Une confusion esthétique règne dans les 33 fresques urbaines ou miniatures contemporaines de l'artiste Aïcha Filali ne cessera jamais de titiller regards et perceptions du «réel», de mettre un peu de désordre dans toutes ces idées reçues établies et enracinées (esthétiques et sociales), dans cette doxa plus que jamais imperméable. Son intérêt se porte sur l'agora qu'elle a décidé de re-présenter dans son actuelle exposition personnelle «ana/chronique» abritée par la galerie A.Gorgi. Un amalgame temporel, spatial et esthétique s'y joue entre figures du passé et d'aujourd'hui. Au début, fut la miniature sur laquelle viennent s'ajouter, à la même échelle, des bribes de scènes du quotidien tunisien de l'actualité ou des habitudes et autres tendances sociales. Sorte de palimpsestes dans lesquels une esthétique de l'enluminure, de scène figurée, de compositions décoratives propres à l'art de la miniature (chez les Persans et puis les Arabes) se confondent avec notre présent national. Aïcha Filali croque, à la manière d'un bédéiste, par photomontage (et autres techniques mixtes), un quotidien, un commun social, fait se confronter mythologies anciennes et mythes urbains. Nous met en scène et se met en scène. Dans ce magma temporel on découvre, à la manière de l'esthétique de la miniature, des textes à la calligraphie arabe et des lettrines qui décrivent en dialecte tunisien les scènes re-présentées. De l'Université de La Manouba (qui a connu de grandes perturbations), à l'Assemblée constituante, aux mariages, Hammam, festivals, Elections, au mont Chaâmbi, mosquées, tourisme, pollution et saleté ambiantes, scènes d'escapades amoureuses loin des regards dans les jardins publics et autres tendances sociales caricaturisées et parodiées par l'artiste qui semble dénoncer le «terrorisme» dans tous ses sens, se jouant de l'imagerie conçue et établie des amalgames et autres confusions soulignées par l'actualité. Il règne une confusion esthétique dans les 33 fresques urbaines ou miniatures contemporaines de Aïcha Filali, des figures et autres signes anachroniques se chevauchent et se clashent. L'exposition ana/chronique a fait l'objet d'une publication éditée par Sud Editions et sortie à l'occasion de la Foire internationale du livre de Tunis. A vivre absolument.