Le dernier rapport du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux, consacré au mois de décembre, est inquiétant. Il fait état de 133 mouvements sociaux dans la plupart des régions et surtout un nombre élevé de suicides et de tentatives de suicide (26), avec une nouveauté de taille : les victimes sont principalement des enfants D'un mois à un autre, les mouvements sociaux en Tunisie augmentent. Le pays a du mal à trouver la paix sociale tant recherchée. Au regard des sociologues, les dossiers sociaux urgents n'ont pas, aujourd'hui encore, été réglés. Des dossiers qui, précise Abderrahmen Lehdhili, président du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux, ont conduit à la révolution du 14 janvier 2011 et à la chute de l'ancien régime. Abdessattar Sahbani, sociologue, a expliqué que les mouvements contestataires à caractère administratif occupent la tête du peloton des mouvements sociaux des ouvriers des chantiers. « Les contestations sociales représentent 80% de l'ensemble des mouvements enregistrés au cours du mois de décembre, alors que les suicides et tentatives de suicide ont représenté 20% ». Et d'ajouter, les mouvements sociaux ont concerné 20 gouvernorats où la palme d'or revient à Kairouan avec l'enregistrement d'un nombre alarmant de cas de suicide ainsi que par un nombre élevé de protestations sociales. « Nous avons un changement qualitatif en matière de suicide d'autant que le phénomène touche des enfants âgés entre 8 et 10 ans. Des cas qui lancent, désormais, un signal de désespoir et d'éclatement des institutions éducatives ainsi que d'incapacité des différentes structures sociales à contenir cette détresse et à diffuser des messages d'espoir aux enfants et aux jeunes », a expliqué le sociologue, Abdessattar Sahbani. 3.000 ouvriers âgés au chômage Les secteurs qui ont connu le plus de mouvements sociaux et de protestations, selon le rapport mensuel du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux, sont principalement la santé, l'éducation et les secteurs économique, environnemental, administratif et politique. A ce titre, le sociologue a fait savoir que les mouvements « anarchiques » et violents d'origine politique ont grimpé, au cours du mois de décembre, contre une baisse des mouvements spontanés, soulignant que ces contestations ont eu lieu, essentiellement, suite à l'annonce des résultats préliminaires de l'élection présidentielle, au 2ème tour ». Evoquant le mouvement des ouvriers des chantiers, le rapport souligne qu'il s'agit d'une véritable crise sociale qui place le gouvernement Mehdi Jomâa face à une responsabilité morale importante, vis-à-vis de quelque 3.000 personnes âgées. Des personnes âgées qui se sont trouvées subitement au chômage, renvoyées de leur travail, vu leur âge. Or, les responsables du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux précisent que ces personnes travaillaient dans des conditions illégales, sans contrat, sans aucune couverture sociale, ni déclaration, et aujourd'hui elles se retrouvent sans aucune source de revenu. Une grande crise, souligne Abderrahmen Lehdhili, à laquelle il faudrait absolument trouver une solution. Faut-il rappeler que le ministère du Développement a décidé de suspendre les salaires de quelque 9.500 ouvriers de chantiers, ce qui a généré une grande crise et un grand mouvement de protestations. Désormais, quatre ans après la révolution, les citoyens dans certaines régions continuent à éprouver le mécontentement et la déception face à une classe politique qui a été en deçà de leurs aspirations. Avec 133 mouvements sociaux et 26 cas de suicide et de tentatives de suicide, il y a de quoi s'alarmer. En tous les cas, eu égard au rapport du mois de décembre 2014, publié par le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux, la paix sociale n'est pas pour demain. Et le prochain gouvernement que Habib Essid devrait former aura du pain sur la planche, pour régler les dossiers sociaux urgents, afin de rétablir cette paix sociale, recherchée depuis des décennies.