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Quand le gouvernement minimise et limoge le Directeur de l'INS
Les multiples facettes de l'inflation
Publié dans Le Temps le 15 - 05 - 2012

La méthodologie du calcul de l'inflation est souvent remise en question. Le gouvernement, les économistes, et les ménages eux-mêmes parlent d'un décalage entre l'inflation mesurée et celle ressentie.
C'est presque devenu une tradition, pour notre gouvernement. A chaque fois qu'un indicateur économique publié contredit les anticipations et les chiffres avancés par le gouvernement, les déclarations officielles ne tardent pas à reprocher l'incapacité de ces indicateurs à refléter la réalité. Les exemples ne manquent pas. Mais, c'est l'indicateur relatif à l'inflation qui a souvent suscité une large polémique. Durant les deux premiers mois de l'année en cours, l'Institut National de la Statistique (INS), a publié des chiffres alarmants concernant l'inflation. L'Indice des Prix à la Consommation (IPC), indicateur officiel de l'inflation en Tunisie avoisinait en moyenne 5,4% durant les deux premiers mois de l'année 2012 (il est ainsi de l'ordre de 5,4% deux mois auparavant contre 5,7% durant le moi d'avril de l'année en cours). Il faut dire ainsi que l'année 2012 s'est manifestée dès le début par une inflation héritée de 2,7%.
Le gouvernement a vigoureusement contesté ces chiffres. Et il a vite réagi par le limogeage du directeur de l'INS, pour avoir diffusé des chiffres qui ne traduisent pas la physionomie des choses. On affirme ainsi que l'inflation perçue par les ménages tunisiens est de manière persistante inférieur à l'inflation mesurée. Ridha Saidi, ministre chargé des Dossiers économiques auprès du Chef du gouvernement, a même remis en cause des données d'inflations des deux premiers mois de l'année en cours ainsi que la méthodologie du calcul de l'IPC. Une chasse aux sorcières ou quoi exactement ? A-t-il vraiment raison ? La réponse à telle situation, venait de la part de la Banque Africaine de Développement (BAD) qui a recommandé à Vincent Castel, Coordinateur principal pour les programmes de la Tunisie au sein de la BAD et Kaouther Abderrahim, Consultante au sein des structures opérationnelles de l'Afrique du Nord, d'élaborer une étude intitulée « Inflation en Tunisie : entre perception et réalité dans un contexte de transition », que nous recommandons ainsi au Ministre Rida Saidi. (Elle est déjà disponible en ligne sur le site web de la BAD).
Méthodologie remise en question ?
Dans presque une dizaine de pages, les deux auteurs de l'étude ont essayé d'expliquer le phénomène d'inflation, sa méthodologie et surtout de « dégager si l'inflation est réelle sur quels biens ou services elle s'exerce et cherche à identifier les facteurs qui en sont à l'origine. Dès la lecture des premières pages de l'étude, on retient que « l'IPC tunisien a une représentativité relativement bonne tant du point de vue de la couverture géographique que du nombre de produits inclus dans le panier ». On précise ainsi qu'en 2010 l'échantillon des points de vente a été revu à la hausse en passant de 2 631 à 3 155 points de vente en 2010. « Ces points de vente se répartissent sur toutes les localités, chefs-lieux des gouvernorats, ainsi que les grandes agglomérations urbaines », indique-t-on dans l'étude. On précise encore qu'après sa révision, la liste des produits du panier de consommation a été élargie pour y dénombrer 101 produits répartis en 12 groupes. « Pour finir, l'institut national de la statistique (INS) a révisé l'année de base de l'indice des prix à la consommation familiale par l'adoption de l'année 2005 comme nouvelle année de base en remplacement à l'année 2000. La structure des pondérations a aussi été révisée en s'appuyant sur les résultats de l'enquête nationale sur la consommation des ménages de l'année 2005 », peut-on ainsi lire aussi dans l'étude. L'hypothèse de Ridha Saidi est-elle infirmée ?
