Vue sous cet angle, l'inflation est en étroite relation avec la compétitivité de l'entreprise et aussi le pouvoir d'achat du citoyen. Grâce à une politique monétaire sage et à un contrôle renforcé des circuits de distribution et des prix, ainsi que le respect des règles de la concurrence, la Tunisie a réussi à maîtriser l'inflation à des niveaux acceptables et qui concordent avec ceux enregistrés chez nos principaux partenaires commerciaux. Avec les crises à répétition depuis des années, la Tunisie qui améliore de plus en plus son intégration dans l'économie mondiale, est soumise à des pressions inflationnistes, ce qui rend la maîtrise de cet indicateur une mission difficile. Evolution de l'inflation en Tunisie : L'inflation en Tunisie est généralement représentée par l'Indice des Prix à la Consommation, publié mensuellement par l'Institut National des Statistiques. Il traduit l'évolution d'un panier de produits et de services consommés par les ménages. Cet indice est le sujet d'un grand débat avec un appel constant à la révision du panier des produits et qui doit tracer la réalité de la consommation des ménages. En effet, certaines rubriques ont connu une grande évolution telle que les dépenses liées à la télécommunication, ou habitudes alimentaires, les dépenses liées aux loisirs et culture, et aussi l'apparition de nouveaux produits non couverts par l'indice. D'autres mesures plus pointues et mieux représentatifs sont utilisées pour l'analyse économique. On retrouve : « L'indice de référence: Pour évaluer la tendance de l'inflation, la banque centrale juge très utile de se servir d'un indice de référence qui constitue une variance de l'indice des prix à la consommation. Cet indice représente 16% du panier de l'IPC les plus volatiles. Mais, à condition que les variations de ses huit composantes n'aient que des effets temporaires sur l'inflation, l'indice de référence et l'IPC global afficheront des profits d'évolution similaires à moyen terme. Le déflateur de PIB : il fournit le prix moyen des biens dans le PIB et donc des biens finaux produits par l'économie. Cette mesure donne une image plus globale et plus exacte de l'inflation, mais ses délais d'établissement sont beaucoup plus longs. » (Voir mémoire DEA de Refk Selmi- Transmission des variations du taux de change sur les prix à la consommation: le cas de la Tunisie) La Tunisie n'a pas connu de vrais pics de l'inflation, et a réussi à la maîtriser dans une moyenne générale ne dépassant pas les 3%, et ce malgré les grandes pressions inflationnistes. L'objectif pour les 5 prochaines années est de confiner l'inflation à un niveau de 3.5%, ce qui est en soi un objectif très ambitieux. Les années de pics sont le résultat d'une conjoncture nationale et internationale difficile (période de sècheresse et baisse de la production, hausse des prix des matières premières et alimentaires à l'échelle mondiale). Cette maîtrise de l'inflation intervient même dans un cadre de libéralisation progressive des échanges pour une meilleure intégration, et dans le cadre d'une politique de libéralisation des prix. En effet, plus de 87% des prix sont libres en Tunisie depuis des années. Au début de cette année l'IPC a connu une hausse de 5.1% jusqu'au mois d'Avril dernier, avec une hausse importante au niveau de la rubrique alimentation qui a atteint les 8.2%. Un indice qui traduit la cherté de la vie. L'inflation en Tunisie est soumise à plusieurs pressions depuis des années. Les fluctuations des cours des produits alimentaires surtout le blé, le café, le sucre, les huiles, les épices et d'autres produits de premières nécessité. Ces produits, qui sont en majorité subventionnés, connaissent une révision permanente, afin de réduire les dépenses de la caisse de compensation. Les hydrocarbures et certaines matières premières, intrants dans la fabrication, connaissent eux aussi une grande fluctuation dans les bourses mondiales à l'instar du caoutchouc, du fer, le souffre,….Les prix des équipements est soumis aussi à des hausses de prix au niveau mondial, telle que le matériel de transport, les machines et équipements industriel, les pièces de rechanges, et qui ont un impact sur les couts de production. Ces fluctuations, conjuguées avec une hausse du cours de certaines monnaies d'importations, principalement l'euro, ont un effet important sur le niveau de l'inflation en Tunisie. On parle ainsi de « l'inflation importée ». Le degré d'ouverture de l'économie nationale, sous l'effet de la libéralisation des échanges commerciaux, contribue aussi à cette inflation. En 2008, le taux d'ouverture de l'économie nationale dépasse les 110%. La baisse des droits de douanes encourage l'importation, surtout face à un tissu économique pas très compétitif. Contrairement à la logique économique, la baisse des droits de douane ne contribue pas