Avec l'enseignement, la santé publique cimente le socle social et garantit aussi l'équilibre social. Pour la Tunisie, c'est un éternel combat d'avant-garde. On a, par exemple, vu à quel point la veille stratégique mise en place contre la grippe porcine, avec, entre autres, 600 mille doses importées de vaccin a été d'une efficacité indiscutable. Quelques esprits négativistes ne se sont pas gênés pour dire qu'en l'occurrence, les pouvoirs publics exagéraient l'ampleur de ce virus bizarre. Or, quand on pense que la France a assuré 90 millions de doses pour une population de 60 millions d'âmes, on conclut que la santé publique dans notre pays prend les choses au sérieux. Aujourd'hui, ce sont les maladies cancéreuses qui se retrouvent - en fait, elles l'ont toujours été - dans le collimateur gouvernemental. Mise en place, décrétée par le Chef de l'Etat au cours du conseil ministériel d'hier, d'une série de mesures pour une meilleure prise en charge des maladies cancéreuses, malgré ses complexités. On entend dire, quelque part, qu'il y a recrudescence de ces maladies : ce n'est pas évident. Ce sont plutôt la fiabilité et les prodigieux progrès des techniques de dépistage précoce qui mettent à nu le mal, dans sa voracité traîtresse et souvent dans son cynisme morbide. C'est un ennemi. Et il faut le combattre à mort. Il faiblit et il recule, s'il est démasqué à temps. La société tunisienne évolue, les tabous tombent. On ne vit plus dans la souffrance et renfermé avec son mal. Et cela fait que le cancer est en passe d'être banalisé et d'être perçu comme tel, socialement et culturellement. Mais ce n'est pas une mince affaire. Ces maladies grèvent lourdement le budget : entre 100 et 200 millions de dinars. La prise en charge annuelle d'un malade varie entre 3 mille dinars (cancer du sein) et 60 mille dinars (leucémie, par exemple). Il est, donc, facile d'imaginer l'ampleur des chiffres, ne serait-ce que pour le cancer du sein qui " recrute " mille nouveaux cas chaque année. Et c'est finalement là que se situe le nœud gordien : intensifier le dépistage précoce et par ricochet, approfondir encore les concepts de communication et de sensibilisation sociale. Il y a quelques années, le défunt docteur Hamadi Ben Salem écrivait un livre poignant : " Dialogue avec mon cancer ". Le célèbre écrivain Jules Roy avait eu la même approche des années, auparavant.... Or, finis les combats individuels. Aujourd'hui, chez nous, du moins, l'Etat sort la grande artillerie.