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L'impossible ménage à trois
Publié dans Leaders le 10 - 02 - 2012

La Tunisie au sortir de 23 ans de léthargie, gouvernée par des mafieux, avait impérativement besoin d'une classe politique capable de rassembler et réconcilier un peuple déboussolé par la haine de lui-même et de l'autre, d'avoir tant courbé l'échine, si longtemps. Finalement, le pays est aujourd'hui « gouverné » par une alliance, sous forme de ménage à trois. Chiffre 3 qui offre l'apparence de la stabilité et qui, au-delà de l'arithmétique toujours implacable, devait permettre d'éviter une bipolarisation de l'appareil politique. De la mythologie grecque des trois dieux qui se partagent le monde à celle chinoise des trois singes de la sagesse, le chiffre trois à toujours eu force de symbole, y compris dans notre religion. Mais dans le même temps, c'est le chiffre de l'instabilité, pour lequel il est démontré (théorie du chaos) que sous certaines conditions, il est
impossible de prévoir la trajectoire de trois corps en interaction.
Plus prosaïquement dans un ménage à trois, l'ombre du troisième plane toujours sur la relation des deux autres, contribuant à chaque occasion à réduire les degrés de liberté et à créer les conditions d'un comportement aléatoire et «chaotique». Aujourd'hui, ce qui aura sauté aux yeux, ce sont ces errements successifs de nos gouvernants, un peu comme si les uns et les autres s'étaient donné le mot, pour un scénario du pire. Car, il faut bien plus pour incarner le changement, redonner à la Tunisie son lustre d'antan, et porter sa voix sur la scène internationale.
Difficile donc pour un président, appuyé sur quelques milliers de voix aux élections, d'avoir la faculté de dire aux Tunisiens qui ils sont. Faudrait-il encore qu'il le sache lui-même. Car comment expliquer que M. Marzouki, ardent défenseur de la liberté et des droits de l'homme, s'emmêle dans les principes jusqu'à en oublier les plus fondamentaux. Beaucoup espéraient un président à la parole libre, face à un gouvernement fondamentaliste. Un président prêt à se battre contre toutes dérives idéologiques, et non un faire-valoir populiste, qui agace jusqu'à ses propres électeurs. Diplomatie n'est pas ingérence, et si la Tunisie n'a de leçons à recevoir de personne, elle n'a pas non plus à en donner. N'est pas Bourguiba qui veut. L'habit, on le sait, ne fait pas le moine, en particulier quand le costume est trop grand, surtout un burnous qui, soit dit en passant, est un habit d'origine amazighe, qui n'a jamais eu chez nous la symbolique qu'il a en Algérie, où c'est depuis longtemps un emblème national du pouvoir. La Tunisie a toujours prôné une certaine neutralité, et une diplomatie de la responsabilité et du droit, (y compris des peuples à disposer d'eux-mêmes), alors restons-en là, et de grâce Monsieur le président, un peu d'épaisseur, un peu de hauteur, le monde nous (vous) observe.
Pendant que M. Marzouki cherche à faire le grand écart entre Islam politique et démocratie, aspirant à convaincre qu'un parti religieux peut être la voie d'un système politique qui garantisse les droits fondamentaux du citoyen, ses alliés, eux, s'accordent difficilement sur les concepts d'Islam univoque et de démocratie plurielle, et vice-versa. Ettakatol se retrouve fourvoyé dans une alliance qui n'en est pas une (dixit M. Ben Jaafar), mais dans laquelle le parti est en train de perdre son âme. Ce qui est sûr, c'est qu'au fur et à mesure du temps, il sera difficile de justifier sa présence au gouvernement, surtout s'il faut, à chaque fois, en passer par les menaces pour se faire entendre. L'avenir nous dira si le parti se sera sacrifié pour la bonne cause, ou s'il se sera sabordé pour rien. Il faut dire que la coalition au sens d'Ennahdha risque d'être pour les partis alliés l'équivalent du système Madoff pour les spéculateurs :
une fuite en avant au bout de laquelle ils ne voient jamais les dividendes.En un mois, le chef du gouvernement aura montré toute l'étendue de sa palette. Dans un contexte de crise aiguë qui aurait nécessité une équipe resserrée et professionnelle, il optera pour un gouvernement pléthorique et amateur. Après s'être félicité d'avoir placé près de 50% de femmes à l'Assemblée, il n'en nommera pas (ou presque) au gouvernement. C'est vrai qu'un ministre doit faire un peu plus que lever la main au signal du chef. De manière plus profonde, la structure du gouvernement montre qu'Ennahdha n'a pas de modèles, de gouvernance, ni de processus de gestion et de décision nouveaux à proposer, différents de ceux de l'ancien régime. Le gouvernement fonctionnera de la même manière, avec le même organigramme et les mêmes prérogatives ministérielles. Ce n'est pas le changement d'idéologie, ni de têtes qui changera les résultats de la politique économique et sociale. La première réforme nécessaire est celle de l'Etat et de la gouvernance, pour plus de cohérence et d'efficacité. Autant de ministres et de secrétaires d'Etat, c'est des responsabilités diluées, et une efficacité perdue entre la décision et l'action.
