Le Temps-Agences - Barack Obama a ordonné l'application de sa nouvelle stratégie en Afghanistan sans attendre de dévoiler hier la décision la plus risquée de sa présidence: l'envoi probable de d'environ 30.000 soldats supplémentaires dans une guerre meurtrière. Dès dimanche, M. Obama "a communiqué sa décision finale dans le Bureau ovale en ce qui concerne la stratégie et a donné ses ordres pour ce qui est de la mise en oeuvre de la stratégie", a dit son porte-parole, Robert Gibbs. Lundi et mardi, il passait une bonne part de son temps en vidéo-conférence ou au téléphone avec ses partenaires étrangers, jusqu'au grand discours qui était prévu hier soir, à West Point. Devant les élèves de la plus prestigieuse école militaire américaine, il devait alors dire publiquement à 20H00 (aujourd'hui 02H00 HT) qu'il a fait le choix dangereux de l'escalade. Il devrait annoncer l'envoi de 30.000 soldats américains supplémentaires, dont le déploiement accéléré s'étalera sur six mois mais qui sera limité dans le temps, a précisé mardi un responsable de l'administration. M. Obama devrait en outre appeler les alliés des Etats-Unis à envoyer eux aussi des renforts. Et il devrait expliquer à des Américains de plus en plus hostiles à cette guerre comment il s'y prendra pour que le déploiement ne tourne pas à l'enlisement. Le président américain a demandé à ses alliés d'envoyer 10.000 hommes supplémentaires en Afghanistan, dont 1.500 à la France et 2.000 à l'Allemagne. Washington a demandé 2.000 soldats supplémentaires à l'Allemagne, 1.500 à l'Italie, 1.500 à la France et 1.000 au Royaume-Uni, parmi les 10.000 réclamés aux alliés. Barack Obama arriverait ainsi aux 40.000 soldats supplémentaires jugés nécessaires en août par le général Stanley McChrystal, commandant des forces de l'OTAN sur place. Il y avait environ 35.000 soldats américains en Afghanistan quand M. Obama a pris ses fonctions. Ils sont aujourd'hui environ 68.000 après une première augmentation des effectifs en février. Il s'agit peut-être de la décision la plus difficile de sa présidence. M. Obama a hérité du conflit, mais c'est pour lui une "guerre nécessaire". Il a beaucoup plus à y perdre qu'à y gagner, disent les experts. Le scepticisme est désormais majoritaire chez les Américains quant à la nécessité de cette guerre qui, loin de paraître prendre fin après plus de huit ans, connaît son année la plus meurtrière. M. Obama devrait insister hier sur le fait que l'engagement américain n'est pas illimité ni inconditionnel. Il fera de l'entraînement et de la montée en puissance des forces afghanes un impératif. "Vous pouvez être sûrs que le président dira que notre engagement n'est pas illimité", a dit son porte-parole. Selon le New York Times, M. Obama devait se montrer plus précis hier qu'il ne l'a été jusqu'alors sur les limites dans le temps de l'engagement , sans aller jusqu'à présenter un calendrier de retrait. Entre lundi et mardi, M. Obama devait s'entretenir avec ses homologues français, russe, chinois, les chefs de gouvernement britannique, allemand, australien, danois, polonais, indien, même s'il ne les sollicite pas tous pour des renforts. Les présidents afghan et pakistanais devaient eux aussi recevoir son appel. Barack Obama et Nicolas Sarkozy ont eu une conversation téléphonique lundi. Selon la présidence française, Nicolas Sarkozy a "confirmé que la France resterait pleinement engagée en Afghanistan aux côtés du peuple afghan et de ses alliés aussi longtemps que nécessaire pour permettre aux Afghans d'assumer progressivement leurs responsabilités".