Loin des plateaux télévisés et des débats politiques le plus souvent houleux, la nébuleuse terroriste a été, cette fois-ci, publiquement dénoncée à travers une marche pacifique qui a eu lieu, hier, à l'avenue Bourguiba, au cœur de la capitale. La mobilisation fut massive contre ce phénomène qui sévit partout, dans nos villes et sur nos frontières, dans l'impunité totale Répondant à l'appel de Nida Tounes, parti aux commandes de l'Etat, venant de tous bords, ils étaient au rendez-vous. Côte à côte, politiques, société civile, jeunes et moins jeunes se sont, ensemble, dressés comme un seul homme face aux démons du mal et du sang, encore retranchés dans les reliefs massifs du nord-ouest tunisien. « Unis contre le terrorisme », ainsi scandait une foule dense attroupée sur le terre-plein de l'avenue, siège symbolique de toutes les revendications sociales et de ce fléau meurtrier qui n'a cessé, jusque-là, de viser le corps sécuritaire et déstabiliser la marche du pays vers le développement et la démocratie. Une transition qui ne saurait se réaliser sans gagner la bataille contre le terrorisme. Bien que prévue à 10h du matin, tout près de la statue d'Ibn Khadoun à la place de l'Indépendance, la marche n'a pas commencé à l'heure. Mais, la foule y était, brandissant drapeaux et bannières du parti organisateur. Au même moment, des bruits et du cafouillage tentaient de perturber l'ambiance générale. Des voix discordantes fusaient de partout. Et des déclarations fracassantes, des uns et des autres, à n'en plus finir. La marche, qui n'a duré qu'une heure ou presque, avait, en fait, perdu son itinéraire initial, virant davantage vers une campagne propagandiste. Les manifestants, qui auraient dû évoluer en ligne droite compacte, se sont vu dispersés, divisés en groupuscules dont chacun avait sa propre lecture des faits. Beaucoup de temps était déjà passé sans que les rangs n'aient été resserrés. Faute d'encadrement et de mot d'ordre, et sans doute d'infiltrés qui voulaient faire échouer ce rassemblement populaire, la marche a failli être interrompue. Des cercles soi-disant de discussions ont été formés ici et là, comme des bulles d'eau bouillonnante, parlant d'instrumentalisation de la question de terrorisme. D'autres ont déploré la manière avec laquelle cette question est débattue. La confusion des idées et des thèses a débouché sur une cacophonie. La foule dispersée se réunit de nouveau, scandant, d'une seule voix, des slogans antiterrorisme et anti-intégrisme et d'autres revendiquant le développement des zones frontalières, reconnues comme rempart de la patrie. La marche a occupé le milieu de l'avenue, déclarée, depuis le matin, fermée à la circulation, mais l'ambiance n'encourageait pas à aller jusqu'au bout du chemin. Toutefois, la guerre contre l'hydre terroriste ne doit laisser personne indifférent. Une mobilisation citoyenne est nécessaire et salutaire. Abdelkarim Harouni, dirigeant nahdhaoui, a insisté sur la nécessité d'accélérer, autant que possible, l'examen du projet de loi antiterroriste. Une demande jusqu'alors, non satisfaite, malgré l'appel incessant des forces de l'ordre. Harouni a mis également l'accent sur l'union du peuple et sa cohésion autour de son appareil sécuritaire. Adel El Elmi persona non grata Hier, Ennahdha et Nida Tounès étaient sur la même longueur d'ondes et ont agi en commun pour défendre cette cause devenue planétaire. Car, ce combat n'a plus de religion, ni de frontières. Tout le monde doit y participer. Les Tunisiens en sont conscients. Mais, la marche d'hier n'a, malheureusement, pas donné le bon exemple et a failli mal tourner à cause de la présence de Adel El Elmi, figure controversée, qui a été catégoriquement rejetée. Surtout lorsque le fameux mot « dégage » lui a été lâché à la face. Et l'ambiance avait, alors, dégénéré, sur fond d'insultes et de critiques virulentes. Soutien à l'action sécuritaire La marche a repris son cours. Les manifestants se sont précipités pour offrir des fleurs aux agents de la police qui étaient en train de quadriller et sécuriser les lieux. Un geste symbolique très suggestif. Une sorte de récompense, en guise de soutien à leurs efforts acharnés contre le terrorisme. Des gerbes de fleurs ont été déposées juste au pied du mémorial des martyrs de l'institution sécuritaire, dressé à côté du ministère de l'Intérieur. Hechmi Lahdhiri, membre du bureau exécutif de Nida Tounès, s'est félicité de pareille mobilisation populaire. D'après lui, seule l'union fait la force. La lutte antiterroriste, a-t-il ajouté, est une cause nationale à laquelle tout citoyen, là où il se trouve, doit adhérer inconditionnellement. C'est que, selon lui, le phénomène du terrorisme a changé de fief, pouvant élire domicile partout, notamment dans des cités populaires. Sinon comment expliquer la multiplication de leurs actions et les pertes considérables dans le rang des agents sécuritaires et militaires. Et de conclure que la confiance dans toutes les forces vives de la société est forte. Imed Belhaj Khlifa, porte-parole de l'Union nationale des syndicats des forces de sécurité, a livré une impression positive à l'égard de la mobilisation citoyenne contre le terrorisme. Il a lancé un appel à la classe politique d'unifier les rangs, afin d'être en mesure des défis sécuritaires. Loin des conflits et tiraillements politiciens qui ne font qu'aggraver la situation. La loi antiterroriste, une fois adoptée, pourrait servir d'arme efficace et de mécanisme de protection des sécuritaires qui sont au premier rang de la guerre contre le terrorisme.