à la baisse des prix, vu qu'il existe un effet de change important. Le consommateur tunisien contribue pour sa part à cette hausse de l'inflation avec une demande de plus en plus importante et un niveau de consommation effréné. La Banque Centrale garante de la stabilité des prix : La stabilité des prix est la mission exclusive de la Banque Centrale de Tunisie. Selon la BCT, et conformément à l'article 33 nouveau de la loi n°2006-26 du 15 mai 2006 modifiant la loi n°58-90 du 19 septembre 1958 portant création et organisation de la Banque Centrale de Tunisie (BCT), la mission principale de la politique monétaire consiste en la préservation de la stabilité des prix. « Pour ce faire, la BCT, par le biais des instruments mis à sa disposition, influence le taux d'intérêt du marché monétaire considéré comme étant l'instrument principal de la conduite de la politique monétaire afin d'atteindre l'objectif final à savoir la stabilité des prix. Ce cadre de politique monétaire repose, en plus des agrégats monétaires et de crédits, sur une gamme diversifiée d'indicateurs étroitement liés à l'inflation. Citons à ce titre les prix à l'importation, l'écart de production (output gap), l'inflation sous jacente, etc. » (Source BCT) Pour arriver à une bonne maitrise de l'inflation la BCT surveille avec vigilance la croissance de la masse monétaire, qui est communément appelée M3, et ce en adéquation avec la conjoncture nationale et le rythme de croissance économique. La BCT intervient parfois en épongeant de la liquidité sur le marché local et la réglant selon les besoins des opérateurs économiques. Le taux d'intérêt, qui vient d'être baissé de 75 points d'indice il y un an, comme instrument anti-crise, constitue aussi un bon outil de maîtrise de l'inflation et d'amélioration de la compétitivité de l'entreprise. Contrôle économique et mise à niveau des circuits de distribution : Le Ministère du Commerce et de l'Artisanat a aussi une contribution importante dans la stratégie nationale de maîtrise de l'inflation. A travers le contrôle des circuits de distributions, la garantie de la concurrence et la veille au respect des droits élémentaires du consommateur, ainsi que le respect des prix administrés ; le Ministère veille à un niveau normal des prix loin des spéculations et des hausses exagérées et inexpliquées. Il faut signaler au passage que le corps du contrôle économique manque de moyens humains et matériels pour garantir une couverture permanente des différents commerces et circuits. Le parachèvement du programme national de mise à niveau des circuits de distribution va certainement contribuer à assurer une bonne maîtrise de l'inflation. La caisse générale de compensation a continué à assurer de son côté la stabilité des prix des produits de première nécessité et ce malgré la hausse des cours de ces produits. Les dépenses de la caisse ont connu une grande évolution durant les dernières années passant de 216 millions de dinars en 2000 à 800 millions de dinars en 2009, et a atteint 1048 MD en 2008. Ces dépenses ont représenté plus de 2.25% du PIB en 2008. Et malgré cette charge qui pèse énormément sur le budget de l'Etat, le gouvernement a achevé le 7ème round des négociations salariales qui s'est traduit par une hausse des salaires, afin d'améliorer le pouvoir d'achat et faire face à la hausse de certains prix. Il ne faut pas oublier de mettre en relief le rôle du consommateur en soi, qui doit rationnaliser sa consommation et contrôler « sa fièvre acheteuse » pour ne pas permettre aux commerçants de hausser les prix. La responsabilisation du consommateur était l'un des points soulevés par le Ministre du Commerce et de l'Artisanat lors de son dernier point de presse tenus récemment. Des défis et des pressions : Il est important de signaler que l'inflation en Tunisie est dans des niveaux acceptables et ce malgré la conjoncture nationale et internationale de plus en plus hostile. Ce qui est plus réjouissant c'est que cette maîtrise intervient même avec la continuation du processus de libéralisation économique, et en respect des engagements de la Tunisie dans le cadre des organismes et accords internationaux tel que l'OMC et l'accord de partenariat avec l'union européenne. L'inflation enregistrée n'a pas aussi altéré l'effort d'amélioration continue de la compétitivité de l'économie tunisienne, qui est confirmée par le rapport de compétitivité du forum de Davos. La Tunisie est soumise à des pressions inflationnistes de plus en plus importantes, surtout venant du marché international, ce qui accroît la nécessité d'une politique monétaire prudente et rationnelle. La hausse des prix doit être suivie avec plus de rigueur par les instances gouvernementales surtout que nous sommes à l'aube d'une saison de grande consommation à savoir la saison estivale et le mois saint du Ramadan.
