Heureusement que Dieu rit. C'est du moins ce qu'Il affirme lui-même quand Il constate que certains parmi les humains se rient de Son œuvre : «Allah se moque d'eux, yastahzî bi-hem. (Et les maintient pataugeant dans leur aveuglement», (II, 15) nous dit le début de la sourate La Vache. Le Dieu du coran comme de la Torah a même nommé l'enfant qu'Il a donné miraculeusement à Sarra alors qu'elle était supposée être stérile en s'inspirant du rire de la mère, fa zahikat, d'où le prénom d'Isaac!. (XI, 71) Dieu rit donc et aime le rire. Il n'y a que Ses adorateurs, de plus en plus nombreux aujourd'hui et tout autour de nous depuis le 23 Octobre 2011 qui semblent détester ce trait principal de l'humain, s'en vont froncer les sourcils et même aller jusqu'à les abîmer artificiellement pour Lui montrer qu'ils sont d'assidus pratiquants de la prière comme si Lui, Omniscient soit-Il, ne le savait pas. Les proverbes, les adages, les maximes populaires font partie de ce qui fait vivre une société et lui permet de réagir à des outrances ou à des excès, de maintenir à distance une stupidité, de rester libre enfin de toute rigidité qui endort et abêtit. Quand le peuple produit un proverbe, il ne lit pas dans les traités de théologie ni ne redoute ce Dieu vengeur qui n'existe que dans les prêches, les bréviaires ou dans les serments des doctes. Les petites gens, les gens bien préfèrent se rapprocher de Dieu par la joie et le bonheur et même le rire comme dans les fameuses anecdotes et blagues du bon peuple du Jérid Tunisien. En matière de proverbes croustillants et pleins de cette sagesse des nations qui édifient les grands peuples, nous allons ici citer quelques-uns avant qu'ils ne deviennent, à nous aussi, impossibles d'être proférés ou de les inscrire dans nos écrits. Deux sont effet de ce bon terroir de Jérid qui est le mien car je ne les ai jamais entendus ailleurs. Le premier singe celui-là qui croit avoir fait « tout bon » et s'emplit d'une orgueilleuse certitude avant d'avoir le résultat qui pourrait le décevoir : « Il était tellement sûr du Paradis qu'il a pété sur la planche mortuaire ( minn farahtah bi-l-jannah, bass foug an-na'ch). L'autre, loin de se moquer du culte, montre à bien comprendre la formule qu'il en respecte profondément l'essentiel : « il a trouvé la Cité vide, il y a clamé l'appel à la prière » (lga el-mdîna khalya, gâm fi-ha al-adhân). Tout le monde, ceux qui sont intelligents du moins comprendront que le culot d'une telle personne, a eu peur d'affronter les fidèles d'une cité normalement peuplée qui aurait jugé de sa voix, de sa diction et des performances qui lui permettraient d'assurer une aussi noble et divine fonction. Bref, qu'il s'agit d'un lâche ! Enfin, voici un proverbe bien Tunisois, très connu et qui est vraiment « limite ». Je me demande vraiment si dans l'ambiance de suspicion qui règne partout au sujet des faits religieux que nous avons toujours vécus innocemment et gaiement jusque-là, je me demande si sa seule mention ne nous vaudra pas un jour d'être trainés en justice pour blasphème : « Moïse est arrivé, il nous faut avoir de la nostalgie et rendre grâce à Pharaon !... » ( Jâ Moussa, rahhem'allah far'ûn). Une maxime quidate peut-être de très loin dans le temps, du fameux écart sinaïtique du Veau d'Or, quand l'illustre prophète de Dieu, le grand Moïse, a sévi férocement contre les siens, les fils d'Israel, redevenus païens en son absence. Et pourtant, il est toujours là ce proverbe. Personne ne pense, en en usant qu'il s'attaque à l'un des principaux envoyés de Dieu avec Abraham, Jésus et Muhammad. Nos compatriotes, profondément croyants, signalent seulement quand ils évoquent ce proverbe que souvent, très souvent, les successeurs sont plus acharnés contre l'innocence des peuples que les prédécesseurs. Histoire de bien asseoir une autorité qu'ils viennent tout juste de gagner. N'est-ce pas très précisément la situation dont nous souffrons aujourd'hui ?