Les mots et l'écriture ne sont pas appréciés à leur juste valeur par les illustres magistrats tunisiens qui ne se gênent pas –solidarité oblige- de faire croupir des citoyens tunisiens en prison, juste pour un « lèse-majesté » contre leur honneur. Est-ce une manière pour les magistrats de couvrir les plus corrompus de la profession ? Cela semble le cas, surtout que la question aurait pu être réglée, sans envoyer en prison des gens innocents dont la seule faute est d'avoir porté atteinte à leur honneur. La démocratie tunisienne est très fragile et on a l'obligation de s'entraider afin de mener le bateau à bon port, malgré certains dérapages, de part et d'autre, mais »les méfaits » n'atteignent pas le degré de violence qui sévit chez nos illustres députés qui se permettent le luxe de bafouer, même, l'honneur du pays. Faut-il donc que les journalistes exigent de bénéficier de l'immunité, aussi, afin d'éviter d'être des taulards, alors qu'il y a beaucoup de responsables qui méritent ce sort et qui jouissent d'une impunité honteuse ? Certes, Taoufik Ben Brik peut être considéré comme une « grande gueule » et il a roulé sa bosse dans tous les horizons, depuis Ben Ali. C'est un militant confirmé et il en a assez bavé, sous la dictature. Il aurait mérité des compensations, comme c'est le cas pour les militants islamistes. Malheureusement pour lui, il n'avait pas cherché une couverture politique importante... et le voilà condamné à un an de prison. Le Syndicat National des Journalistes Tunisiens a dénoncé vigoureusement le jugement rendu jeudi 23 juillet 2020 par la chambre correctionnelle près du tribunal de première instance de Ben Arous contre l'écrivain et journaliste Taoufik Ben Brik. La chambre correctionnelle a condamné Ben Brik à un an de prison ferme avec exécution immédiate. La chambre avait rendu le même jugement par contumace contre lui pour "diffamation envers les magistrats", a fait savoir aux médias l'avocat du prévenu, Nabil Akrémi. Dans une déclaration rendue publique vendredi, le SNJT estime que le jugement rendu contre Ben Brik est une dérive dangereuse dans le traitement judiciaire d'un dossier qui s'inscrit dans le cadre de la liberté d'expression. Le syndicat demande la libération immédiate de la plume acérée. " C'est un jugement sévère qui s'inscrit dans la spirale des accusations adressées à une justice aux ordres des barons de l'argent et de la politique, qui est susceptible d'ébranler la confiance de l'opinion publique en le pouvoir judiciaire, lequel devrait être le garant des droits et libertés et protecteur du processus de la transition démocratique en Tunisie ", indique le syndicat Le SNJT craint de faire impliquer les journalistes dans les luttes politiques. Il a mis en garde dans ce sens contre ce qu'il qualifie de "dictature des magistrats" et qui est à même de "porter préjudice à la liberté d'expression, d'opinion et de la presse alors que l'impunité reste monnaie courante pour les trafiquants, les corrompus et les partisans de la violence et de l'extrémisme". La même source a exhorté à cet effet le Conseil Supérieur de la Magistrature à enquêter sur ce "scandale judiciaire", tout en affirmant que la justice pareille aux autres institutions de l'Etat, notamment la présidence de la république et l'institution militaire n'est pas au-dessus de la critique qui touche à son indépendance des cercles d'influence politique et financier. Le SNJT estime que le jugement rendu contre Taoufik Ben Brik ne respecte en rien les chartes juridiques des démocraties qui s'accordent à permettre toutes les formes d'expression sans conditions notamment dans le cadre du débat général lié à des personnalités publiques dans le domaine politique et des institutions publiques, ce qui est de nature à renforcer les craintes d'un retour à l'interdiction de toute critique des institutions notamment l'armée, la police et la justice. L'affaire remonte à la période de la dernière campagne présidentielle suite à l'arrestation puis l'incarcération du candidat à la magistrature suprême de l'homme d'affaire Nabil Karoui. Ben Brik critiquait alors les magistrats sous le règne de Ben Ali en nommant publiquement certains d'entre eux sur le plateau d'une chaine de télévision. Les journalistes vont en prison, les blogueurs, mais les magistrats ne prennent pas la peine de juger les meurtriers des leaders nationalistes, les corrompus, les trafiquants et les auteurs de malversations, parce qu'ils ont une couverture étanche. Jusqu'à quand on va subir le diktat de la magistrature ? Jusqu'à quand va-ton museler la parole, alors qu'on prétend être dans une démocratie ? F.S.