Le gouvernement n'a pas de programme économique (il n'y a d'ailleurs pas de ministre de l'Economie au gouvernement), tout juste un objectif politique de réorientation culturelle de la société. Car comment expliquer autrement le fait qu'à ce jour et plus d'un mois après sa prise de fonction, le chef de l'exécutif n'ait toujours pas présenté son programme de gouvernement, alors même que c'est habituellement un préalable à son entrée en fonction. Il a promis ce programme pour février, je pressens toutefois que ce ne sera qu'une liste de mesures, sans vision ni stratégie, qui accompagnent et forment la cohérence d'un programme de développement (de sortie de crise), digne de ce nom. Le chef du gouvernement est aux abois, il a souhaité et obtenu les pleins pouvoirs, mais il ne sait qu'en faire. Le message divin n'arrive pas et le supposé messager s'est avéré être un banquier comme les autres. Le conservatisme c'est bien, ça fait gagner des voix, mais quand il s'agit de créer des emplois, c'est un peu court comme programme. Quand le Premier ministre va jusqu'à nommer les rédactions dans les médias, chose que même Ben Ali, n'avait jamais osé faire, il donne le ton. Lorsque le parti use de l'intimidation, des menaces, de la violence physique, jusqu'aux manifestations de soutien des mounachidine, c'est que le système mis en place va s'appuyer sur les recettes du passé, de confusion entre l'Etat et le parti, allant jusqu'à utiliser ses propres milices pour contenir les manifestants, accusés de vouloir la ruine du pays.
Après les médias, le mouvement va continuer et toucher l'ensemble de l'appareil de l'état. Le parti a besoin de mettre en place ses hommes (à défaut d'allégeance de ceux en place), c'est là sa priorité, le gouvernement devra s'y faire. Pour les chômeurs et les nécessiteux, la prière suffira bien. A moins que le gouvernement ne mette à exécution le projet d'Ennahdha d'actionner la planche à billets. Ce qui relancera l'inflation, entraînera dans la précarité bon nombre de salariés, qui verront leur pouvoir d'achat s'éroder et détruira ce qui reste de la compétitivité de nos entreprises, dont on espère pourtant qu'elles relancent l'emploi...Mais le parti n'en a que faire, ce qui l'intéresse c'est de disposer d'une cagnotte à distribuer, pour gagner du temps.En attendant, les hordes de l'occupant salafiste sèment la panique dans les universités et les villages dans l'indifférence totale., et les ministres clament des prévisions d'un enthousiasme qui n'a d'égal que leur désarroi, découvrant l'ampleur du gouffre et l'étroitesse des marges de manœuvre. Le soutien apporté dans l'affaire Nessma arrive bien tard et ne trompe personne, après qu'ils eurent surfé sur la vague conservatrice et ignorante qui a déferlé sur le pays à l'automne dernier. Et là se pose la question du rapport de force entre le gouvernement et le parti. Qui dirige ? Et qui rend compte à qui? Et si l'appel du chef de gouvernement à l'opposition n'était là que pour l'aider à tempérer les ardeurs d'un parti qu'il ne maîtrise plus? Cocasse non ?
Une chose est sûre, les Tunisiens n'accepteront plus jamais un retour en arrière, ils ont montré le 14 janvier dernier qu'ils défendront jusqu'au bout cette liberté chèrement acquise, contre toutes les attaques et les menaces. Et si d'aventure, il fallait arrêter tous les défenseurs de la liberté, alors que le gouvernement sache qu'il lui faudra construire des prisons tellement vastes que ce sont ceux de l'extérieur qui auront l'impression d'y être incarcérés.


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