En l'espace de presque 2 mois, le Coronavirus est en passe de bouleverser les meilleurs équilibres qui ont gouverné le monde depuis 1945. En Tunisie, comme ailleurs dans le monde, l'après pandémie ne sera sûrement pas identique à ce qui l'a précédé ! Evidemment, la nature humaine prendra le dessus et les mauvaises habitudes reprendront de plus belle. Cependant, des vraies opportunités nous seront aussi offertes pour aller de l'avant. « La pandémie est un fait total révélant que le système-monde se trouve désormais dans une situation de crise structurelle permanente », analyse l'historien Jérôme Baschet, dans une tribune parue au journal « Le Monde » le 1er avril 2020. L'historien français poursuit : « les historiens considèrent volontiers que le XXe siècle débute en 1914. Sans doute expliquera-t-on demain que le XXIe siècle a commencé en 2020, avec l'entrée en scène du Covid-19 ». Sans nous projeter à l'échelle du monde, chez nous déjà, la pandémie est en passe de bouleverser beaucoup de choses. Elle nous révèle autant des bonnes que de très mauvaises caractéristiques de notre société et de notre être individuel et communautaire. Au-delà de notre succès ou de notre échec dans cette bataille, il est sûr que des pans entiers de nos convictions et de nos stratégies est à revoir de fond en comble ! La santé en priorité nationale Nous avons été heureux tous de sentir, dès les premiers signes de la pandémie, la réactivité de notre système de santé. Nous savons tous que ce système, hérité de la vision moderniste du leader Habib Bourguiba dès les premières années de l'indépendance, est très affaiblit, qu'il a manqué longtemps des moyens et de volonté politique, mais il était quand même et il est encore, notre rempart solide contre le Coronavirus ! Le système de santé est également et au-delà de l'infrastructure, cette cohorte de médecins, de savants de très haut niveau, de cette armée de paramédicaux et d'infirmiers (et infermières) qui sont depuis plus d'un mois sur le pied de guerre et sur tous les fronts. Demain, il faudra leur rendre le vrai hommage, celui de hisser enfin la santé au niveau d'une priorité nationale sans tergiversations. Le manque d'équipements flagrant, la carte sanitaire qui laisse plus de la moitié du pays sans un CHU en dehors de gouvernorats côtiers, la numérisation urgente de la bureaucratie hospitalière, l'industrie des médicaments à booster, et plein d'autres chapitres, doivent avoir les moyens nécessaires pour se développer et par ricochet, développer le pays ! La numérisation, un chantier transversal Demain, à l'heure du bilan de la pandémie, nous saurons combien, nos ingénieurs et nos développeurs informatiques ont résolu de problème durant cette guerre asymétrique que nous menons. Nous savions déjà que notre siècle est le siècle de cette nouvelle révolution du savoir qui est en passe de changer le visage du monde et tous ces rouages. Il faut savoir que le ministère des Technologies de la Communication et de la Transition Numérique fait partie des premiers ministères à pied d'œuvre dans la lutte contre le coronavirus. La numérisation est un chantier transversal qui touche pratiquement à tout ! Du robot déployé par le Ministère de l'Intérieur, aux vieux paysans qui introduisent leur numéro de cartes d'identité à travers une application téléphonique pour pouvoir toucher l'aide de l'Etat, aux hautes instances de l'Etat qui utilisent la visioconférence et le télétravail, sans compter les banques, les différentes administrations, l'éducation, etc., tout est aujourd'hui affaire de numérisation. C'est le chantier d'avenir de notre nation si elle veut se hisser aux niveaux des pays le plus avancés, et nous avons les compétences pour le faire. La numérisation doit être menée à marche forcée et à tous les niveaux en commençant par notre bureaucratie crasseuse. Nous avons vu pendant ce mois de mars comment des pans entiers de nos veilles démarches administratives stupides sont de la perte du temps et de l'agent. La numérisation est également une vraie bouffée d'air pour le développement économique du pays. Elle peut générer des emplois et de la richesse sur tout le territoire. Des investissements énormes sont à mettre en œuvre pour ce but mais ces sont des investissements gagnants à tous les coups ! La jeunesse, notre meilleur capital Notre jeunesse, souvent oubliée en dehors des rares « happening » électoraux ou des discours convenus, a été aux premières loges durant ce mois de lutte contre le coronavirus ! Des volontaires par centaines dans tous les domaines, de l'ingéniosité à gogo dans le domaine informatique, de l'empathie naturelle et non feinte envers les autres confinés. Nous les croyons insensibles aux malheurs de la nation, occupés à leurs écrans et à leurs petits rêves d'ados ou d'étudiants grincheux. Ils ont démontré que nous nous sommes trompés ! Ils ont démontré qu'ils sont le cœur de cette nation et le cœur de son avenir. Il va falloir en tenir compte dans l'avenir. En tenir compte, en réformant l'école de la république, l'université et la formation professionnelle. En tenir compte en ouvrant des larges voies aux plus imaginatifs et créatifs parmi eux et en les encourageant par tous les moyens. En tenir compte aussi au niveau culturel, sportif, touristique et économique en général. C'est pour eux et par eux que nous pouvons réussir, sans eux nous pouvons seulement perdre ! L'économie informelle à récupérer Les malheurs peuvent avoir de bons côtés des fois. Une de plus grande plaie du pays depuis 2011 est le développement de l'économie informelle qui fait perdre au pays des opportunités de croissance énormes et dont les dividendes vont dans les poches de contrebandiers qui pactisent même avec les terroristes pour soutirer un sou de plus. Le bouclage sécuritaire du pays depuis mars dernier est une opportunité à saisir de toute urgence, surtout que ce bouclage est aussi opérationnel chez nos voisins libyens et algériens. Les contrebandiers vont être asphyxiés rapidement. Les pouvoirs publics doivent déployer des nouvelles stratégies à plus d'un titre. Des incitations claires et généreuses peuvent être mis en place afin d'inviter ceux qui désirent intégrer l'économie réelle à le faire en bénéficiant d'une porte d'entrée. Des nouvelles dispositions sont aussi à prendre pour certains produits afin de dissuader les gens de les acheter dans l'informel. Une campagne massive de communication peut être mise efficacement en place afin de dévoiler le mauvais rôle des pratiques informelles sur le pays et sur ses citoyens. Nos avons l'opportunité, aujourd'hui avec la situation exceptionnelle de la pandémie du Coronavirus, de déclarer sérieusement la guerre à ce fléau et avec toutes les armes nécessaires ! Notre combat contre le coronavirus est évidement la priorité nationale maintenant. Mais il n'empêche que nous pouvons, dès aujourd'hui, penser à l'après-pandémie et nous préparer du mieux qu'on peut pour en tirer les meilleures leçons.