Depuis 1830 date de l'occupation de l'Algérie par le France, celle-ci avait toujours voulu démontrer à l'opinion publique internationale que son action colonisatrice n'était pas dans un but expansionniste et dominateur, mais salvateur voire humanitaire. Les adeptes de cette thèse, avaient toujours loué les bienfaits de la colonisation, aux dépens des indigènes. Il fallait que ceux-ci fussent convaincus pour ne pas manifester aucune objection ni opposition à l'occupant qui avait même, pour arriver à ses fins, utilisé certains d'entre eux moyennant quelques avantages dérisoires. En Tunisie, l'occupation a été un fait accompli devant lequel le Bey ne pouvait qu'accepter de signer en 1881 une convention d'un soit-disant protectorat, qui n'avait de protecteur que le nom. Cependant qu'une bataille acharnée se déroulait à l'intérieur du pays, menée par l'occupant, auquel le peuple avait opposé une résistance farouche. Ce fut depuis 1881 que les premiers martyrs étaient tombés sous les balles de l'occupant. La lutte était déclarée et s'était prolongée même au-delà de la proclamation de l'autonomie interne en 1955, avec les " fellaghas " qui refusèrent de rendre les armes jusqu'à ce qu'ils en fussent convaincus par le leader Bourguiba. Pourquoi alors avoir consacré la date du 9 avril 1938 à la mémoire des martyrs ? Car ce fut le jour où l'occupant était révélé sous son vrai visage. Le masque qu'il avait utilisé, que ce soit à travers les soit disant réformes, ou sous le prétexte fallacieux de moderniser le pays avait craqué. Les martyrs qui étaient tombés dans les multiples combats que ce soit dans le sud ou dans le nord du pays, étaient armés et affrontaient avec courage les soldats qui occupaient le pays. Ceux du 9 avril étaient des manifestants qui sortaient dans la rue et sur lesquels avaient tiré les forces de police coloniale sans sommation rassemblés devant le Palais de justice où ils étaient brutalement refoulés. Une émeute sans précédent se solda par la mort de plus d'une centaine de tunisiens, qui n'étaient pas armés et qui avaient été tués par traîtrise. Plusieurs personnes parmi les rescapés de ce vrai carnage, ont été arrêtés, dont des leaders du Néo-Destour, jugés d'une manière expéditive et condamnés à des peines de prison et de bannissement. La date du 9 avril 1938 marqua la rupture avec l'occupant français qui afficha sa vraie intention d'exterminer les autochtones pour faire de la Tunisie un département français, à l'instar de ce qu'il advint de l'Algérie. Il ne le put grâce à la détermination du peuple tunisien qui dans sa majorité avait pris conscience que seule une lutte sans merci l'amènerait à recouvrer au pays, sa liberté, sa souveraineté et sa dignité, fut-ce au prix de leur sang et de leur vie.