A mi-mandat présidentiel, les grandes manœuvres s'annoncent et avec elles, les ambitions des uns et des autres pour la conquête du pouvoir. Françoise Giroud, grande journaliste et politiste française qui a fait les beaux jours de « l'Express » et qui a fait un passage éphémère au gouvernement français, a qualifié le pouvoir comme une « illusion » parce qu'on croit, en le détenant, transcender le soi-même et le monde et finalement il s'avère à la fin comme un des actes de passage de la vie humaine, sans plus ! Mais le pouvoir est loin d'être une illusion quand il est lié aux affaires, ce qui a fait dire à quelqu'un de mes amis à l'humour noir bien marqué : « Si tu veux t'enrichir prend le pouvoir... surtout dans les pays du tiers-monde »... mais, heureusement, que Bourguiba l'a démenti ! On apprend ça et là, la constitution de nouvelles alliances à l'horizon du type projet pour la Tunisie et l'ULP. Mais, qu'est-ce qui peut unir au niveau de la vocation politique, un intellectuel et de bonne expertise en l'occurrence M. Mohsen Marzouk et M. Slim Riahi, grand fortuné, homme d'affaires international et propulsé en politique par le vote (encore une fois utile) de milliers de supporters et de fans de l'équipe populaire prestigieuse tunisoise, le Club Africain, dont il a brigué la présidence apparemment bien conseillé par notre collègue Borhane Bessaïess et qui en a fait le 4ème parti de Tunisie devant le CPR, Afek Tounès, le Takattol et El Joumhouri, ce qui n'est pas rien ! L'argent combiné avec l'intelligentsia peut-il donner à la Tunisie le « Trump » qu'elle attend ! Le proche avenir dira s'il s'agit d'un ballon d'essai ou d'une alliance éphémère et finalement conflictuelle dès le départ parce qu'avec un leadership à deux têtes, chacune s'estimant destinée pour Carthage, et qui sait la Kasbah réunies. M. Riahi invité très spécial d' El Hiwar et flanqué de l'incomparable figure populaire de Mokhtar Tlili, certainement doué pour le football, a donné les signes d'un appétit à peine voilé pour la présidence à venir. Or, c'est bien lui qui possède le nerf de la guerre « (l'argent) et pas M. Mohsen Marzouk ! Alors, on verra bien qui des deux finira par lâcher... Et la politique dans tout cela ?... ça fait pas très beau, mais ce qui nous console c'est que depuis la Révolution il n'y a de « politique » que cela, alors, bonnet blanc ou blanc bonnet, n'attendons plus de miracles de cette classe politique tuméfiée. La Tunisie finira bien par survivre comme elle fait depuis 6 ans... Elle en a vu d'autres depuis 3000 ans ! Ce cadrage aurait pu, évidemment, être évité si Nida Tounès était en bonne santé. Malheureusement, là aussi on est plus proche de la rupture que de l'union tant souhaitée par l'électorat de décembre 2014. Alors où allons-nous ! Une bonne moitié du Nida (donc 1/3 du Nida initial après la désaffection du Projet pour la Tunisie), sous contrôle de M. Belhaj et certaines grosses pointures à l'image de M. Moncef Sellami, et l'autre bonne moitié du fameux tiers initial sous contrôle de M. Hafedh Caïed Essebsi, mais les deux sont mathématiquement incapables de briguer le pouvoir sans une alliance de taille. Or, où trouver ces « éléphants » volumineux en dehors d'Ennahdha, et l'UGTT ?! Ne soyez pas surpris quand j'assimile l'UGTT à un parti politique, c'est un fait incontournable et la centrale syndicale est de plus en plus assimilée à un parti travailliste bien déterminé à avoir « sa part d'Etat » et qui sait, plus ! Les syndicalistes de base type Gammoudi et Yaâkoubi font le terrain et la direction occupe l'espace politique. M. Abassi n'en finit pas de conquérir cet espace depuis bientôt quatre ans et plus et il demande avec une certaine fermeté au gouvernement de l'associer à la « fabrication » de la loi de finances 2018... Oui, je dis bien 2018 pour ceux qui croiraient qu'il ne s'agit que de 2017 ! Frottez-vous bien les yeux ! Qui peut, aujourd'hui, douter que l'UGTT a pesé de tout son poids sur cette loi de 2017 donnant un caractère « socialiste » très affirmé à l'action et à l'approche du gouvernement Chahed. Et Ennahdha, dans tout cela ! Pour ma part, j'estime qu'elle se présente aujourd'hui comme le seul parti libéral du pays. Seul handicap, pour elle, c'est encore une fois l'attachement au référentiel religieux islamiste « charaïque » prononcé. L'évolution sérieuse de Ennahdha vers le modèle CDU allemand de Mme Angela Merkel, lui donnera des ailes et fera d'elle le seul parti libéral économiquement du pays. Ce qui lui fera rallier tout le peuple des classes moyennes de la bourgeoisie nationale et les jeunes de la promotion économique qui souffrent de plus en plus du « plus d'Etat », imposé par l'UGTT au gouvernement. De plus en plus se dessine en Tunisie une lutte à distance entre deux modèles de société : Le libéralisme et le socialisme. L'un et porté par l'UGTT qui exige un plus d'Etat et se présente de plus en plus dans la peau d'un parti socialiste de fait. L'autre est porté par Ennahdha qui exige un moins d'Etat et de bureaucratie, et veut encourager l'initiative privée avec une fiscalité moins prétorienne et une plus grande ouverture à l'investissement et aux capitaux extérieurs. Les travaux de l'ARP confirment cette évolution et la loi de finances de 2017 n'a pas favorisé l'option libérale d'où le vote sur la levée du secret bancaire. Finalement, le gouvernement Chahed se trouve entre le marteau et l'enclume. Demander l'afflux des capitaux et des investisseurs et crier sur tous les toits que nous voulons que la Tunisie soit une place financière internationale, puis adopter des mesures de contrainte et de rigueur en la matière, n'est pas très catholique. Il va falloir beaucoup de doigté dans la pratique pour concilier l'inconciliable. Le capital est volatile dès qu'il y a excès de contraintes et de contrôle... c'est une règle universelle ! Peut-on espérer le juste milieu ! Wait and see ! J'y reviendrai ! K.G