Il nous est déjà arrivé de louer l'esprit, la conception et l'animation de cette émission qui, malgré quelques fausses notes, a pû s'imposer comme un espace de critique culturelle respectable. Lundi dernier (en rediffusion) “sans complaisance” diffusa – comme à son habitude – les témoignages de quelques spectateurs sortant de la salle le 4ème Art, où venait d'avoir lieu l'avant-première de la pièce “Sauf résidents” superbement servie par un Riadh Nehdi déchaîné. Jusque-là, rien à signaler. Cette émission nous a habitué à ces interventions sur le vif même si l'humour de l'animatrice qui récolte ces témoignages est, quelquefois, un tantinet forcé. Enfin, il faut aimer… et puis là n'est pas notre souci du jour. Ce qui a surpris les téléspectateurs, c'est qu'après les témoignages sur “Sauf résidents” on s'attendait à voir sur le plateau les créateurs de cette pièce, à savoir Moez Toumi ou Riadh Nehdi ou les deux à la fois. Ce fut étrange. Au lieu de suivre cette logique incontournable, les maîtres de “Sans complaisances” nous surprirent en nous proposant comme invité Lotfi Abdelli. Je n'ai pas encore eu le loisir de voir son spectacle “Made in Tunisia” qui vient de fêter sa centième présentation et dont on nous a d'ailleurs montré quelques extraits. Cela semblait très «in», «Kitch», et même “un peu beaucoup” dans le vent… C'est là qu'on voit que la Tunisie a vraiment évolué et que la génération des jeunes quadragénaires qui est en train de bouter celle des soixante-huitards vers le Sahara de la retraite, n'était pas comme cette dernière frappée par la “sinistrose” et la mélancolie revancharde des révolutionnaires de parade. Enfin, j'ai entendu ce jeune loup que rien se semble arrêter, et à qui tout semble réussir (Dieu lui en rajoute !) s'expliquer quant à sa fameuse déclaration, qui a fait l'effet d'une bombe dans la presse « people » et où il disait qu'il pouvait faire beaucoup mieux que Gad El Maleh. “Je n'ai pas dit exactement ça, rectifia-t-il. J'ai plutôt dit que si Gad El Maleh était Tunisien, il serait en train de moisir sous un mur en tirant péniblement la langue”. En gros Gad El Maleh aurait été un lamentable ratage s'il était Tunisien. Ce qui confirme la première impression laissée par la déclaration de notre comédien Made in Tunisia. A savoir qu'il peut mieux faire que Gad, puisque lui a réussi là où ce dernier aurait lamentablement échoué. Enfin, Abdelli nous expliquera que son spectacle n'était pas un one man show mais plutôt un “Stand up” c'est-à-dire qu'il est debout face au public et qu'il lui parle. Il lui communique ses observations sur la société et les critiques qu'il lui adresse. Abdelli serait-il un redresseur de torts, un philosophe, un sociologue, un politicien, un journaliste ? Non, aucunement ! Au début il a dansé et maintenant il se tient debout. Il gagne bien sa vie. Il s'habille comme les invités de Nagui et il n'a pas besoin de tourner sa langue plusieurs fois dans sa “poche”, pour nous balancer ses pensées ultra-modernistes et rigolotes. La presse ? Elle ne sert pratiquement à rien. Quand un spectacle fait mouche, on peut écrire quantité d'articles pour le dénigrer, il continuera à marcher. Le contraire est aussi vrai. Les louanges ne font pas son succès. Les journalistes ? Il y a des bons et des mauvais. Les bons sont une minorité. Les autres font honte à la profession. Fabuleuse déclaration ! Lui aurait-on posé la même question sur les chauffeurs de taxi ou les marchands de poissons qu'il aurait sûrement donné la même réponse. Il y a des bons et des mauvais ! Sûr que Abedelli ne veut avoir affaire qu'aux bons journalistes ! C'est beaucoup plus sécurisant. La minorité régnante étant toujours plus honorable et “classe” que la majorité qui raclent le sol avec leur langue pour trouver quelques restes à engloutir. Tel ce Français que Abdelli rencontra avenue Bourguiba en train de « crever la dalle » et qui parlait de la crise internationale qui a touché tous les pays à part la Tunisie. Il l'invite à soigner son apparence et le conduit chez sa mère pour manger un couscous à la viande et arrosé de petit lait. En soulevant le grand pot de petit lait, le Français s'écria “Allah est grand” et puis il est allé s'exploser à El – Jazira. Avec quel genre de bombe ? Avec du petit lait ! C'est léger, profond, intriguant, éloquent, difficile à saisir et simple à la fois. Du grand cru Made in Tunisia. Et ça marche ! “Arrêtez donc d'envier les gens qui réussissent, nous conseilla sévèrement le grand Lotfi, et de dire chaque fois qu'on voit quelqu'un au volant d'une belle voiture que c'est un voleur”. Je suis d'accord avec cette maxime. Tous ceux qui sont au volant des belles voitures ne sont pas forcément des voleurs. Par contre tous ceux qui se déplacent à pied après avoir largement dépassé la quarantaine sont d'incurables débiles ! Ce n'est pas qu'il soit prétentieux ou fanfaron cet adepte du “Stand Up” mais il a une intelligence aiguisée, il voit pour nous… nous qui demeurons depuis des siècles en position de “Stand by”. Bougez comme il l'a fait ou allez vous faire une carrière en France comme Gade El Maleh puisque là-bas les choses sont beaucoup plus faciles !