En résidence artistique en Tunisie, le musicien sénégalais Alune Wade est allé à la rencontre des artistes locaux. Un mois de recherches et rencontres pour un nouvel album. L'Institut français de Tunis continue à offrir des résidences artistiques à des créateurs tentés par des expériences d'hybridation culturelle et des rencontres avec des homologues tunisiens. Depuis le 8 janvier, le musicien sénégalais Alune Wade réside à la Villa Salammbô pour y construire des ambiances musicales qui puissent conjuguer son savoir-faire avec les sonorités locales. "Sultan", un album hybride Alune Wade multiplie les rencontres avec les musiciens tunisiens et travaille à de passionnantes fusions entre les traditions cousines d'Afrique du nord et de l'ouest. Il est vrai que ces univers musicaux se sont rencontrés depuis des siècles mais la synthèse de leurs sonorités spécifiques reste un chantier ouvert. De rares musiciens viennent sur ce terrain pour défricher un legs qui attire de plus en plus, les générations montantes. Alune Wade fait partie de ces éclaireurs qui cherchent une confluence entre le patrimoine afroandalou et les rythmes ouest-africains. Son rêve, c'est d'initier une matrice puissante qui puisse agréger des systèmes que tout oppose seulement en apparence. Bien sûr, Wade procède selon une méthode qui ne tourne pas le dos à la liberté et à l'improvisation. Pétri de culture jazz et connaissant sur le bout des doigts les tendances afrobeat, Wade reste profondément musicien. Tout en ayant intégré le nécessaire travail académique, il laisse libre cours à la rencontre musicale et au dialogue des rythmes et des instruments. Il en découle une démarche singulière qui aboutit à une musique originale et inouïe au sens étymologique du terme. Un bassiste hors-pair La complicité avec des musiciens tunisiens invite à un tissage de références et à un mariage musical qui se déploie dans l'intensité des live sessions. Au bout du compte, un album devrait voir le jour pour partager cette expérience et rendre musicalement sa profondeur. Cette profondeur est bien sûr artistique mais aussi symbolique et s'inscrit dans les stratégies d'hybridation culturelle. Dans "Sultan", titre de l'album à venir, la musique africaine trouve ses racines dans deux terreaux géographiques et des traditions musicales qui ne se sont pas métissées auparavant. Les sonorités qui sont nées de cette rencontre impromptue sont à la confluence d'une Andalousie mythique et de rythmes débridés, portés par une distribution qui allie instruments classiques, ethniques et modernes. Ces grands moments de musique née du moment et de la quête artistique, sont aussi portés par le travail de bassiste de Alune Wade. Une coopération sud-sud qui ne perd pas le nord Indéniablement, ce musicien sait donner à la guitare basse, une envergure propice aux métissages. Le sound de Wade repose sur cette vocation rythmique aussi précise qu'un métronome mais qui sait rester absolument imprévisible. Du grand art qui porte la guitare basse vers des horizons pleins de créativité et de couleurs. En résidence jusqu'au 8 février, Alune Wade est un musicien dont le passage en Tunisie comptera. Son travail artistique de fond est en effet de nature à inspirer et engager ses homologues tunisiens dans une coopération sud-sud qui ne perd pas son nord musical. H.B