Le Temps-Agences - La Syrie a formellement accepté hier, après une valse-hésitation de plusieurs semaines, la venue d'observateurs arabes dans le pays, jugée immédiatement par l'opposition comme une «manœuvre» pour gagner du temps. Le vice-ministre syrien des Affaires étrangères Fayçal Al-Maqdad a signé au Caire un document autorisant la venue d'observateurs, dans le cadre d'un plan de sortie de crise mis au point par la Ligue arabe, que Damas avait déjà accepté «sans réserves» sans jamais pour autant l'appliquer. A Damas, le chef de la diplomatie syrienne Walid Mouallem a assuré que les observateurs arabes étaient «les bienvenus» en Syrie, lors d'une conférence de presse. Le secrétaire général de la Ligue arabe Nabil Al-Arabi a annoncé qu'une première délégation se rendrait en éclaireur à Damas sous trois jours. Dirigée par Samir Seif Al-Yazal, assistant du secrétaire général, elle sera «composée d'observateurs de la sécurité, du droit et de l'administration», a déclaré M. Arabi, précisant que des équipes incluant des experts des droits de l'Homme suivraient. La France a réclamé aussitôt que les observateurs arabes puissent remplir leur mission «le plus rapidement possible sur le terrain» en Syrie, où le régime réprime depuis plus de neuf mois un mouvement de révolte sans précédent. Six civils ont été tués hier par les forces de sécurité à Deraa (Sud) et à Deir Ezzor (Est), a rapporté l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Dans la province d'Idleb, ce sont trois soldats de l'armée régulière syrienne qui ont été tués hier lors d'affrontements avec des déserteurs, selon la même source. Les forces de sécurité ont ouvert le feu sur des manifestants dans le quartier historique de Midane à Damas. Deux personnes dont un enfant ont été blessées, selon l'OSDH et les comités locaux de coordination (LCC), qui chapeautent les manifestations sur le terrain. Dans un communiqué, les LCC ont annoncé que 937 civils, dont 60 enfants, ont été tués par les forces de l'ordre et l'armée syriennes depuis le 16 novembre, date à laquelle Damas avait refusé de signer le protocole arabe. Burhan Ghalioun, chef du Conseil national syrien CNS) qui regroupe la majorité des courants de l'opposition syrienne a estimé que les déclarations de M. Mouallem étaient une «tromperie» pour «couvrir l'échec du régime syrien», dans une conférence de presse à Tunis. Les rapports des observateurs «seront envoyés au secrétaire général de la Ligue arabe et à moi-même», a indiqué le chef de la diplomatie syrienne. «Nous en discuterons par téléphone avant toute prise de décision», a expliqué M. Mouallem, précisant que cela faisait partie des demandes syriennes. Les observateurs pourront «accéder aux points chauds mais pas aux points militaires sensibles». M. Mouallem a affirmé que son pays n'avait accepté de signer ce protocole que parce qu'il respectait sa «souveraineté». «Dans ce protocole, nous parlons de protéger les civils contre les groupes terroristes», a-t-il ajouté. La répression dans le pays a fait depuis la mi-mars plus de 5.000 morts, selon l'ONU, mais Damas attribue les violences à des groupes terroristes armés. La Ligue arabe avait menacé de recourir au Conseil de sécurité de l'ONU, où Moscou, allié de longue date de Damas, bloquait jusqu'à récemment les résolutions condamnant la répression dans le sang. Jeudi, la Russie a créé la surprise en proposant sa propre résolution condamnant les violences commises «par toutes les parties» syriennes. Paris a souligné que l'envoi d'observateurs «ne constitue que l'un des éléments» du plan de sortie de crise arabe qui prévoit aussi «l'arrêt de la répression, la libération de toutes les personnes emprisonnées à l'occasion des manifestations, le retour de l'armée dans les casernes et l'accès au territoire syrien des médias internationaux».