Il est rare d'entendre parler chez nous d'un artiste faisant la grève de la faim pour faire entendre ses griefs à l'opinion publique. Ce moyen, peu ordinaire dans la sphère culturelle, est cependant plus courant chez les étudiants, les hommes politiques, les syndicalistes, les prisonniers, mais rarement chez les artistes qui, faut-il le dire, ont subi toutes sortes de restrictions, de contrôle et de censure exercées sur leurs œuvres depuis des décennies sans jamais protester de la sorte. Recourir à la grève de la faim semble une nouvelle formule de revendication adoptée par Lamine Nahdi, à la manière d'autres artistes de renom comme par exemple, le Sénégalais Souleymane Diouf, dit Farah, qui a fait la grève de la faim en 2010 pour réclamer l'exécution d'une décision de justice condamnant le ministre Farba Senghor à lui payer 30 millions de Francs CFA, et qui sera peut-être suivi par d'autres : d'ailleurs, Lamine s'exprime de cette façon – c'est son choix et son plein droit – et chacun est libre de choisir la sienne, tout comme les ouvriers et les employés d'entreprises qui font aujourd'hui des sit-in et des grèves pour faire valoir leurs problèmes et attirer l'attention des responsables sur leurs revendications ! Mais la question qui se pose : Lamine, va-t-il tenir jusqu'au bout afin d'obtenir gain de cause ? Entre temps, cette grève de la faim entamée par l'artiste fait couler beaucoup d'encre, notamment sur les réseaux sociaux, et fait apparaître des opinions mitigées parmi le public. Tout a commencé il y a quelques jours quand la Télévision publique tunisienne a refusé d'accorder à Lamine Nahdi, notre célèbre comédien, les autorisations de tournage nécessaires pour une série humoristique destinée pour Ramadan prochain. Dans un communiqué publié mercredi 15 février 2012, la Télévision tunisienne a donné ses explications quant au refus du projet de Lamine Nahdi qui a pour titre « Inspecteur Khalifa ». Selon la Télévision tunisienne, « ce n'est pas la direction qui a refusé le projet, mais une commission spéciale composée de compétences avérées », qui reproche, entre autres, à ce feuilleton, une « idiotie » exagérée et une « absence totale d'humour » et le taxe d' « anachronisme ». De plus, toujours selon le communiqué, la commission a relevé certaines « similitudes avec la série algérienne, Inspecteur Tahar ». Or, Lamine Nahdi, se sentant lésé par pareille décision, estimant qu'il s'agissait d'une humiliation et d'une sous-estimation de son parcours artistique, a entamé une grève de la faim en signe de protestation arguant que sa série, présentée auparavant à la télévision publique, a déjà fait l'objet d'un accord de principe avec l'ancien directeur de cette chaîne publique. Il a reproché lors d'une émission diffusée par une chaîne de radio privée jeudi dernier qu'il n'avait pas confiance en cette commission d'évaluation des productions qui, selon lui, n'est pas apte à juger des travaux comiques, étant présidée depuis de longues dates par les mêmes personnes. Le « Roi de la comédie » estime que même après la Révolution, il est victime de la censure dont il a fait l'objet pendant des années en considérant que « rien n'a changé » et que « les vieilles pratiques » continuent à sévir. Cependant, lors de cette émission radiophonique, le nouveau directeur de la télévision publique, M. Sadok Bouabbane, intervenait par téléphone pour donner quelques éclaircissements sur ce sujet. Il a rappelé que cette décision de refus revenait strictement à la commission d'évaluation et qu'il n'était pour rien dans cette affaire. Mais il a promis d'arranger une rencontre entre Lamine Nahdi et les membres de cette commission en vue de rapprocher les points de vue et peut-être, trouver une solution adéquate. Il a également demandé amicalement à Lamine Nahdi de mettre fin à sa grève de la faim qui pourrait influer sur sa santé. L'affaire reste en suspens.