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Chronique d'une contre-révolution permanente
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 23 - 07 - 2013


Par Khaled DELLAGI
La Tunisie est-elle condamnée à devenir l'arrière-cour de l'Arabie Saoudite ou du Qatar après avoir été celle de la france? Le Monde arabe est-il condamné à rester l'arrière-cour de l'Empire américain après avoir été celle des Empires turco-mongols et des Empires britannique et français ? Ces questions méritent d'être sérieusement posées.
Après la chute du Mur de Berlin et l'effondrement du bloc soviétique, la mondialisation voulue et imposée par les U.S.A. s'est accommodée de la persistance dans le Monde arabe de l'absolutisme politique sous toutes ses formes, alors qu'il reculait ailleurs à la faveur du développement économique des sociétés. L'implosion des régimes de Ben Ali, de Moubarak et de Kadhafi a fait entrevoir aux citoyens de ces pays, la perspective extraordinaire de s'approprier leurs destins respectifs et de voir, chez eux aussi, s'édifier enfin des Etats de droit et la démocratie s'enraciner. Plus de deux ans après ces révolutions, le désenchantement est total. Comment en est-on arrivé là ?
En s'immolant de désespoir, le Tunisien Mohamed Bouazizi a incidemment mis le feu à la poudrière arabe. Les potentats du Golfe, trônant sur de fabuleuses réserves de pétrole et de gaz, ont vite pris la mesure du danger qui les guette si le vent de liberté venait à polliniser leurs pays. Pour ces régimes théocratiques, la démocratie est une invention du diable, une arme de destitution massive, à interdire à tout prix. Pour circonscrire l'incendie, la transition démocratique en Tunisie doit, pour eux, impérativement échouer.
Très vite, dès les premiers jours qui ont suivi la fuite de Ben Ali, la contre-révolution manipulée par ces Etats rétrogrades s'est mise en branle et s'amplifie sous nos yeux. Comble du cynisme, elle fut menée au nom de la réalisation des objectifs de la Révolution dont la défense fut confiée à des comités de voyous. Le scénario du drame se déroula en trois actes et son épilogue est proche. En lever de rideau, la Constitution de 1959 fut abrogée avant même que la nouvelle constitution ne soit écrite, créant un vide juridique absolu, propice à toutes les manipulations; au second acte, le parti islamiste prit le pouvoir à la faveur d'une immense tromperie dont le peuple fait les frais et fit main basse sur l'appareil de l'Etat; le troisième acte, en cours, voit la montée de la violence politique et du terrorisme islamiste et celui de ses sbires pour contenir les libertés publiques naissantes et préparer l'opinion au sifflet de fin de récréation démocratique. L'épilogue sera l'adoption de la nouvelle Constitution d'inspiration islamiste sous couvert d'une soi-disant recherche d'authenticité et d'affirmation de notre Houwiya. La boucle est bouclée : le nouvel Etat théocratique aura construit en moins de 2 ans la base de sa légitimité et, espère-t-il, de sa pérennité. A quelques détails près, le même scénario s'est déroulé en Egypte. En Libye, le chaos règne après la liquéfaction de l'Etat et la résurgence d'un particularisme régional virulent, prélude à sa somalisation. Triste bilan ! Printemps pourri !
Par petites touches, la transition démocratique en Tunisie se métamorphose en transition islamiste, au vu et au su de tout le monde, en particulier de l'élite politique tunisienne censée défendre la démocratie qui, durant cette phase vitale où se joue la survie de notre nation, reste paralysée par ses divisions et par le jeu stérile des ambitions personnelles. Ainsi, la Révolution tunisienne se sera fait châtrer et ne pourra plus enfanter.
