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"J'en savais trop sur Ben Ali… Et sur ses combines au service de la CIA, de mèche avec l'ambassadeur américain en Pologne Robert Pelletreau, devenu après ambassadeur en Tunisie" Les victimes de la répression: Mokhtar Ismail : 6 ans, 4 mois et vingt jour
Alors que l'ancien président est recherché par l'Interpol pour exportation illicite de devises, les témoignages se succèdent détournant l'accusation vers les crimes contre l'humanité. Nous avons longtemps entendu parler durant les deux dernières décennies d'histoires de torture dans la fameuse cave du ministère de l'Intérieur. Le nouveau ministre Farhat Rajhi a déjà commencé à donner un grand coup de balai à ce ministère, décrit comme "terroriste", mais cela suffit-il à effacer les souffrances de centaines de personnes qui y ont été enterrées vivantes? Les personnes témoignant ne cherchent pas vengeance, mais justice. Elles dénoncent ceux qui ont participé à la machine infernale instaurée et dirigée par l'ancien président et qui ne visait qu'à le maintenir en place le plus longtemps possible et à faire taire ceux et celles qui détiennent des informations nuisant à son image. Mokhtar Ismail âgé de 69 est aujourd'hui en état de "précarité totale" puisqu'il avait passé 6 ans dans 16 prisons à l'époque de Ben Ali. Ayant eu deux AVC lors de son emprisonnement, il a purgé sa peine, mais a quitté la prison de Gafsa le 17 mai 1995 avec du diabète et des troubles de la tension. "C'est un miracle que je sois encore vivant" témoigne-t-il. Et pourtant, cet homme, fondateur du Consulat général de TUNISIE près les gouvernements de l'OTAN (USA, GB, et France) à Berlin-Ouest en 1980 et Ex- directeur de l'Agence Tunis Afrique Presse-TAP à BONN (RFA) durant plus de 8 ans avait des bons contacts avec l'ancien président. Ce dernier lui aurait même demandé de l'aider à inscrire ses trois filles conçues de son mariage avec Naima Kefi, à Berlin Ouest avant de les inscrire, lui-même finalement en Pologne. Et c'est peut-être car Mokhtar Ismail en savait un peu trop, que Ben Ali n'a pas tardé à le jeter en prison. Le calvaire commença néanmoins suite à des déclarations faites le 25 septembre 1988 à la réunion de quelque 400 journalistes à la maison Ibn Khaldoun à Tunis. "J'ai osé mettre en garde l'opinion publique contre le danger de ce sinistre général qui avait pris la Tunisie en otage, la charrette est toujours la même, seul le baudet a changé" Se souvient-il en revenant à la case départ, de sa descente aux enfers… Des personnalités importantes de l'époque ont été témoin de cette déclaration. Or ils faisaient partie des "yeux et oreilles de Ben Ali", premiers accusés dans le témoignage de Mokhtar Ismail. "Aussitôt, un procès fut fabriqué par Ben Ali et on me condamna à 6 ans de travaux forcés par une justice inféodée au régime. Un tribunal présidé par TAIEB BEN ABID décréta le verdict le 01/11/1988 pour m'interner tard la nuit à la prison du 9 Avril Tunis. Ben Ali ne m'a pas pardonné d'avoir été au parfum de beaucoup de secrets forts compromettants, j'étais la cible idéale de ces « pasdarans » du régime hitlérien." Poursuit Ismail dans son témoignage. Quels sont ces secrets? De quoi accuse-t-il l'ancien président, à part le fait d'avoir ordonné sa torture bien évidemment. "C'est un agent de la CIA, un primitif. Il n'a pas fait plus de trois ans d'études secondaires et après les évènements de Gafsa de 1980, Bourguiba l'a désigné au Pakistan comme ambassadeur. Les Etats-Unis sont intervenus pour qu'il aille à Varsovie (Pologne). Là-bas, il a noué des relations avec Robert Pelletreau, ambassadeur américain en Pologne et qui a participé à la chute du régime et à la prise du pouvoir par Le général Wojciech Jaruzelski. Pelletreau a ensuite été nommé ambassadeur en Tunisie, où il a beaucoup œuvré pour l'accession de Ben Ali au pouvoir (1987-1991). Ben Ali a joué un grand rôle dans les manigances, les renseignements et mêmes manipulations avant d'arriver au pouvoir. Après mes déclarations, j'ai dû endurer 6 ans 4 mois et 20 jours dans plus de 16 prisons avec un lot quotidien de tortures et de tentatives de liquidation physique. Mohamed Zoghlemi est par ailleurs décédé en prison, puisqu'après ma libération, j'ai fait un rapport confidentiel l'accusant de détournement de fonds, ce qui a été prouvé par l'enquête ouverte suite audit rapport. Et j'accuse aujourd'hui, Ahmed Hajji, qui était directeur général des prisons d'avoir offert le titre foncier Borj Amri (de cinq hectares) à Ben Ali en 1990 – 1991. "Pas moins de 12 livres parlant du régime m'ont été confisqués et détruits. J'ai néanmoins été libéré 2 fois; le 8 Juin 1989, pour non lieu par la Cour de cassation, rejugé le 28/06/89 pour la même peine, les conditions inhumaines de ma détention, c'était un calvaire, plusieurs fois frôlant la mort après des comas de 6 à 10 jours." Ajoute Mokhtar Ismail. Et il dénonce "les dégâts physiques et mentaux perpétrés par Ben Ali, Abdelwaheb Abdallah, Abdallah Kallel, Mohamed Ali Ganzoui et d'autres encore…" "Ce que Ben Ali m'a fait subir, ainsi qu'à des centaines d'autres ce sont tout simplement des crimes contre l'humanité"…