Les députés exigent des copies des contrats conclus depuis l'indépendance, notamment dans les domaines de l'exploration et de l'extraction du pétrole Les constituants ont revendiqué, hier, une copie de tous les contrats conclus ainsi que les permis accordés dans le domaine de l'énergie, depuis l'indépendance jusqu'à ce jour. Au cours d'un débat en séance plénière avec le ministre de l'Industrie, de l'Energie et des Mines, Kamel Bennaceur, organisée hier après-midi, les députés ont mis l'accent sur l'intérêt pour la commission de l'énergie relevant de l'ANC de pouvoir examiner l'ensemble de ces contrats en se référant aux codes des hydrocarbures et des mines et à l'avis des experts dans ce domaine. Le constituant Ali Houiji a appelé à dévoiler toutes les niches de corruption relatives aux permis de prospection de pétrole accordés, d'autant que l'opinion publique pense que la majorité de ces contrats se caractérisent par le flou et l'opacité. De son côté, Nizar Kassem s'est interrogé sur la possibilité d'existence de gaz naturel dans les eaux territoriales tunisiennes, d'autant que tous les pays méditerranéens ont confirmé l'existence d'importantes quantités de gaz dans le bassin de la Méditerranée et y ont effectué des opérations d'extraction, citant l'exemple du Liban. Aymen Zouaghi a dénoncé le fait d'accorder, rapidement, le permis « Zaafrane » (sud tunisien) à l'une des entreprises hollandaises spécialisées dans l'extraction de pétrole. Le permis a été accordé au siège de l'ambassade du royaume des Pays-Bas avant même l'approbation de la Constitution, a-t-il indiqué. L'article 13 de la Constitution rend obligatoire l'approbation préalable par la Constituante, pour tout permis accordé dans le domaine de l'énergie. Il a appelé également à la nécessité de réviser le prix du sel brut, lequel est resté inchangé depuis la colonisation, d'autant que la loi régissant cette opération date du régime beylical. L'élu Mohamed Salah Chairat a contesté la décision du gouvernement tunisien d'autoriser l'extraction de pétrole d'El Borma en utilisant l'eau, ce qui constitue, a-t-il estimé, « une surexploitation des ressources hydriques sans tenir compte des besoins des générations futures». Nooman Fehri a appelé à l'organisation d'une journée d'étude au profit des constituants sur les méthodes d'octroi des permis de prospection et d'extraction ainsi que sur les lois qui régissent le secteur. L'objectif recherché, a-t-il dit, est de permettre aux élus du peuple de maîtriser les techniques leur permettant de prendre les décisions relatives à l'octroi de nouveaux permis énergétiques. Zohra Smida a, pour sa part, appelé à assurer la sécurité du bassin minier de Gafsa pour éviter les dégâts causés par les protestations ou les sit-in. Phosphate : la régression « Près de 27.000 emplois directs seront perdus, en 2014, en cas d'arrêt des activités du secteur des phosphates à cause des protestations », a déclaré Kamel Bennaceur, ministre de l'Industrie, de l'Energie et des Mines. Le ministre a indiqué que les quantités de phosphate extraites, au cours des deux premiers mois de 2014, ne permettront pas d'atteindre les prévisions pour l'année en cours (5,5 millions tonnes). Il a précisé que l'arrêt de la production du Bassin minier de Gafsa pendant 10 jours paralysera l'activité des unités de production du Groupement Chimique Tunisien (GCT), ainsi que l'exportation et causera une régression des recettes financières du pays. Le ministre a, par ailleurs, souligné que les réserves stratégiques du GCT estimées, en 2010, à 7 millions de tonnes, ont reculé pour atteindre actuellement deux millions de tonnes, à cause de leur utilisation (réserves) pour couvrir la baisse de la production de phosphates. Pour la Tunisie, l'arrêt de la production a causé des pertes de 3000 millions de dinars, au cours des trois dernières années (2011/2013), a-t-il fait savoir, ajoutant qu'au niveau international, l'image du pays a été ternie et ses parts de marché sont passées de 4,5% à 3,2%. En 2010, la Tunisie a exporté 8 millions de tonnes de phosphates, contre 3 millions de tonnes, en 2013, a affirmé le ministre. Gaz : des mégaprojets en arrêt Dans le même cadre, il a fait savoir que plusieurs mégaprojets énergétiques sont à l'arrêt à cause des sit-in et des protestations. Il a appelé à cette occasion les constituants et les citoyens à appuyer la réalisation de ces projets pour répondre aux besoins en énergie et créer des emplois. Et d'ajouter que les travaux de réalisation du projet de pipeline gazier Djerba/Zarzis (gouvernorat de Médenine) ayant atteint 95%, sont à l'arrêt à cause des revendications des citoyens. La même situation est observée au niveau du projet visant l'approvisionnement en gaz du bassin minier et de Gafsa (taux de réalisation 87%), a-t-il encore déclaré. Bennaceur a présenté des données sur la production de pétrole et de gaz et la subvention des hydrocarbures, ainsi que la stratégie de son département visant à circonscrire le déficit budgétaire, au cours des prochaines années. La Tunisie qui produit 60 mille barils de pétrole par jour, contre 77.000 barils, au cours de l'année 2010, dispose de réserves pétrolières ne couvrant que les 18 prochaines années, a-t-il encore précisé. Au cours de l'année 2014, le déficit énergétique a atteint 3 millions de tonnes équivalent pétrole (TEP), ce qui a causé une hausse de la subvention (subvention directe de 2500 millions de dinars inscrites dans le cadre du budget 2014). Prospection, faible taux de réussite Le taux de réussite des opérations de prospection en Tunisie oscille entre 10 et 18%, alors qu'il est de l'ordre de 80% en Arabie Saoudite. Bennaceur a précisé que pour chaque 100 barils extraits dans le cadre des contrats d'exploitation, la part de la Tunisie est estimée à environ 79 barils de pétrole Brut, un des taux les plus élevés au niveau mondial, selon ses dires. Actuellement, le ministère de l'Industrie œuvre à achever, d'ici la fin du mois de juin 2014, la levée de la subvention dans le secteur du ciment et la libéralisation des prix de vente de ce produit aux consommateurs. Selon les estimations du ministre, la levée de la subvention dans le secteur du ciment (230 millions de dinars ) causera une hausse de 2% du coût de la construction en Tunisie. L'élu Abdrrazek Khallouli a pour sa part estimé que les chiffres présentés par le ministère ne sont pas actualisés, appelant à auditer davantage les données sur le secteur de l'énergie et à sanctionner les corrompus. Les constituants Azad Badi, Romdhane Doghmani et Hicheme Ben Jamaâ ont évoqué la question de la corruption dans le secteur de l'énergie. Saâd Bouîch a, pour sa part, évoqué la question de la non-participation des responsables de la région de Tataouine dans le projet de concession « Nawara » pour la production du gaz naturel.