Intervenue dans une conjoncture nationale et internationale particulièrement difficile, la loi de finances pour 2010, en Tunisie, a cherché à contenter les différentes catégories de contribuables : investisseurs, exportateurs, importateurs, financiers, banquiers, promoteurs régionaux, salariés, professions libérales, de sorte que tout le monde semble y trouver son compte. Aussi, fidèle à une tradition établie, l'Institut arabe des chefs d'entreprise et plus spécialement la cellule de ses jeunes membres, a organisé, récemment, en son siège aux Berges du Lac, à Tunis, une rencontre sur les dispositions de la loi de finances de 2010, animée par le spécialiste connu en la matière, Fayçal Derbal. Un document explicatif présentant en détail la teneur de la loi et le cadre général dans lequel s'inscrivent ses dispositions a été remis aux participants. Il a été confectionné par la société d'expertise comptable ''FINOR'', agréé par la Banque mondiale en tant que consultant. Investissement, exportation et droits de douane Mr Fayçal Derbal a exposé et commenté d'un point de vue essentiellement technique les différentes dispositions de la loi de finances de 2010, s'agissant, entre autres, des avantages accordés en faveur de l'encouragement de l'investissement, en attendant la refonte annoncée du Code d'incitation aux investissements, après l'adoption fin 2008 de la loi sur l'initiative économique. Les mesures d'encouragement prises dans ce but prorogent, jusqu'à la fin de 2010, l'octroi de la prime exceptionnelle d'investissement instituée au profit des investissements réalisés dans les activités prometteuses et ayant un taux d'intégration élevé, telle que prévue par l'article 52 du Code d'incitation aux investissements. Cette prime est fixée à 5% du montant de l'investissement mais elle peut être augmentée dans les limites de 20%. Elle est accordée, selon l'article 52 du Code d'incitation aux investissements, aux opérations d'investissements déclarées jusqu'au 31 décembre 2009, d'où la prorogation de sa période jusqu'au 31 décembre 2010. Des encouragements similaires sont prévus au profit des investissements privés dans le secteur des parcs de loisirs destinés aux enfants et aux jeunes grâce à l'attribution de terrains au dinar symbolique, ainsi qu'au profit des investissements favorisant le développement des technologies et de la recherche pour le développement. Une prime d'études est accordée à cet effet. La loi de finances de 2010 a, par ailleurs, maintenu, en l'état, les avantages financiers accordés aux investissements réalisés dans le cadre du développement régional, tels que mentionnés dans les articles 23 et 25 du Code d'incitations aux investissements, et ce jusqu'à la fin de 2010. En effet, la loi relative à l'initiative économique adoptée fin 2008 a réaménagé les zones de développement régional et les avantages qui leur sont attribués. Au même moment, l'Etat continuera de prendre en charge une partie des salaires payés aux diplômés de l'enseignement supérieur, pour encourager le secteur privé à recruter ces diplômés, mais les mesures d'incitation à l'emploi des diplômés seront regroupées dans un seul et même mécanisme, en l'occurrence le Fonds national de promotion de l'emploi, de sorte que la procédure de prise en charge toujours maintenue y sera incluse. D'autre part, dans le cadre de la réduction des taux d'impôt et l'allègement de la pression fiscale, la loi de finances de 2010 a prolongé la période d'exonération des revenus et bénéfices provenant de l'exportation, exonération qui devait être supprimée fin 2008, mais elle a été prorogée une première fois puis cette seconde fois et ce jusqu'à la fin de 2011. La loi de finances de 2010 comporte, en outre, des dispositions intéressant la réduction des droits de douane dus à l'importation de certaines matières, équipements et autres produits, des pays en dehors de l'Union européenne, car le problème ne se pose pas pour l'Union européenne à laquelle la Tunisie est liée par un accord de libre échange. Les produits concernés comportent, entre autres, les produits de diagnostic, les produits tissés bruts, les fils tissés, les produits chimiques, les métaux normaux bruts, les compresseurs.. Des dispositions entrant dans le cadre de la poursuite de la réforme fiscale sont contenues dans la loi de finances 2010, dont notamment l'assouplissement des conditions de restitution des sommes perçues en trop par le fisc au titre de l'impôt, concernant notamment la réduction des délais de restitution. Lutte contre l'évasion fiscale La loi de finances de 2010 a prévu aussi la suspension de la taxe sur la valeur ajoutée au titre des matières et équipements nécessaires à l'exécution de marchés à l'étranger de la part d'entreprises tunisiennes, lorsque ces matières et équipements sont acquis sur le marché tunisien. Des dispositions ont été, aussi, prises pour l'amélioration de l'endettement des huileries et des exportateurs d'huile d'olive, en raison du caractère stratégique du secteur de l'huile d'olive pour la Tunisie. Cet endettement concerne la campagne 2005 et 2006 qui a connu, pourtant, une production exceptionnelle que les exportateurs n'ont pas su gérer comme il se doit, à cause de mauvaises spéculations, de sorte qu'elle a , au contraire,mal tourné. Au même moment, la loi de finances de 2010 a introduit de notables améliorations aux procédures de restitution des crédits de la TVA. Elle a comporté également diverses mesures fiscales à caractère social en faveur des salariés ''mais qui peuvent encore être renforcées, par d'autres mesures dans ce sens, ont fait remarquer des intervenants. Par ailleurs, en vue de poursuivre l'encouragement des sociétés autres que les banques et les établissements de crédits en général, à abandonner leurs créances en faveur des sociétés en difficultés économiques, le droit à la déduction des pertes résultant de l'abandon de ces créances a été étendu à toutes les entreprises, pourvu que cet abandon soit effectué dans certaines conditions bien définies. La loi de finances 2010 a prévu des dispositions tendant à éviter l'évasion fiscale favorisée par les rapports de dépendance entre des filiales érigées en sociétés ''autonomes'' et l'entreprise mère, situation très répandue dans tous les pays et notamment les pays développés. En Tunisie, les bénéfices assujettis à l'impôt sur les sociétés sont ceux réalisés dans le cadre d'établissements situés en Tunisie et ceux dont l'imposition est attribuée à la Tunisie dans le cadre de conventions de non double imposition. La loi de finances de 2010 stipule, dans l'un de ses articles, que si les services de l'administration fiscale ont la preuve de l'existence de transactions commerciales ou financières entre une société et d'autres sociétés ayant une relation de dépendance, pour lesquelles les prix appliqués diffèrent de ceux appliqués aux autres clients ou de ceux pratiqués entre des sociétés indépendantes ayant des activités similaires, le manque à gagner des résultats sera réintégré au niveau de la détermination des résultats imposables. Dans ce même cadre, la loi de finances de 2010 a étendu les opérations de la vérification préliminaire des déclarations d'impôt, en reconnaissant à l'administration fiscale le droit d'utiliser les renseignements figurant dans les déclarations et les écrits déposés par d'autres contribuables qui sont en relation d'affaires avec le contribuable intéressé. Par ailleurs, lorsque le contribuable est une personne physique soumise à l'impôt sur le revenu, selon le régime forfaitaire prévu par le Code de l'impôt sur les revenus des personnes physiques et de l'impôt sur les sociétés (Code sur l'IRPP et l'IS ) , l'administration fiscale peut utiliser les résultats de visites sur place, effectuées selon les dispositions de ce même Code sur l'impôt. Certaines catégories de contribuables parmi des professions libérales, entre autres, initialement prévues par ces visites, en ont été exemptées, lors de la discussion de la loi, au sein du Parlement ( Chambre des députés et Chambre des conseillers).