La plupart des périmètres irrigués ont déjà fait leur temps, leur remplacement est nécessaire dans des zones encore en friche. Pour l'eau, il faudrait projeter la construction de nouveaux barrages Semi-aride dans sa majeure partie, la Tunisie demeure néanmoins un pays à vocation agricole par excellence. Variée, l'agriculture tunisienne embrasse plusieurs domaines, allant de la céréaliculture à l'arboriculture, au maraîchage, à la pisciculture, à l'aviculture, en passant par l'élevage, la pêche, etc. Passée pour être l'une des plus développées de la rive sud de la Méditerranée avec celle du Maroc, l'agriculture dans notre pays occupe une place de choix dans l'économie, en dépit des aléas qui l'ont freinée dans son élan en raison d'une politique tatillonne ou carrément à côté de la plaque. Elle assure une grande part de notre autosuffisance alimentaire (fruits, légumes, viande blanche, agrumes, huile d'olive...). Là où il y a déficit, c'est au niveau des céréales, de la viande rouge et du lait, mais cela, par année de mauvaise pluviométrie. C'est aussi une agriculture orientée vers l'exportation. Elle génère des rentrées conséquentes en devises grâce à l'exportation de l'huile d'olive, des dattes, des agrumes, des produits de la mer et des primeurs. Au cours des dernières décennies, et plus exactement depuis le milieu des années 1970, elle est en constante modernisation grâce aux efforts entrepris par les agriculteurs eux-mêmes avec l'adoption de nouvelles techniques en matière d'exploitation (mécanisation, utilisation des fertilisants et des semences à haut rendement). Grâce aussi à une prise de conscience certaine des pouvoirs publics de la place importante de cette activité dans l'économie du pays, et en matière de création d'emplois. La construction de plusieurs barrages, notamment dans le cadre du projet des eaux du Nord (Sidi Salem, Sidi Al Barrak, Barbara, Oued Siliana), qu'il faudrait ajouter à ceux de Béni M'tir et Oued Mellègue. La construction aussi de bassins collinaires partout où il y a possibilité de faire des réserves d'eau pour favoriser l'irrigation et la création de périmètres irrigués. Mais la plupart de ces périmètres datent du début des années 1980. Ceux de Medjaz el Bab, Testour, Boussalem, qui s'étendent sur des dizaines de milliers d'hectares sont, aujourd'hui, à bout de souffle. Ceux de Laroussa, Goubellat, Chott Meriem, Borj El Amri, Sidi Bouzid ont, eux aussi, fait leur temps ou sur le point de l'être. Cela n'a rien d'exceptionnel, dans la mesure où les périmètres irrigués ont une durée de vie qui ne peut aller au-delà de deux décennies, avec toujours une alternance des cultures : maraîchage, fourrage, céréales, jachère pour une année, avant de revenir à une culture maraîchère qui n'épuise pas trop le sol, etc. L'irrigation en elle-même comporte l'épuisement de la terre qui devient ainsi lessivée, avec un degré de salinité plus élevé que la normale, sans compter les effets négatifs de l'usage des engrais chimiques, des défoliants et autres fongicides. Terres lessivées! Ainsi, et pour maintenir la production à un niveau tel qu'il puisse répondre aux besoins alimentaires du pays et satisfaire aux commandes à l'exportation, l'extension des périmètres irrigués à d'autres zones encore en friche devient un impératif. Certes, il y a des plans pour cela au sein du ministère de l'Agriculture et on a souvent entendu parler de la création de nouveaux périmètres irrigués pour remplacer ceux déjà éprouvés par des décennies d'exploitation intensive, mais le constat nous permet d'affirmer que c'est trop peu, et il y a du retard dans la mise en place du matériel nécessaire (conduites d'eaux, vannes, etc.) pour que ces zones deviennent exploitables. Il est vrai que ce matériel demande des investissements importants que l'Etat, compte tenu de la situation économique qui prévaut dans le pays, est peut-être incapable d'assurer, mais quand il y va de la sécurité alimentaire du Tunisien, toutes les voies doivent être prospectées pour trouver les moyens à même de permettre la réalisation des projets déjà planifiés. Par ailleurs, l'extension des périmètres déjà existants devra aller au-delà des zones proches des rivières et des barrages pour toucher davantage de terres d'une part, et pour que ces dernières, outre les cultures maraîchères qui seront cultivées, puissent aussi permettre de résorber une partie du déficit céréalier grâce à l'irrigation d'appoint qui permet de hauts rendements. Plusieurs plaines du Nord, du Nord-Ouest du pays comme du Centre peuvent être ainsi mises en valeur, et participer activement à l'essor économique du pays. A cela, il faudrait ajouter la durée de vie des barrages en Tunisie qui est très limitée par rapport à ceux d'Europe par exemple, et ce, en raison de l'accumulation dans les bassins-réservoirs du lœss et autres matériaux charriés par les rivières, notamment en périodes de crue. C'est d'ailleurs le propre des barrages de toute l'Afrique du Nord et ce n'est nullement spécifique à la Tunisie. On se doit de prévoir la construction d'autres barrages, là où ceux déjà avancés dans l'âge, pour assurer, en quelque sorte, la relève. Le cas du barrage de Sidi Salem, construit au tout début des années 1980, mérite d'être profondément creusé pour lui trouver la réplique d'ici dix à vingt ans. Déjà les prémices de ses limites sont apparues depuis au moins cinq ans avec les crues à répétition qui dévastent sa vallée et qui causent d'énormes dégâts aux riverains. Des solutions de rechange doivent figurer dans les plans de développement des régions pour que l'infrastructure à ce niveau soit rénovée et renforcée, avec toujours cette finalité d'avoir assez de réserves en eau pour que notre agriculture ne s'en ressente pas et pour qu'elle prenne une autre dimension à même d'assurer aux générations à venir les moyens de leur sécurité alimentaire.