Les regards restent fixés sur le Kram où se poursuit encore le 9ème congrès d'Ennahdha, dans l'attente de ce qu'il révèlera en motions et élections. Les trois jours initialement prévus – hors de la première journée cérémoniale – se sont avérés insuffisants aux 1103 congressistes pour trancher tous les débats. Devant clôturer dimanche ses travaux, le 9ème congrès du parti a dû se donner une journée supplémentaire, lundi. Des avancées ont été enregistrées pour l'adoption de certaines motions, mais des délais supplémentaires ont été exigés par d'autres commissions, d'autant plus que trois autres projets de motion ont été ajoutées. Un congrès national extraordinaire aura lieu dans deux ans. Selon le président du congrès Abdellatif Mekki, également ministre de la Santé, les congressistes ont validé l'option « centriste » et « modérée ». La motion politique adoptée « conforte les choix centristes et modérés, le bannissement de l'extrémisme », a-t-il ajouté, dimanche soir. De son côté, le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi a déclaré que le congrès a presque terminé ses travaux et que les résultats seront annoncés sous peu lors d'une grande fête ». Concernant la constitution en cours de rédaction par l'Assemblée nationale constituante (ANC), les délégués ont confirmé qu'Ennahda militera pour un régime parlementaire mais ils n'ont pas encore tranché s'il sera intégral ou laissera des prérogatives importantes au chef de l'Etat comme le réclament les partenaires des islamistes au gouvernement. « Nous avons opté pour un régime parlementaire. En fin de soirée dimanche, le congrès votera pour déterminer la nature de ce régime: soit un régime parlementaire pur, soit un régime remanié », a indiqué Mekki. Au départ, quatre grandes motions étaient soumises aux congressistes, portant sur la gouvernance et le fonctionnement des instances et structures ainsi que sa plateforme politique, économique et sociale. Les trois autres documents ajoutés concernent la culture et les Tunisiens à l'étranger. A huis clos, « les débats, rapportent sous l'anonymat un congressiste interrogé par Leaders, sont intenses, traduisant la diversité des points de vue, mais aussi des différences de générations et de visions d'avenir. La fusion recherchée n'est pas facile à se réaliser en si peu de temps, depuis la révolution. Nous venons d'horizons divers : de l'étranger comme de l'intérieur du pays, d'un large spectre quant la lecture de la situation et exploration des perspectives. » Ecartant les oppositions entre faucons et de colombes, pères fondateurs et jeunes loups, et autres clivages, les connaisseurs d'Ennahdha estiment qu'il s'agit en fait « de débats transversaux bien prévisibles et incontournables qui, d'ailleurs, peuvent se poursuivre au-delà du 9ème congrès et constituent un élément positif pour la mutation effective du parti ». «En laissant le temps faire son œuvre, souligne pour Leaders un analyste, la direction d'Ennahdha semble favoriser ainsi une indispensable maturation pour faire émerger une nouvelle ligne politique plus modérée, plus consensuelle, amorçant la conversion en grand parti à même de rassembler de larges franges des Tunisiens ». Dans les coulisses du congrès, les signes de difficiles gestations sont bien perceptibles. Ceux qui se répandent en apaisements, ici et là, redoublent d'efforts et de gestes. Des tensions sont difficiles à cacher, mais restent rapidement camouflées, sans échapper à la vigilance des médias. Restés sur leur faim, les journalistes à l'affût d'informations se sont rabattus sur les à-côtés, chassant le moindre fait. Une manifestation des familles de Tunisiens disparus en Italie leur a offert un bon sujet sur lequel ils se sont massivement rués au grand dam de certains jeunes du service de presse du congrès. Ils y ont vu une diversion par rapport aux travaux du congrès, craignant de voir la couverture de cette manifestation l'emporter sur le reste. Ne sachant pas comment s'y prendre en douceur en facilitant le travail des journalistes et leur en fournissant les explications nécessaires, ils se sont livrés à un blocage musclé des journalistes, générant des altercations très vives. Ces accrocs avec les médias a pris plus d'ampleur étant survenus suite à une série d'accrochages survenus ici et là dès le premier jour, surtout du fait de l'obstruction exercée par le service d'ordre et l'escorte de certains dirigeants et hôtes. L'atmosphère, déjà tendue, s'est envenimée, mais le chef de presse d'Ennahdha, Néjib Gharbi s'est déployé pour présenter les excuses officielles du parti, promettant de diligenter une enquête et de sanctionner les auteurs.
