Une manifestation démonstration ? Une manifestation témoin ? Une manifestation prestige? Une manifestation animation ? «50 heures de musique» est beaucoup tout cela. Pendant deux jours, Dar Sébastien — dans la salle de représentations, sur la véranda comme au bord de la piscine — et le théâtre de plein air du Centre culturel international de Hammamet ont connu une activité diversifiée et très dense allant du concours à la performance, du concert instrumental au récital de chant, du jazz à la symphonie, du théâtre musical arabe à l'intermezzo. Bref, plusieurs genres de musique qui jurent avec la variété orientale dominante et qui se caractérisent par la recherche, la qualité et l'aspiration à l'universel. D'ailleurs, le programme proposé les 26 et 27 juin dernier constitue, dans l'esprit de ses concepteurs, une sorte de couronnement — ou de synthèse — des stages et des cycles de formation organisés en 2009 et 2010 par l'Unité de gestion par objectifs de la Cité de la culture, dans le but de perfectionner les aptitudes de jeunes artistes et créateurs porteurs de projets et de promouvoir des spécialités artistiques majeures quelque peu délaissées ou carrément manquant d'encadreurs, ce qui a nécessité le recours à des compétences étrangères. De vraies découvertes C'est ainsi que le concours des jeunes voix d'opéra nous a, par exemple, réservé de très agréables surprises, avec l'émergence d'au moins une dizaine de talents réels sur les 23 candidat(e)s présents, dont nous citons surtout l'époustouflante Hend Ben Chaâbane, Yosra Zekri et Haïthem Hdhiri, les trois lauréats. C'est d'ailleurs aux deux derniers que Rachid Koubâa, directeur de l'Ensemble Orchestral de Tunisie, a fait appel pour camper respectivement la servante et le patron, dans la «Serva padrona», l'intermezzo de Giovanni Battista Pergolese, présenté en milieu de soirée le 26 juin, dans la grande salle de la villa Sébastien. Un pur bonheur, certes par la fraîcheur de l'œuvre, mais également et surtout par la rigueur de l'exécution instrumentale et la virtuosité de la soprano et du baryton. Koubâa a fait du beau travail, son groupe aussi. Mais ils n'étaient pas les seuls... Bien sûr, nous évoquerons «Nafass», la performance de Alya Sallami et l'ensemble vocal «Aloès», «Kif eddenya (comme le monde), le spectacle musical de Mohamed Ali Kammoun, Quintet, où il a introduit, pour l'occasion, une pièce intitulée «Une prière anonyme à Al Qods», «Zeriab», la pièce musicale de Khaled Slama où Rihab Sghaïer, accompagnée de la belle voix de Imed Messaoud, a étalé toute sa technique et son talent, confirmant le bien qu'on pense d'elle, mais nous mentionnerons particulièrement un moment plein de nostalgie et de qualité sublime, où nous avons retrouvé l'un des pionniers du jazz en Tunisie, à savoir Kamel Sallem, initiateur du groupe «Carthago». Près d'une heure durant, il nous a offert des airs envoûtants qui nous ont rappelé des jours lointains. Sallem, qui n'a rien perdu de sa maîtrise, a su garder les doigts légers, précis et décidés, amenant son clavier à fusionner avec ses désirs, sa volonté. Avec l'excellent Mohamed Hermassi au saxophone, il a décidément réussi son «coup». Sur la cinquantaine des programmes proposés que nous ne pouvions évidemment tous suivre, il y a lieu de citer les salons littéraires, le ballet, les deux expositions (peinture et sculpture), l'installation vidéo et les deux stages internationaux de prise de son et de conception de lumières. Une manifestation évènement qui annonce la qualité et la dimension «savante» de ce que sera l'action de la Cité de la culture, même si Mohamed Zinelabidine, directeur général de l'Unité de gestion par objectifs et responsable de ce mini-festival (mené à terme grâce à l'enthousisame d'une foule de jeunes diplômés et de stagiaires chapeautés par les seuls Hatem Derbal et Slaheddine Hifiène, comme professionnels confirmés), tient à préciser que la Cité de la culture n'exclura aucun secteur de création, tout en s'attachant à privilégier la qualité, l'innovation et l'ouverture dans l'enracinement.