Ils y sont parvenus. Hélas… Il y a quatre ans déjà, la censure avait réussi à retirer quatre gros paragraphes du livre « Al Ayyam » de Taha Hussein, qui date de 1929, sous le prétexte qu'ils portaient atteinte aux hauts dignitaires d'Al Azhar. Premier sacrilège. Qui touche à la pensée d'un très grand écrivain, dont les œuvres sont entre- autres, enseignées à l'école secondaire. Et pas seulement dans son pays d'origine. Mais il semble que ça ne soit pas suffisant. Et qu'il faille aller encore plus dans la démesure, jusqu'à toucher le fond. Et le fond vient d'être touché… Début janvier, la sanction est tombée. Irrévocable. Comme un couperet : « Al Ayyam » est retiré définitivement des programmes scolaires. Al Azhar en a décidé ainsi. Al Azhar a eu gain de cause. Et il faut dire que l'Institution, ainsi que les islamistes qui en constituent le noyau dur, ont toujours eu de la suite dans les idées. Ils n'ont pas lâché prise. Considérant le grand écrivain comme un mécréant, qui serait à la solde de l'Occident. Parce qu'il a étudié en France, et parce qu'il prêchait l'universalisme des idées. Et de l'humanité en nous. Ce qui a eu l'heur de déplaire à ceux qui préfèrent s'en tenir à un discours figé, rétrograde et obscurantiste, qui suinte le moisi et le rance. Résultat : Taha Hussein vient d'être enterré pour la seconde fois. La bêtise l'ayant emporté encore une fois sur la raison, en condamnant les jeunes Egyptiens, à passer à côté d'un chef-d'œuvre de la littérature égyptienne, mais pas seulement, puisque « Al Ayyam » fait école. Plus pour longtemps malheureusement à ce qu'il semble. Le livre, retiré des programmes de l'enseignement du secondaire, sera peut-être retiré aussi, -c'est dans l'ordre des choses- des rayons des libraires tout court. Et c'est Mozart qu'on assassine, sans que cela fasse grand bruit…