Les travaux de l'assemblée préparatoire du Forum Social Mondial Tunisie 2013 ont démarré jeudi (12 juillet), après-midi à Ribat Monastir et ce, en présence des activistes internationaux dans les droits humains ainsi que des membres du Conseil International du Forum Social Mondial (FSM), des membres du Conseil du Forum Social Africain, des familles des martyrs, des jeunes chômeurs tunisiens et des membres du mouvement sénégalais « Y'en a marre » en plus des représentants de la société civile tunisienne... Retraçant le processus de création du forum social à l'échelle mondiale et les objectifs de ce mouvement qui se veut altermondialiste, Chico Whitaker, et Gustave Massiah, deux membres fondateurs du forum ont pris la parole pour rappeler les principales étapes du FSM et les défis de la lutte internationale contre l'inégalité socio-économique et pour la promotion des droits humains. D'ailleurs, c'est dans ce cadre que les travaux de la deuxième journée se sont déroulés. Les organisateurs de l'assemblée préparatoire du FSM ont réservé un axe à la question de la migration et des droits de libre circulation. A cet égard, une assemblée plénière sur la liberté de circulation et la fermeture des frontières, les migrations dans l'espace méditerranéen depuis le 14 janvier 2011 a été organisée hier matin, où l'on a enregistré la présence des familles des jeunes disparus après le 14 janvier, des réfugiés au camp de Choucha ainsi que des activistes nationaux et internationaux dans le domaine.
Nord-Sud
Pour mieux examiner cette question, toujours d'actualité et faisant surtout l'objet de divergences entre les pays du Nord et ceux du Sud, Nicanor Haon a parlé des mouvements d'émigration irrégulière dans le bassin méditerranéen, tout en rappelant les politiques adoptées par les pays européens, où l'on dénie les droits des migrants. Nicanor Haon a également, critiqué les accords conclus entre les pays des deux rives de la Méditerranée qui « ne sont plus des accords, mais plutôt des PV », selon les propos de l'activiste. De son côté, Mohieddine Cherbib, militant des droits de l'Homme, a rappelé les circonstances de l'émigration de nos jeunes tunisiens, ceux qui ont fait la Révolution et ayant choisi quand même de partir vers l'Europe. « Victimes de chômage notamment dans le domaine du tourisme et encouragés par les familles, les jeunes étaient motivés pour partir en Europe juste après la Révolution », d'après M. Cherbib. Il a fait, par ailleurs un flash back sur les tragédies survenues après le 14 janvier 2011 et ayant coûté la vie à des centaines de jeunes tunisiens. De même, le spécialiste en droits humains a parlé des politiques européennes adoptées dans ce cadre et basées sur la fermeture des frontières depuis des années, tout en léguant la tâche de surveillance des frontières aux pays générateurs de flux migratoires contre des sommes d'argent qu'on accorde à la Tunisie, au Maroc, ainsi qu' à d'autres pays... « d'où, le déplacement des frontières », signale M. Cherbib. Et « c'est catastrophique », commente-t-il, tout en critiquant les politiques de la France et de l'Italie, où l'on néglige les jeunes qui ont réussi à s'y installer. Par ailleurs, les conditions de vie dans les camps en Libye ont été présentées par Massoud Romdhani. Décrivant ses visites aux détenus d'origine africaines et qui sont arrêtés dans ces camps, le représentant de la Fédération Internationale des Droits de l'Homme, a déclaré que presque 1800 détenus de différentes nationalités, (Somalie, Erythrée, Ethiopie et quelques Egyptiens) vivent dans des conditions difficiles. Il précise aussi que ces espaces sont gérés par des milices, qui portent des mauvais jugements sur cette communauté ainsi que les Touaregs. Expulsés de leurs villes d'origine, ces derniers sont considérés comme les milices de Guaddafi. Ils sont même méprisés et considérés comme source de maladies.
Changement
Toujours dans le même ordre d'idées, M. Romdhani considère qu'il est essentiel de changer l'approche avec laquelle nous gérons la question de l'émigration. Il faut mettre l'accent sur trois volets pour pouvoir changer la donne, recommande le défenseur des droits de l'Homme. Il importe tout d'abord de reconnaitre le droit à la liberté de circulation à tous les individus. Ensuite, les autorités européennes doivent reconnaître les droits des émigrés réguliers et irréguliers d'autant plus qu'ils ont contribué à l'édification de l'économie européenne. Enfin, le droit au travail est un droit acquis. Dès lors assurer un emploi aux jeunes n'est pas une œuvre caritative. M. Romdhani a aussi insisté sur la nécessité de changer les méthodes de négociation avec les européens sur cette question. « Il faut parler avec l'Europe d'égal à égal et ne pas accepter de jouer le rôle de surveillant des frontières », appelle M. Romdhani. Il faut changer. Le Forum Social Mondial est ainsi un espace destiné à motiver les peuples opprimés à s'exprimer librement et à mieux s'estimer pour vivre dans des meilleures conditions et équitablement. Il est temps de changer les méthodes de militantisme et de passer à autre chose, car les jeunes d'aujourd'hui cherchent une vie décente même au péril de leur vie.