Décidément, il y a des rites scolaires qui sont devenus immuables et que nos élèves, au collège comme au lycée, ne sont pas près à abandonner, quelles que soient les circonstances. En effet, les élèves de 4è année secondaire, candidats au bac, ont toujours organisé leur «dakhla», ces fameuses journées festives accompagnant les épreuves du bac sport, qui ont été maintenus juste cette année, quoique le bac sport ait été supprimé par le Ministère de tutelle depuis deux ans à cause des dépassements et des dégâts engendrés par cet examen. De même, les collégiens ont leur façon de clôturer l'année scolaire et ce dès l'entrée en examens finaux qui commencent avec la semaine avant-bloquée et se poursuivent avec la semaine bloquée en se livrant à « la guerre des œufs », une tradition devenue incontournable dans tous nos collèges. Si les élèves de terminale recourent aux flammes, aux feux d'artifice et aux inscriptions provocatrices sur les banderoles ou les murs du lycée, les collégiens, plus jeunes, se contentent de leur propre jeu de fin d'année qui consiste à se chamailler au moyen des œufs, communément appelé la guerre des œufs. En effet, le samedi dernier, la dernière journée de la semaine pré-bloquée, quiconque était passé ce jour-là devant un collège avait certainement assisté à un spectacle désolant : des élèves se jetaient des œufs frais. Histoire de se marrer, ni plus ni moins, vous diront ces adolescents ! Mais il faudrait imaginer ces figures, ces cheveux et ces vêtements éclaboussés de couches d'œufs et de farine et les cris plaintifs de ces élèves affolés, surtout parmi les filles, et voir aussi les murs couverts de taches d'œufs et le sol jonché de saletés répugnantes d'où se dégageaient des odeurs nauséabondes d'œufs pourris. Ce jeu pratiqué essentiellement en fin d'année semble être l'aboutissement d'une série de jeux dangereux et humiliants qui se pratiquent à longueur d'année, dans la cour comme en classe. Pour ces ados, il ne s'agit que d'une scène plutôt festive, leur façon de fêter la fin d'une année scolaire pleine de contrainte et de stress. Et dire que les élèves victimes de ce jet d'œufs sont souvent filmés à l'aide de téléphones portables et ainsi les photos ou les vidéos seront échangées plus tard entre les camarades via Internet ! Une surveillante dans un collège a fait remarquer que « les victimes dans ce jeu sont souvent les élèves les plus brillants, les plus sages et les plus timides ! » Et ce n'est pas par hasard que ces élèves sont la cible favorite des lanceurs d'œufs qui, en général, sont des élèves médiocres, espiègles et turbulents. Cahiers et livres déchirés Un autre phénomène qui paraît aussi bizarre se répète en fin de chaque année scolaire : des milliers de cahiers et de livres sont déchirés et jetés devant les écoles. Cela commence dès la fin de la semaine avant-bloquée pour se poursuivre durant la semaine bloquée. Dès la fin de l'épreuve, certains élèves, comme pour se défouler, déchirent le cahier et/ou le livre de la matière dont ils viennent passer l'épreuve, comme s'ils voulaient effacer toute trace leur rappelant la matière et son enseignant ! Il suffirait d'une virée devant des établissements scolaires lors des périodes d'examens finaux pour remarquer ces milliers de papiers, jetés ça et là, qui jonchent le sol. C'est dire à quel point un cahier ou un livre est devenu un pesant fardeau pour certains élèves qui veulent s'en débarrasser aussitôt les examens terminés. « Des milliers de cahiers et de livres sont déchirés et jetés par les élèves. Quel gâchis ! a fait remarquer un enseignant de collège. Normalement, on ne doit jeter ni livre ni cahier, ils peuvent toujours servir aux prochaines années ! Les livres pourraient être réutilisés s'ils sont encore en bon état ! Mais, le pire est que la plupart des élèves ne prennent pas soin de leurs livres au cours de l'année et n'ont aucun respect pour les manuels ; ils écrivent et dessinent dans ces manuels et en déchirent la couverture et même des pages. C'est dommage !… » Mais un autre enseignant a ajouté à ce propos : « Il faut dire que ces livres ne sont pas d'une superbe qualité, bien souvent au bout de quelques mois, leurs couvertures minces se décollent et se détachent. C'est l'argument avancé par plusieurs élèves qui viennent en cours sans manuel ! Et puis, certains élèves passent leur temps à faire des gribouillages et des griffonnages sur leurs manuels, inconsciemment ou volontairement, histoire de se distraire. Franchement, si ces manuels étaient de bonne qualité, avec des couvertures épaisses et solides, ils auraient pu être épargnés pour servir à d'autres enfants de la famille. » Serait-ce là un alibi pour justifier cet acte gratuit des élèves qui déchirent leurs livres et cahiers en fin d'année scolaire ? De notre part, on ne saurait accepter ces agissements d'incivilité et d'irresponsabilité de la part de nos élèves. N'oublions donc pas que le manuel scolaire est aussi un livre, une référence en cas de besoin et un moyen de culture. C'est un livre que l'élève doit avoir plaisir à utiliser et à conserver pour permettre aux successeurs de l'utiliser ! La preuve, c'est qu'il y a des gens, déjà adultes, qui gardent encore leurs livres et cahiers qu'ils ont utilisés à toutes les étapes de leur cursus, dès l'école primaire et jusqu'à l'université et qui, à leurs yeux, constituent un souvenir agréable certes, mais aussi un trésor ! Espérons que nos enfants s'abstiendront de ces actes dégradants qui marquent chaque fin d'année scolaire. Avec la Révolution, les choses devront changer et surtout les mentalités !