Laârayedh mis à l'index par les partis du Front du salut national Avec la déclaration ambiguë faite, mercredi dernier, par Ali Laârayedh qui n'a pas annoncé l'engagement de son gouvernement à démissionner dans les trois prochaines semaines, le Dialogue national s'est retrouvé dans un véritable bourbier, pour ne pas dire dans l'impasse totale. Les représentants du Front du salut national, mécontents des propos télévisés de Laârayedh et méfiants quant à ses véritables intentions, exigent qu'il signe un engagement écrit dans lequel il dit que son gouvernement partira dans les délais prévus par la feuille de route du Quartet, parrain du dialogue national. Au cas où le document en question ne serait pas arraché à Laârayedh, les frontistes boycotteront le démarrage, aujourd'hui, du Dialogue national comme l'a annoncé, mercredi soir, Hassine Abbassi, secrétaire général de l'Ugtt. Ce dernier s'employait, hier, à obtenir le sésame tant attendu auprès du chef du gouvernement. Seulement et comme à l'accoutumée, Ennahdha s'est invitée, hier matin, au débat par la voix de son secrétaire général, Hamadi Jebali, qui s'est réveillé de son long sommeil pour monter au créneau et élever la barre des enchères. Jebali qui a accordé une interview à Radio Shems FM, a dit : «Nous, aussi, nous demandons un engagement écrit de la part du Front de ne pas torpiller le dialogue à n'importe quel moment. Nous voulons également que les constituants dissidents signent un engagement selon lequel ils reviendront à l'hémicycle du Bardo, sans aucune condition». Le secrétaire général revenant d'Ennahdha va encore plus loin pour déclarer : «A l'engagement écrit de Laârayedh devra répondre un engagement écrit de la part du Front». En plus clair, Ennahdha vient de lancer la bataille des engagements mutuels et menace toujours par le biais de Hamadi Jebali : «Au cas où l'une des parties se retirerait, l'autre partie en face fera de même». Pour boucler ses nouvelles conditions, Jebali lance un clin d'œil au Quartet parrain du dialogue et se demande : «Pourquoi voulez-vous que le Quartet se présente comme le garant de la participation du Front au Dialogue. La Troïka veut aussi que le Quartet soit son garant». Des mots croisés difficiles à déchiffrer Lazhar Akremi, porte-parole de Nida Tounès, l'une des composantes essentielles du Front du salut national, est convaincu «que ces nouvelles manœuvres et conditions auxquelles recourt Ennahdha montrent qu'il n'existe pas de confiance entre les participants au Dialogue national». «Dès le départ, ils nous ont laissé comprende qu'ils n'étaient pas convaincus de l'utilité de ce dialogue. Ils veulent conserver le pouvoir le plus longtemps possible et ils cherchent à prouver, par tous les moyens, que leur passage à la tête de l'Etat n'a pas été un échec cuisant comme le reconnaît la majorité écrasante des Tunisiens. Aujourd'hui, Hamadi Jebali nous propose un jeu de mots croisés impossibles à déchiffrer», fait-t-il remarquer. Pour conclure, le porte-parole de Nida Tounès précise : «Aujourd'hui, les conditions entourant le Dialogue national et le discours double d'Ennahdha ainsi que ses conditions surprenantes nous rendent à l'évidence : Il n'y rien à attendre de ce Dialogue si jamais il aurait lieu. C'est clair, Ennahdha n'est pas convaincue de la nécessité de passer de la légitimité électorale à la légitimité consensuelle». Le Front suspend sa participation Quant au Front du salut national, il a décidé, hier soir, à l'issue d'une réunion des secrétaires généraux des partis qui le composent, de suspendre sa participation au Dialogue national. «Nous estimons, déclare à La Presse Abderrazak Hammami, secrétaire général du Parti du travail patriotique démocratique, qu'il n'y a pas en face de nous un partenaire sérieux, crédible et respectueux de ses engagements. Il est désolant de constater que l'engagement signé par Ghannouchi devant tout le monde et sous les projecteurs des télés est carrément renié par Ali Laârayedh, également, sur le petit écran». «La décision, poursuit-il, a été prise à l'unanimité, avec l'accord également des constituants dissidents qui refusent les conditions posées par le revenant de loin Hamadi Jebali. Toutefois, nous insistons pour indiquer que notre unique revendication se résume en deux mots : qu'Ennahdha respecte la signature de son président». Et Laârayedh de se réinviter, hier soir, à la TV ntionale pour reprendre pratiquement le même discours qu'il a tenu, mercredi soir. Il a, en effet, souligné : «En tant que chef du gouvernement, j'assume la responsabilité de ne jamais livrer le pays à l'inconnu en ce moment où nous menons une vraie bataille contre le terrorisme». Laârayedh ajoute : «Pour moi, la feuille de route est claire. Les trois processus qu'elle prévoit sont interdépendants. Le gouvernement ne démissionnera qu'après la mise en œuvre de ces trois processus. La feuille de route doit être appliquée dans toutes ses étapes. Au cas où cela se ferait au bout de trois semaines, mon gouvernement pliera bagage». En définitive, le double jeu ne fait que persister.