Par : Mahjoub Lotfi Belhedi - Directeur d'une structure de formation & d'études Avant toute transposition terminologique possible, en jargon médical, scientifiques et profanes sont unanimes qu'une fausse couche désigne une interruption volontaire ou involontaire d'une grossesse suite à des troubles multiples, en lexique politique, bien qu'il a été adopté sous la coupole, le règlement interne de l'ANC présente des symptômes de déficience, sources d'une série de spasmes, de convulsions répétées annonciatrices de fausses couches graves … Polémiques stériles…séquences de frustration interminables … boycottage des séances plénières d'un bon nombre d'élus … bref un show de tensions bien médiatisé, de goût désagréable, décevant à l'image d'un règlement interne incapable à jouer son rôle de dispositif juridique préventif des conflits. Bien que le schéma institutionnel politique du pays est bien révélateur, sauf aux daltoniens, réduit en un seul et unique organe, cumulatif de tous les pouvoirs, s'inscrivant exclusivement dans une perspective transitionnelle, dérogeant de toute alchimie politique répondue (régimes présidentiel, parlementaire ou mixte) et évoluant dans le cadre d'un régime collégial trop spécifique, appelé Assemblée, de nature instable, périlleux caractérisé par la non séparation des pouvoirs et l'absence de tous mécanismes de régulation effective… En dépit de ces quatre vérités, l'esprit majeur du règlement interne de l'ANC via l'application orthodoxe de la règle de la représentativité proportionnelle et le recours quasi-systématique au vote, ne propage en fait qu'une fiction, une illusion d'une cité d'Athènes bien ancrée dans la démocratie instaurée dans notre pays !! Un peigne fin des articles du règlement interne de l'A-N-C dévoile sans équivoque l'omniprésence et la prédominance de la règle de la proportionnalité, au point de sa sacralisation et ce au détriment d'une approche consensuelle plus collégiale, moins frustratrice – incessamment mis en exergue dans mes articles parus au même journal le 22/01/2012 & 2/03/2012- . A titre d'appui, le terme consensus ne figure que timidement dans le corpus du règlement interne, l'article 40 dispose que la « Conférence des présidents prend ses décisions par consensus » …bien que cette dernière – la conférence des présidents- n'est qu'une instance purement consultative qui se tient au gré du président de l'Assemblée aux termes de l'article 38 : « …qui la convoque si besoin il y en a » !!? Sur ce plan, nul ne peut contester la pertinence de la règle de la proportionnalité et le recours à la technique de vote dans la mise en place d'un exécutif légal et légitime (une présidence collégiale et une coalition gouvernementale), en revanche, nul aussi ne peut continuer à admettre que ces règles soient considérées comme seules et ultimes mécanismes de régulation face aux exigences spécifiques d'un régime d'Assemblée, arrogant, rebelle à toute classification et à tous référentiels classiques reconnus en Droit parlementaire Universel. En aucun cas, le consensus n'est une redécouverte de la lune ou une substitution à la règle de vote, cependant, c'est l'art d'avoir un accord-SMIG bien négocié sur des questions litigieuses épineuses, un processus de longue haleine de pourparlers et de concessions réciproques entre les différents protagonistes -fortement recommandé en Droit privé et Public - aboutissant à un compromis de type « gagnant-gagnant » privilégiant les convergences aux divergences, une forme d'approche par compétence transposée de l'éducatif à la sphère politique, un esprit citoyen de résoudre les problèmes majeurs de nature complexe, bref une incarnation d'une majorité qui déguste, d'une minorité qui savoure et vice-versa… Pour en finir avec cette situation paradoxale de non symbiose entre le règlement interne et le régime politique d'Assemblée en vigueur, deux passerelles libératoires sont décidemment à prévoir dans le règlement interne par voie de sa révision prévue par les articles 141-142. - La première consiste à mettre en place un dispositif réglementaire d'interactivité élus/société civile garant d'une participation citoyenne plus active dans la prise de décision conformément à l'esprit d'OpenGov parlementaire, - La seconde est de procéder à la conversion de « la conférence des présidents » en une instance décisionnelle sans chevauchement aux compétences dévolues au bureau de l'assemblée et de son président. Vraisemblablement, ces deux alternatives, sont en mesure – s'ils sont savamment appliqués - d'injecter la dose consensuelle qui manque dans les veines de notre A-N-C, et de l'empêcher de s'enliser davantage dans une «stratégie de force » de type «Gagnants contre perdants». A présent, les pendules de l'élaboration de la constitution retentissent, un rappel au consensus est à l'ordre du jour… Ultime opportunité… A saisir !!