L'instauration de républiques islamiques portées par le prosélytisme religieux wahhabite permettra aux monarchies du Golfe de caler leur légitimité institutionnelle et morale auprès de leurs propres peuples, par ailleurs tout aussi avides de justice et de liberté que le reste de leurs frères arabes, et à qui ils disent en substance : « Voyez comme ces révolutions confirment finalement notre choix de société ». La contre-révolution passe par l'immunisation de la société contre la démocratie et contre le pluralisme des idées. Elle facilite la propagation de l'intolérance et du fascisme religieux comme diffuse un virus dans un corps immunodéprimé. La hideuse déformation du message de l'Islam qu'est l'islamisme est le sida de nos sociétés, la maladie mortelle de nos révolutions !
D'entrée de jeu, le débat dans notre pays s'est focalisé sur la dimension de l'Islam dans notre identité nationale, dimension qui prit le pas sur toutes les autres (en particulier sur celle de la citoyenneté responsable). Elle en devient le nœud gordien. Dans le domaine de la psychologie sociale, ce changement de paradigme est lourd de conséquences : il assujettit le citoyen à une entité supranationale, la Oumma. A petite échelle, cette mutation introduit le débat au sein même des familles : aux parents encore travaillés par L'Etat-Nation forgé par l'Histoire et par les luttes passées et nourri par la proximité et les rêves partagés, s'opposent leurs enfants tentés par les certitudes sans appel, le fondamentalisme djihadiste et internationaliste. A l'échelle de notre pays, l'Islam malékite qui a de tout temps irrigué le Maghreb est défié par l'Islam wahhabite et pourrait perdre le combat en l'espace de deux ou trois générations. Une Tunisie wahhabite à l'horizon de 2050 est du domaine du possible si nous ne controns pas résolument cette secte extrémiste qui assèche l'esprit et le cœur, portée par les pétrodollars de ses promoteurs, la logomachie d'un autre âge de ses prédicateurs et les matraques de ses mercenaires.
Nous vivons dans un monde interconnecté : la mise au pas de la Tunisie converge avec l'objectif de l'Arabie Saoudite rêvant d'unifier le Monde islamique sous la bannière wahhabite. Après la disparition de la ligne de front idéologique Est-Ouest, une nouvelle ligne de clivage confessionnelle apparaît, interne au monde musulman, entre sunnites et chiites. Cette ligne de clivage lézarde le Monde arabe au risque de le balkaniser et ainsi réaliser les rêves de ses prédateurs, au premier rang desquels se trouve Israël, le dernier Etat ouvertement raciste de la planète. L'axe du Mal inventé par l'impérialisme américain, épouse la ligne de fracture religieuse du Monde islamique, fanatisant les foules prêtes à se jeter corps et âmes dans des croisades internes et des opérations kamikaze.
Notre pays est aujourd'hui au cœur d'un enjeu géopolitique régional et international aux conséquences immenses pour les Arabes et pour les peuples musulmans : ceux–ci sont-ils condamnés à rester les seuls peuples du globe qui feraient exception à la marche universelle vers plus de droits de l'Homme et plus de libertés individuelles. Au-delà des péripéties désespérantes actuelles, peut-être des étapes obligées, la réussite de la transition démocratique en Tunisie apportera l'espoir aux peuples, et jettera un pavé dans la mare stagnante du Monde arabe. L'Islamisme dans sa forme djihadiste, la plus rétrograde et la plus activiste, croit avoir aujourd'hui le vent en poupe. Jouant sur un reflexe communautaire d'autodéfense primaire face aux « mécréants », il instaure une mentalité d'assiégé, puisant sa force dans la Oumma et dans sa forteresse, le Califat, sous l'égide de l'Arabie Saoudite, gardienne des deux Lieux Saints (mais qui n'a jamais rien tenté en soixante ans pour libérer Jérusalem et la Palestine ! En fait, une seule fois du temps de la guerre de 1973, le roi Fayçal d'Arabie s'y tenta et paya de sa vie d'avoir osé la transgression !). Pour des décennies à venir, les pays arabes s'épuiseront à combattre les prétendus hétérodoxies internes et l'ennemi chiite iranien pour le plus grand bonheur d'Israël. Un vieux rêve sioniste remis au gout du jour par les émirs du Golfe : sionisme et wahhabisme même combat ! (Bernard-Henri Levy la main dans la main avec Youssef El Qardhaoui). Depuis la création de l'Etat d'Israël, les convulsions qui ont secoué les pays arabes ont été toutes dévoyées de leurs objectifs essentiels consistant à instaurer des états modernes. Tel fut le cas de la guerre civile libanaise ou de la guerre de « libération » de l'Irak. L'objectif stratégique américain et israélien est de maintenir les pays arabes dans un état de faiblesse chronique et de dépendance psychologique et matérielle, afin de mieux les asservir à leur volonté. Vieille recette de colonialistes ! Pour cela, les U.S.A peuvent compter sur la fidélité servile des proconsuls bédouins et sur la matraque du gendarme israélien. Le moteur de l'aliénation des peuples est ainsi entretenu par la contre-révolution permanente. Rien de changé sous le soleil : hier, la CIA renversait par la force le Premier ministre nationaliste iranien Mossadegh en 1953 et le président chilien de gauche Allende en 1973. Demain, elle veillera à faire avorter tout ce qui pourrait augurer de l'entrée des peuples arabes dans le 21e siècle. Qu'ils continuent à mariner dans leurs chimères d'un autre âge...
Notre pays est enfermé dans ce cercle infernal bien décrit par Ibn Khaldoun, des dynasties despotiques et éphémères s'effondrant à la première faiblesse, au profit d'un successeur tout aussi despotique. Aujourd'hui, la « normalisation antidémocratique» imposée prend différents visages selon le pays concerné. A Bahreïn, la contre-révolution a écrasé la révolte populaire sous les chenilles des chars saoudiens. En Arabie Saoudite et à Oman, elle a soudoyé la démocratie en achetant à coup de pétrodollars les peuples anesthésiés. En Syrie, elle recrute des bataillons de djihadistes pour une guerre civile confessionnelle et sans merci. Partout ailleurs, elle ré-islamise les sociétés : elle s'y prend par le haut en instaurant la charia, en promulguant des fatwas à la carte, en écrasant une moitié de la société sous le machisme de l'autre moitié et en rejetant les évidences de la science. Elle s'y prend aussi par le bas, en faisant porter la parole par une cohorte de prédicateurs fanatiques, aussi incultes qu'intolérants qui ont éteint dans leur cervelle toute lueur d'intelligence, et en la relayant quand il le faut par la matraque des nervis. Mais tout excès porte sa solution : le peuple égyptien vient de tracer la ligne rouge et de rappeler hautement qu'il reste l'alpha et l'oméga de toute légitimité.
Comment résoudre la quadrature du cercle ? L'espoir des peuples en une vie digne et libre est insubmersible ; tel un bouchon de liège, il refait surface quand on veut le noyer ! La conscience des peuples est l'âme de la Révolution permanente. La reconquête de notre souveraine citoyenneté passe par un sursaut de toute la nation. La société civile veillera au grain et son mot d'ordre est clair : instauration d'un Etat-Nation moderne et séculier.
Les constituants seront-ils au rendez vous de l'Histoire ? Sauront-ils faire émerger une Constitution résolument tournée vers l'avenir, éclairée par l'intelligence du cœur et de l'esprit ; une Constitution qui, tout en confortant notre identité arabo-musulmane forgée par des siècles d'histoire qu'aucun Tunisien ne renie, saura la mettre à la hauteur de l'homme nouveau que le Tunisien aspire à être et remettra notre peuple dans le sens de l'Histoire? Sauront-ils redonner espoir aux Tunisiens et au-delà, à tous les Arabes et à tous les hommes de bonne volonté ?
Liberté et dignité avant toute chose !
Raison vaincra !
Le peuple tunisien et ses élus se donnent rendez-vous le 23 octobre 2013.


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