Fatma Mseddi : « Le parti Ennahdha ne peut être, à la fois, juge et partie et présider une commission ayant pour mission d'examiner des questions dans lesquelles il est impliqué » On arrive, parfois, à se demander pourquoi les Tunisiens ont fait le déplacement pour choisir leurs élus, alors que ces derniers sont entrés dans un système vraiment douteux où tout le monde cherche à estomper ou, du moins, à taire la vérité, pour ne pas subir le courroux de ceux qui ont mainmise sur le pouvoir. Ce qui se passe, dans ce sens, au sein de la commission d'enquête sur les réseaux d'envoi de jeunes tunisiens dans les zones de conflit dépasse tout en entendement, ce qui a poussé une députée à exprimer son ras-le-bol. Manœuvre politique de Nidaa Tounès pour faire peur à Ennahdha ? Peut-être… mais, qu'à cela ne tienne, puisque les faits sont réels et que la députée n'a fait que montrer les défaillances. La députée Fatma Mseddi (mouvement Nidaa Tounès), c'est d'elle qu'il s'agit, a annoncé sa démission de la commission d'enquête sur les réseaux d'envoi des jeunes aux foyers de tension pour exprimer sa colère contre "le blocage délibéré des travaux de la commission qui ne s'est pas réunie depuis le démarrage de la dernière session parlementaire". C'est le comble, avec cette commission dont la présidence est entre les mains du mouvement Ennahdha qui est, selon les accusations du comité de défense des affaires des assassinats des martyrs Chokri Bélaïd et Mohamed Brahmi, accusé d'avoir un organisme secret qui a noyauté les structures sécuritaire. Lors d'un point de presse organisé à cet effet, mercredi, au parlement, Mseddi a indiqué que "la commission est appelée à présenter son rapport à peu près deux mois après le démarrage de la session parlementaire. En raison de la "politisation de son travail", la commission ne sera pas en mesure de parachever ses travaux et rédiger son rapport", a-t-elle expliqué. Pour la députée Fatma Mseddi, le mouvement Ennahdha s'emploie à entraver les activités de la commission et à continuer de faire obstruction à la vérité, prétextant que le parti est majoritaire au parlement et est donc en mesure de présider la commission d'enquête. Cela représente, en quelque sorte, un aveu de l'implication du mouvement islamiste dans ces méfaits. "Plusieurs auditions au sein de la commission ont très clairement révélé l'existence d'une relation entre certains dirigeants d'Ennahdha et ces réseaux", a-t-elle affirmé. Mseddi a, dans ce contexte, déclaré que "le parti Ennahdha ne peut être, à la fois, juge et partie et présider une commission ayant pour mission d'examiner des questions dans lesquelles il est impliqué, telle que l'envoi des jeunes aux foyers de tension". Et d'ajouter "de réelles tentatives sont entreprises par le parti pour étouffer la vérité, particulièrement après les révélations concernant l'appareil secret d'Ennahdha, qui a été déjà évoqué depuis 2017, lors des auditions de la commission". Héla Omrane, présidente de la commission à la précédente session, avait déclaré le 13 octobre 2018 que "la commission d'enquête va révéler lors de la dernière session parlementaire de nouvelles données relatives à ce dossier à travers la présentation d'un rapport final à partir de l'année prochaine". Elle a ajouté que la commission "va auditionner autant de parties que possible à la lumière des derniers développements liés aux informations divulguées par le comité de défense des martyrs Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi". Mais, depuis la mainmise d'Ennahdha sur cette commission, tous les projets sont renvoyés aux calendes grecques… Toutefois, rien ne presse. Le peuple tunisien a attendu des années, mais la vérité éclatera du jour au lendemain… par la volonté du président de la République, Béji Caïd Essebsi qui garde cette affaire comme monnaie d'échange.