La chambre des référés près le tribunal de première instance de Tunis a par son ordonnance de lundi dernier, rejeté la requête présentée par un groupe d'avocat, afin d'interdire aux médias l'usage du terme « provisoire » en évoquant le président de la République ou le gouvernement actuel. Cette décision est dans le sens de la consolidation de l'indépendance judiciaire, la loi étant au-dessus de toute autre considération quelle qu'elle soit. Le manque de sérieux de ladite requête était plus qu'évident, car comme nous l'avons déjà fait remarquer, (notre rubrique du 29 janvier), il n'y a aucune loi qui interdise qu'on puisse appeler les choses par leur nom. En l'absence d'une loi, le juge est là pour y suppléer par sa propre interprétation, mais sans s'écarter toutefois des principes juridiques, fondement de toute décision judiciaire. Indépendance judiciaire et liberté d'expression. Et si la décision avait été favorable à la requête, comment pourrait –elle être appliquée ou en d'autres termes, quelle serait la portée d'une telle décision ? Ce serait en tous les cas une forme de censure, qui porterait atteinte, tant à la liberté de la presse qu'à l'indépendance de la Justice. En effet le sens profond de la requête en question est dans un but de porter atteinte à la liberté de la presse et par là même à la liberté d'expression en général, comme l'a été la requête contre la chaîne Nessma. Les procéduriers invoquent à chaque fois un motif, mais tous les moyens sont bons pour museler d'une façon ou d'une autre tous ceux qui expriment leur opinion pour dénoncer des abus ou des dépassements. La Justice est là pour réprimer toute expression orale ou écrite d'ailleurs, constituant une atteinte à la dignité du culte ou à l'intégrité morale d'une personne. Mais une décision judiciaire, obligeant à une forme quelconque d'expression, et interdisant l'utilisation de vocables ne constituant aucune diffamation, est une décision qui porte atteinte à l'indépendance de la justice. Celle-ci étant tributaire de la liberté d'expression. Le juge dit le droit, et le journaliste, s'exprime librement, mais sans enfreindre la loi. Equation difficile, mais qui va dans le sens de la consolidation de la Transition démocratique. La liberté d'expression est en effet, l'une des conditions essentielles de la démocratie. Encore faut-il savoir en user,sans porter atteinte à la liberté des autres. En fait comme a dit Vaneigem, écrivain révolutionnaire belge, « Il n'y a ni bon ni mauvais usage de la liberté d'expression, il n'en existe qu'un usage insuffisant. » quant à l'indépendance judiciaire elle est née de cette volonté des magistrats à prendre des décisions qui s'attaquent à toutes formes d'atteintes aux droits de l'Homme. La dernière décision en réponse à une attaque au droit de la liberté d'expression a été dans ce sens. Mais attendons que cette décision soit définitive et croisons les doigts, car dans leur entêtement, les avocats qui ont présenté initialement la requête iront plus loin dans la procédure. En vain ? Wait and see.