L'étude, bien qu'elle justifie la méthodologie du calcul de l'IPC, relève un décalage entre l'inflation calculée et celle ressentie par les consommateurs. On explique ainsi la situation par le fait que les événements survenus lors de 2011 ont saboté le contrôle économique des prix qui s'est traduit par un non respect sur les étals des prix fixés par l'état. Des écarts considérables enregistrés entre les prix officiels administrés et les prix de vente de plusieurs produits, en particulier les produits alimentaires ont ainsi pu être notés. Cependant, ces hausses ne semblent pas être reflétées dans les indicateurs officiels d'inflation constatés respectivement en janvier et février 2012. En plus d'un renforcement du contrôle pour l'application intégrale des prix administrés sur les marchés, l'échantillon de points de ventes dans lesquels les agents de l'INS prélèvent les prix pour le calcul de l'IPC national devra être revu à la hausse avec une meilleure répartition sur les localités, les chefs de lieux des gouvernorats et des grandes agglomérations. L'IPC, indicateur général, ne traduit pas l'inflation au niveau du panier de la ménagère. Car tout simplement, la hausse comme par exemple de 8,3% des produits alimentaires est réduite à 2,5% dans l'inflation totale, bien que la pondération des produits alimentaires est 32% dans l'IPC.
Inflation : les explications à connaître
L'inflation en Tunisie, telle que commentée dans l'étude, est expliquée théoriquement par des facteurs mixtes. On évoque ainsi les facteurs monétaires (masse monétaire, le taux d'intérêt et le taux de change effectif influence l'évolution de l'IPC) ainsi que les facteurs structurels à l'instar du salaire annuel moyen à l'indice de prix à l'importation et de la production réelle. Dans la pratique, les auteurs de l'étude estiment que la variation des prix mondiaux de l'énergie et des denrées alimentaires est un moteur traditionnel de l'inflation. On rappelle ainsi que l'augmentation de la facture énergétique influence les coûts de production (et donc les prix) lors de la transformation des produits manufacturés et de leur transport. Les deux auteurs affirment ainsi « qu'une hausse des prix de l'énergie intervient également sur les coûts de production agricole et sur le transport des denrées tandis que la hausse des prix des céréales augmenterait indirectement les prix de la viande et du lait, lorsque celle-ci rentre dans la composition des aliments d'élevage », tout en précisant qu'en 2007, trois quarts de la consommation de céréales ont été importés dont plus de la moitié a été consacrée à l'élevage.
Pour préserver le pouvoir d'achat contre la volatilité des prix mondiaux des matières premières ainsi que leurs conséquences sur les coûts de production, l'Etat a procédé à la fixation des prix de certains produits ainsi que la subvention certains produits alimentaires de base. Cependant, ce contrôle des prix s'est effectué au détriment de pressions budgétaires plus importantes à cause de la mobilisation accrue de la caisse de compensation. Les statisticiens précisent qu'au lendemain du 14 janvier « le gouvernement de transition a revu à la hausse la caisse de compensation en vue de palier les augmentations des prix mondiaux des denrées alimentaires, notamment des produits céréaliers, et afin de tempérer les inquiétudes d'une population dont les attentes n'ont cessé de croitre depuis le départ du président déchu ».
Inflation et compensation
Les dépenses de subventions en soutien au pouvoir d'achat des populations ont atteint environ 2,8 milliards de dinars (4,5% du PIB). Les produits énergétiques ont le plus bénéficié de l'intervention de l'Etat pour un montant global de DTN 1,5 milliard, suivi des subventions pour les produits alimentaires (DTN 1,1 milliard). Ces nouvelles subventions ont pesé lourd dans le déficit budgétaire qui atteint un taux s'établissant à -3,9% en 2011. Par ailleurs, la gamme des produits subventionnés a été élargie pour répondre aux demandes sociales en incluant le lait stérilisé demi-écrémé, le sucre et le concentré de tomate.
Certes, cet effort supplémentaire de subvention a freiné pour quelques mois l'augmentation des prix des différents produits notamment les produits alimentaires. Mais, à partir de juillet 2011, « ces mécanismes ont montré leurs limites. Et alors que l'inflation moyenne est restée maîtrisée – celle-ci a été très fortement ressentie par les ménages au niveau de produits de consommation et services courants. Une hausse de 6.4 % des prix des produits alimentaires a été enregistrée entre juillet 2011 et février 2012 (et de 8,3 % sur un an) », estiment les auteurs de l'étude. On explique aussi que d'autres produits et services ont connu des hausses similaires – présentant un impact faible sur l'inflation moyenne mais très visible pour le consommateur - : le tabac (+9,7 % sur 6 mois), l'enseignement (+9,8 % sur 6 mois).
