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Les fonctions de l'art
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 15 - 08 - 2014


Par Mohamed KOUKA
Si l'œuvre d'art ne dérange pas, n'étonne pas, n'inquiète pas, à quoi sert-elle alors ? A seulement nous amuser ? Nous faire passer un agréable moment, sans conséquence ? Pas uniquement. Aussi loin que l'on remonte dans l'histoire de l'art et des théories esthétiques, la fonction essentielle de l'art, sa fonction ontologique est de nous révéler notre être essentiel. L'Etre dont il est question est ce qui se manifeste sous le voile des apparences sensibles. Dans l'art on fait l'expérience de la liberté.
L'artiste nous fait accéder bien souvent à une vérité en déformant les apparences mais en pratiquant la mimesis qui, depuis le recentrement de la notion par Aristote, n'est pas pure copie ; elle est création car transposition en figures de la réalité. D'autre part, la représentation n'a pas à viser le réalisme. Elle se fonde non sur le réel (ce qui a effectivement eu lieu), mais sur le possible, ce qui pourrait avoir lieu selon Aristote, et de souligner la différence entre fiction et histoire : « La différence est que l'un dit ce qui a eu lieu, l'autre ce qui pourrait avoir lieu. C'est pour cette raison que la poésie est plus philosophique et plus noble que l'histoire : la poésie traite plutôt du général, la chronique du particulier ».
La chronique (l'histoire) s'en tient aux faits tels qu'ils se sont passés. En ce sens, elle est copie servile d'une histoire particulière, elle a, donc, très peu à nous apprendre sur le réel. Mais revenons à un exemple plus proche, plus immédiat, celui du feuilleton produit par la première chaîne nationale « Naouret Elhawa ». Il y est question de trafic d'organes, ce qui n'a pas manqué d'interpeller quelques-uns, arguant que la question ne se pose même pas chez nous. Justement, c'est ici que le bât blesse et que l'art intervient, sa mission est d'anticiper et de prévenir à l'exemple de la tragédie grecque ou du drame shakespearien qui n'usent jamais de faits immédiats d'une représentation directe. La transposition et la distance sont un passage obligé. L'histoire rapporte que deux ans après la prise et la destruction de Milet (cité grecque du philosophe Thalès), par les Perses, le poète Phrynichos (contemporain d'Eschyle) avait fait représenter une pièce qui s'appelait justement «La prise de Milet» tirant des larmes des spectateurs. Il fut frappé d'une lourde amende et le détour devint la règle. L'art n'est pas non plus de l'ordre de la communication ni de l'information. Gilles Deleuze pense que l'œuvre d'art n'a rien à faire avec l'information, ni avec la communication. Informer c'est faire circuler un mot d'ordre. Quand on vous informe on vous dit ce que vous êtes censés devoir croire. Ce que nous sommes tenus de croire. L'œuvre d'art n'est pas un instrument de communication. En revanche, il y a une affinité fondamentale entre l'œuvre d'art et l'acte de résistance. Alors là, oui, souligne Deleuze, elle a quelque chose à faire avec l'information et la communication, à titre d'acte de résistance.
Pour revenir au scénario de « Naouret Elhawa », la fable s'inscrit dans le droit fil de la doctrine aristotélicienne. Selon Aristote, la tragédie doit être à la fois vraisemblable et scandaleuse, « le surgissement de violence au cœur des alliances, comme un meurtre ou un autre acte de ce genre accompli ou projeté par le frère contre le frère, par le fils contre le père, par la mère contre le fils ou le fils contre la mère, voilà ce qu'il faut chercher » ; en vue de l'épuration des émotions. Apparaît alors la notion paradoxale de catharsis liée intrinsèquement à celle de plaisir. La catharsis est en effet provoquée par des émotions généralement considérées comme pénibles, voire douloureuses. La tragédie «en représentant la pitié et la frayeur réalise une épuration de ce genre de sentiment ». Il vaut mieux s'émouvoir à la représentation du trafic d'organes et y prendre plaisir, mais en tant que spectateur face à la représentation, que d'avoir à subir ces actes scandaleux dans la vie réelle. L'effet cathartique de ce feuilleton est clair : prévenir, attirer l'attention car nul ne peut se croire immunisé contre le mal, contre les malheurs du monde. La première chaîne a eu le mérite de produire et de programmer ce feuilleton qui n'a pas manqué de se distinguer durant le mois de Ramadan.


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