, les instances constitutionnelles, les instances électorales, l'identité du régime, l'organisation des pouvoirs locaux... Evidemment, il n'y a pas une démarche unique pour donner une bonne ou une mauvaise constitution, mais une très grande variété. Le monde change et il est intéressant de remarquer qu'il y a eu des transformations géographiques, historiques et politiques profondes et qu'on a assisté, lors de ces trente dernières années, à un nombre important de refontes de constitutions dans le monde. Les changements politiques ont amené un nombre important d'Etats à se doter de nouvelles constitutions. Alors, avant de faire leur propre choix, ces Etats regardent naturellement d'autres constitutions et font appel aux standards comparés. Je cite l'Afrique du Sud où j'ai passé 7 ans et participé en tant qu'observateur étranger à la rédaction de la Constitution de 1996, ainsi qu'aux travaux de la Commission Vérité et Réconciliation.
Qu'est-ce qui fait une bonne et une mauvaise constitution ? Sur quels critères sont jugés ces textes ? La réussite d'une constitution ne dépend-elle pas surtout de son application ?
Une mauvaise constitution est celle qui donne un régime déséquilibré et un mauvais fonctionnement des institutions. Une bonne constitution peut parfois donner de bons résultats et un bon régime. Mais une constitution est toujours un pari. Au moment où elle est faite, par définition, on ne sait pas comment est-ce qu'elle évoluera. Il n'y a pas de garanties. La constitution est une projection. C'est un peu comme les prévisions météorologiques... Il y a des probabilités de réussite à côté des principes et des fondements qui tournent tous autour de la notion de l'Etat de droit. Vous savez que l'équivalent en anglais de l'Etat de droit c'est le « Constitutional State »... C'est ce qui fait la différence entre les régimes. Dans une société post-révolutionnaire, post-conflictuelle, la question est : quelles transformations veut-on introduire et quel est l'Etat nouveau que l'on veut construire ? Et puis, en général aujourd'hui, la néo-constitution veut que l'on n'écrit plus de la même manière. On exige que l'Etat prenne ses responsabilités sur les droits économiques et sociaux. Ce ne sont plus des droits de seconde zone, mais une obligation qui pèse sur l'Etat. Celui-ci a toujours les moyens de les satisfaire progressivement. Les libertés, de leur côté, ne sont pas toutes à mettre sur un pied d'égalité. Car, dans la mise en œuvre, il y a des libertés qui conditionnent les autres.
A travers votre lecture du 4e projet de constitution, vous mettez le doigt sur un certain nombre de lacunes de fond et de forme. Quelles sont les plus importantes ?
Suivant les points de repère objectifs de l'expertise comparée, la plus grande difficulté des constituants tunisiens est d'avoir un texte cohérent. Ce quatrième projet a certes évolué par rapport au premier. Mais il y a encore des difficultés d'arriver à un certain niveau de cohérence de l'ensemble. Il y a des aspects formels qui peuvent être améliorés. Avec les mêmes idées, on peut avoir un bon texte. Pour peu que les experts soient écoutés ; ils ont le bon mot.
Ma première remarque est que le projet comporte des articles déclaratoires sympathiques aussi bien dans le préambule que dans le texte. Mais ces articles n'ont aucune normativité et ne donnent naissance à aucun droit. En deuxième lieu, il comporte trop de mots et un emploi fréquent de termes indéfinis juridiquement. Troisième remarque, il y a, par endroits, un amalgame de droits qui méritent d'être traités séparément. Le mélange des genres n'est pas catastrophique mais entretient l'ambiguïté. Un point problématique réside dans l'article 19 sur le statut du droit international. Il stipule que « les conventions ratifiées par l'assemblée des représentants du peuple sont au-dessus de la loi et au-dessous de la constitution». La question se pose autour des conventions déjà ratifiées. Quel sera leur sort ? Deuxième problème, l'absence de la clause prévue par le droit international en cas de conflit entre les deux textes. Il s'agit d'une ouverture pour les rendre compatibles.
Quelle lecture faites-vous de l'article 48 ? A quelles normes devraient répondre les limitations des droits et des libertés ?
Il y a eu de grands progrès réalisés sur les limitations des droits et des libertés. Reste la clause générale de limitation. J'ai travaillé sur l'article 48 et cette clause manque d'un certain nombre de dispositions. La limitation d'un droit doit répondre à quatre conditions. La liberté ne peut être limitée que par la loi ; elle doit être soumise au législateur en fonction de la nature du droit. Les droits et les libertés doivent être opposables juridiquement. La limitation doit être nécessaire pour le fonctionnement de la démocratie, emprunte de rationalité et répondant au critère de proportionnalité. Il a été prouvé que cette clause est fondamentale. La Cour constitutionnelle sud-africaine montre qu'elle a été très utilisée.
A quoi servent en général les dispositions transitoires et que leur reproche-t-on dans le présent projet ?
Ce sont par définition des dispositions exceptionnelles, sorte de dérogation au nouveau régime. Mais cet exceptionnalisme est fonctionnel et technique. Il doit juste servir à éviter le vide. Toutes les constitutions comportent des dispositions transitoires qui prévoient de mettre des institutions de démarrage et d'assurer un transfert des pouvoirs en douceur. Car une fois promulguée, la constitution est applicable. Pour le présent projet, nombre de questions restent posées : pourquoi le législateur prévoit-il des délais ? Qui va contrôler la constitutionalité et pourquoi il n'y a pas de contrôle pendant trois ans ? Les dispositions transitoires comportent par définition des clauses de courte durée de quelques mois à un ou deux ans au maximum. Le législateur doit tout de suite commencer à travailler. Là aussi il y a un critère de rationalité. Les dispositions transitoires doivent être justifiées, avoir un caractère temporaire et prévoir une obligation de ne pas s'étirer indéfiniment...
La polémique enfle également à propos de la clause de révision, l'article 141... A quelles conditions doit répondre une révision de la constitution ?
C'est une clause extrêmement importante. La constitution est le contrat social. Mais c'est aussi un texte qui doit vivre et évoluer. Le constitutionnaliste n'est pas un dieu. Il ne peut pas tout imaginer. C'est pour cela qu'une clause de révision devient indispensable. Le système de révision est fréquent en constitution. Il y a des révisions techniques et d'autres politiques. Il y a des modes de révision. Dans tous les cas, le texte demande à être précisé et rationalisé. Il y a le référendum, mais la procédure est lourde et il y a confrontation à des difficultés techniques.


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