Par Farhat HACHED Les événements récents survenus en Egypte et le lâche assassinat du représentant de la nation, Mohamed Brahmi, nous interpellent et montrent clairement les dangers de la bipolarisation sur le processus démocratique. La prochaine étape qui commencera après les élections sera décisive pour l'ancrage des valeurs démocratiques. Il y aura la mise en pratique de la justice transitionnelle, pierre angulaire de l'édification d'une société démocratique et pour sa réussite la coalition la plus large possible est requise. Sur le plan économique, des dossiers brûlants comme la compensation, l'assainissement du secteur bancaire, la fiscalité, le développement régional, la situation des caisses sociales, etc, nécessitent tous le plus grand consensus. Certains préfèrent ne pas arriver à cela et espèrent voir en Tunisie la reproduction du scénario égyptien et défendent l'idée que ce qui s'est passé en Egypte n'est pas un coup d'Etat mais une réponse à une demande populaire. Autant en Tunisie les tentatives de la contre-révolution pour arrêter le processus démocratique ont échoué à ce jour, autant en Egypte on assiste aujourd'hui à un succès apparent. Les moyens mis en œuvre par les lobbys, les pétrodollars, la misère ambiante, la rancœur des partis perdants, la crainte d'une partie de la population pour ses libertés individuelles sans oublier que les erreurs de gestion et surtout de communications du président Morsi et de son parti ont facilité le travail des contre-révolutionnaires. Avec cet arrêt brutal du processus démocratique, l'Egypte risque au mieux de se retrouver avec une dictature à la Franco et les premiers à en pâtir seront les jeunes qui étaient le 30 juin à Ettahrir . En effet, toutes les dictatures ne se ressemblent pas, celles que nous avons connues ces derniers temps en Tunisie et en Egypte sont du type mafieux où la classe régnante se contente de piller les richesses et de violenter les concurrents potentiels au pouvoir. Ce genre de dictature reste un moment vivable, vu qu'elle permet le degré de liberté. La dictature que risque l'Egypte sera du type fasciste. Sans une solution rapide qui permettra la reprise du processus démocratique, l'avenir de l'Egypte risque d'être des plus sombres. Je souhaite que des personnes raisonnables au sein de la classe politique et des militaires égyptiens puissent éviter à leur pays le sort de la Syrie. Pour notre part avec la mise en place de l'Isie et la finalisation prochaine de la Constitution, on pouvait espérer avoir une sérieuse option pour les élections. Il faut croire que certains ne sont pas intéressés par une telle évolution et préfèrent voir s'installer le chaos. Après la violence verbale qui a glissé vers la violence physique, notre pays assiste, et pour la deuxième fois, à un assassinat politique. Si la recherche des assassins des deux martyrs de la transition démocratique, le député Brahmi et feu chokri Belaïd est du ressort de la justice, une part de la responsabilité incombe à la classe politique dans son ensemble. Ce qui est arrivé est la conséquence de l'aveuglement et de la haine qu'a engendrés la bipolarisation politique. Après le 14 janvier 2011, plus de 150 partis ont vu le jour et il était attendu que le partis politiques idéologiquement proches allaient se regrouper, peaufiner leurs programmes pour mieux aborder les échéances électorales. Le foisonnement des partis politiques compréhensible avec la liberté acquise ne peut être justifié trente mois après. Aujourd'hui, des formations politiques de gauche et certains partis destouriens ont pu se rassembler pour compter sur l'échiquier politique et on ne peut que s'en féliciter. En revanche, je reste sidéré par l'attitude de ma famille politique ; les sociodémocrates et progressistes ; qui par leur divisions nourrissent la bipolarisation. Je comprends que le choix de dissoudre leurs partis dans une large structure ne doit pas être facile, mais chaque étape a ses exigences et aujourd'hui il est impératif de s'unir pour construire un parti de gouvernement. Unis, vous pourrez constituer une force politique capable de défendre ses orientations et pourquoi pas de servir de locomotive du futur gouvernement. Alors Mesdames et Messieurs unissez-vous, défendez vos valeurs, croyez en votre projet. Unissez-vous et surtout ne soyez pas les acteurs d'une dangereuse bipolarisation pour l'avenir du pays. La Tunisie n'a pas à être divisée entre religieux et laïques, entre modernistes et rétrogrades comme si la religion était une affaire d'habit et d'apparence ou que le modernisme se limite à une tenue et à un look.