Compte tenu de cette situation, l'année 2012 a déjà démarré avec 2,7% d'inflation héritée. « Depuis le début de l'année 2012, l'inflation moyenne est en nette hausse avec des taux de .9% en janvier, et plus 5,7% en février contre un glissement annuel s'établissant à 3,5% en 2011. Cette inflation – directement ressentie par le consommateur moyen – reflète une importante hausse des prix des produits alimentaires, représentant plus de 32 % des dépenses du consommateur moyen », peut-on aussi lire dans l'étude.
De toute façon, le gouvernement actuel se trouve confronté à une situation délicate. Avec la réduction des marges de manœuvre, il devrait ainsi faire preuve d'efficience et d'efficacité face au problème de l'inflation. Les deux experts de la BAD (auteurs de l'étude) pensent sérieusement qu'outre les actions de contrôle économique et les efforts de sensibilisation, un effort de communication reste à faire autour de l'inflation du panier de la ménagère. Il propose aussi qu'il ne faudrait pas alors parler d'un indice mais de plusieurs indices d'inflation qui tiendraient compte des disparités régionales et des disparités de consommation entre les différentes couches sociales. « Ces différents indices des prix à la consommation pourraient inclure: un indice de prix national (qui existe déjà), un indice de prix pour les ménages pauvres, un indice de prix par région et l'indice du panier de la ménagère. Ces indices serviront notamment à la définition des politiques sociales du gouvernement.

Eclairage
Ezzedine Saidane, économiste
Economia : comment expliquez-vous la différence entre l'inflation mesurée et celle ressentie par les ménages tunisiens ?
Ezzedine Saidane : la composition du panier devrait être ainsi révisée pour qu'elle soit de plus en plus conforme entre autre proche du mode de consommation du ménage tunisien. C'est un panier dépassé et il devrait être révisé. Plus encore, il ne faut pas compter uniquement sur l'indice général des prix, car il s'est avéré qu'il n'est pas suffisant pour juger l'inflation ressentie par le citoyen. Cet indice général est composé en effet d'autres sous-indicateurs à l'instar de l'indice de l'évolution des prix des produits de base. L'augmentation des prix des produits de bases est largement supérieure à celle observée dans l'indice général mesurant l'inflation. L'inflation est actuellement mesurée à 5,7% alors qu'elle dépasse les 8% dans les produits de base. Raison pour laquelle, l'inflation ressentie demeure largement supérieure à celle réellement ressentie.
Et les solutions ?
La solution reste tributaire de la relance économique et de la reprise des investissements. C'est une question d'offre et de demande. L'offre est en cours de diminution alors que la demande est en perpétuelle augmentation. La solution radicale se résume comme je l'ai déjà mentionné dans la reprise de l'économie, la reprise de la production, car même avec le renforcement du contrôle de l'Etat pour lutter contre la contrebande et l'augmentation des prix, l'inflation demeure élevée.
Ridha Saidi, Ministre chargé des Dossiers économiques auprès du Chef du Gouvernement
Economia : pour quoi gouvernement remet en question la méthodologie du calcul de l'IPC ?
Ridha Saidi : ce n'est pas un problème particulier à la méthodologie du calcul de l'IPC. Tout le système national de la statistique devrait ainsi se moderniser, bien que le système demeure quand même un système efficace. Nous sommes actuellement en train de préparer des consultations pour la modernisation du système national des statistiques. Quant à la méthodologie du calcul de l'IPC, je tiens à préciser qu'il faut que l'inflation mesurée soit égale entre autres très proche de celle réellement vécue. Il faut ainsi qu'elle reflète la réalité des prix. Le panier du consommateur (couffin de ménagère) devrait comprendre des pondérations objectives pour que l'IPC traduise les augmentations ressenties par le consommateur.
Quelles sont les décisions à prendre pour lutter contre le fléau des augmentations des prix ?
En deux mots, parmi les décisions les plus importantes que le gouvernement a décidé, c'est l'organisation du contrôle des circuits de distribution. D'autres décisions sont également prises à l'instar du renforcement du contrôle économique et les efforts de sensibilisation.


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