Les rapports entre les hôteliers touristiques et les clients tunisiens ne sont pas au beau fixe loins'en faut ! A pareille époque de chaque année, un sujet revient dans les discussions de la majorité desTunisiens : Les vacances d'hiver ou de fin d'année et les prix exorbitants affichés par les hôtels de Tozeur-Nafta et Tabarka-Aïn Draham. La même rengaine revient à la veille de l'été, et les hôtels ciblés par " Vox Populi " sont les hôtels balnéaires de Hammamet et sa composante Sud, Sousse voire Djerba. Car, il faut le dire,les rapports entre les hôteliers touristiques et les clients tunisiens ne sont pas au beau fixe loin s'en faut ! Un rythme qui ne sied pas à la farniente Cette tension remonte à l'époque du lancement des premières unités balnéaires. Celles-ci, principalement réalisées par la défunte SHTT (Société hôtelière et touristique de Tunisie), étaient destinées à une clientèle étrangère principalement européenne, française et allemande surtout. Du reste la gestion de ces hôtels répondait et répond toujours à un mode de vie qui n'est pas nécessairement le nôtre. La clientèle étrangère est rarement individuelle. C'est dans la majorité des cas une clientèle de groupe et de ce fait se conforme à une discipline de groupe. Ce qui explique que le rythme de vie intra muros dans l'hôtel est réglé comme une horloge, petit déjeuner à heures fixes, idem pour les repas du midi et du soir. L'horaire des baignades aussi. C'est là un rythme qui ne sied pas à notre tempérament de méditerranéens pour qui l'heure en vacances perd de son sens au bénéfice du prélassement et du farnienté tout comme en Italie ou en Espagne. Malgré tout, le client tunisien s'en serait accommodé s'il trouvait une place disponible à l'hôtel pour un prix abordable, et c'est là ou le bât blesse. En effet, les lits à l'hôtel sont rares et chers à l'individuel. Comparés aux tarifs dont bénéficient les clients étrangers charriés par les tours opérateurs, les prix individuels sont très élevés. Depuis deux décennies la pression de la demande locale s'est faite plus forte sur les hôteliers. La qualité de vie dont bénéficie désormais le Tunisien n'est pas étrangère à cette pression : Ses revenus vont croissants et la voiture populaire a balayé les distances. Alors aujourd'hui les Tunisiens demandent leur part de marché des vacances, et ils le font savoir parfois bruyamment . Ils se sentent frustrés par ces barrières qui leur refusent l'entrée aux parkings des hôtels. Ils sont énervés par ces cerbères de gardiens qui ont oublié le sourire depuis leur naissance ! Ils ne comprennent pas d'où vient cette notion de plage privée : non ils ne comprennent pas qu'on leur refuse ce bout de paradis bien de chez eux ! Pour leur défense, les hôteliers rétorquent que si « méprise » il y a, avec leur clientèle locale, c'est dû à un déficit de communication. Pour un peu, ils jureraient que le client tunisien est de loin plus intéressant, car il ne regarde pas à la dépense,ne se prive pas et ne prive ni sa femme ni ses enfants des différents services payants de l'hôtel. Son tort c'est d'être imprévoyant, de ne pas réserver son séjour à l'hôtel assez à l'avance et de débarquer le jour J sans crier gare ! Et ajoutent-ils le Tunisien en famille ou avec ses amis fait preuve d'incivisme, envoie sans autres formes de précautions ses enfants à la piscine ou à la mer et dans les différents endroits réservés aux adultes tels le bar, le night et autres. Bref le Tunisien se croit tout permis et à la limite perturbe les services. Un véritable dialogue de sourds ! Alors pour mettre le holà et ramener les choses à la normale les pouvoirs publics ont vite fait de réagir . D'abord au niveau de l'hôtellerie et des prestations. C'est dans cet esprit qu'il faut situer les mesures annoncées récemment par le ministère de tutelle : Onze hôtels fermés, cent trente avertis et quatre vingt déclassés : excusez du peu ! Créer chez le Tunisien une culture de vacances Ensuite au niveau des clients locaux : et là l'intervention est beaucoup plus laborieuse car elle essaye d'agir sur les mentalités. En fait cette démarche a commencé depuis 2006 sur instruction politique au plus haut niveau, soucieuse qu'elle est de faire bénéficier le citoyen tunisien des mannes du tourisme intérieur. Il s'agit de mouvoir le Tunisien dans une véritable culture de vacances et de créer en lui un réflexe de réservation qui s'inscrit dans la durée. Pour réussir ce pari, car c'en est un, cinq grosses pointures ont été sollicitées : L'ONTT, la FTAV (Fédération tunisienne Des Agences De Voyages), la FTH (Fédération Tunisienne De l'Hôtellerie ) et la société de réservation filiale de Tunis Air : Amadeus. Le gestionnaire du groupe étant la FTAV. Mme Hayet Soukri viceprésidente de la FTAV ayant en charge la commission du tourisme intérieur nous parle de cette expérience qui en est à sa troisième année. Le plan concocté au profit du touriste local est simple dans ses grandes lignes. Il fallait dégager auprès des hôteliers qui adhèrent au système une capacité en lits exclusivement destinés aux touristes tunisiens à des prix étudiés à l'avance, de sorte qu'ils n'ont rien à envier à la tarification consentie aux TO étrangers. Commercialiser ensuite ces lits par les agences locales qui adhèrent également à ce système. A cet effet un logiciel spécial de réservation hôtelière a été créé sur le modèle Amadeus, de sorte que l'hôtelier soit payé à l'instant réel de la réservation. Le client paye directement l'agence. Mais pour bénéficier de ce système le client tunisien est tenu de réserver à l'avance. Ce modèle est en place depuis trois ans et les résultats sont assez mitigés pour ne pas dire décevants. En effet les hôtels qui ont souscrit au système ne sont pas nombreux ; 45 en 2006, 102 en 2007 et 93 en 2008. Quant au nombre des agences il n'est pas plus brillan : 38 en 2006, 45 en 2007 et 200 en 2008. Cela étant le nombre de chambres réservées par les hôtels pour la clientèle locale est faible soit 5 chambres par unité ce qui reste dérisoire. Tout de même ce système a assuré au profit des Tunisiens 18.282 nuitées ce qui représente 7% du chiffre d'affaires total. L'idéal selon la tutelle c'est qu'il atteigne les 15%.