Pelouses impraticables, stades manquant des conditions les plus élémentaires de sécurité, inflation et statistiques alarmantes : notre football va vers sa perte. C'est un véritable miracle si chaque journée du championnat ne ramène pas son lot de grands blessés. Mais il ne faut pas non plus se fier aux apparences car, jamais il n'y a eu autant de blessés dans notre football. Certains graves comme l'Etoilé Wael Belakhal qui fait son second ligaments croisés et ne fera probablement son retour que la saison prochaine. Une perte sèche pour l'Etoile et pour le joueur, une angoissante attente avec l'opération, la rééducation et les craintes de la reprise. Le responsable de tout cela ? Les terrains qui n'autorisent et n'assurent plus rien. Ni le spectacle ni les schémas tactiques et encore moins la sécurité des joueurs. Aujourd'hui, ces mêmes joueurs évoluent à 50 pour cent de leurs capacités techniques, sinon moins. Beaucoup moins. Le simple contrôle d'une balle devient compliqué et le dribble parfois impossible. Ceci sans parler des schémas tactiques qui sautent pour cause d'impraticabilité du terrain. Entraîneurs et joueurs peuvent vous le confirmer... Puis, il n'y a pas que le week-end. En semaine, tous nos clubs triment pour trouver un terrain d'entraînement et le Club Sfaxien est obligé de monter à Tunis pour disputer les rencontres. Un blasphème et une perte sèche de temps, d'énergie et d'argent qui vient s'ajouter à celle de la limitation du nombre de spectateurs pour cause d'installations qui n'obéissent à aucun critère de sécurité. La responsabilité de qui? Des municipalités en tout premier lieu, mais aussi de la manière dont les marchés de nos stades et de nos installations sportives ont été accordés. Si nous étions aujourd'hui responsables d'un club dont le joueur est gravement blessé pour cause d'état du terrain et de son non-entretien, nous n'hésiterions pas à faire un procès et à demander des dommages et intérêts. Le professionnalisme, c'est aussi cela et à chacun d'assumer ses propres responsabilités. Quitte à ce que les municipalités s'adressent à leur tour à la justice pour qu'on sache enfin qui a construit quoi, qui a accordé les marchés et qui a fermé les yeux sur les dépassements de tous genres ? Les dossiers sont bel et bien là, on ne voit rien venir et l'on espère que cette fameuse justice transitionnelle se penchera sérieusement sur le problème et fera jaillir la vérité. A défaut, quelqu'un finira un jour ou l'autre le livre... noir de notre sport. «La perle de la Méditerranée» de Radès, la piscine et sa salle couverte sont un véritable scandale, le Zouiten, la piscine du Belvédère, les stades de Sfax, de Sousse, de Bizerte et d'ailleurs n'obéissent à aucune règle de sécurité et de fiabilité. En attendant, les municipalités ne sont même pas capables de lever les ordures. Alors, dans ce cas, le football peut encore attendre. Statistiques affligeantes Il est fort à parier que cette saison battra tous les records de médiocrité du football tunisien. Unique éclaircie dans la grisaille, le titre africain remporté par le CSS qui n'est que l'arbre qui cache la forêt. Cela a commencé avec l'équipe nationale et notre compétition nationale suit la tendance négative. Les statistiques ne trompent pas. Leader, l'Espérance est à une moyenne d'à peine 1,55 but par match. Pis encore, le Club Africain en est à un seul but par rencontre et l'ASM, pourtant invaincu, même pas un but par match. Ne parlons pas de l'OB et du Stade Tunisien (4 buts), de Grombalia (5) ou encore l'USM (7). Jetez un coup d'œil sur tous les championnats étrangers (tous continents confondus) et vous constaterez que le championnat tunisien est, de loin, le plus faible de tous. Dans tout cela, nous avons des présidents qui dépensent des milliards, des joueurs qui gagnent des dizaines et des dizaines de millions par an et des entraîneurs qui exigent le montant des salaires de cinq ministres. Un vent de folie qui ne trouve aucune confirmation sur les carrés verts (enfin si on peut appeler ça comme ça!) et qui devrait prêter à une très sérieuse réflexion. Qui peut lancer la réflexion à défaut d'une Ligue efficace et responsable? La fédération, bien sûr. Mais celle-ci est occupée à faire autre chose, à se maintenir en place, à faire courbette aux grands clubs, à se disputer avec le ministre et à s'apprêter à refaire le scénario du choix du sélectionneur national. Elle est non seulement la première responsable de cet état des lieux catastrophique, mais aussi et surtout coupable d'encourager les clubs à suivre cette politique suicidaire en fermant les yeux sur les dépassements de tous genres : financiers, sportifs et disciplinaires. Faisons un pari : ce qui reste de mandat au bureau fédéral (soit 2 années) sera encore plus dramatique pour notre football et nos clubs. Bien fait pour ces derniers qui ont élu et maintenu leurs propres... tortionnaires!