Puisque, cette année, le mois de Ramadan est situé en été, nous pourrions profiter de cette éventualité pour consacrer un moment de nos journées de plage à visiter un ou plusieurs sanctuaires ruraux, en particulier ceux de l'extrémité du Cap Bon qui sont proches de très belles plages. Sidi maoui de Tazoghrane
Peu après la pépinière forestière située au pied du Jebel Ben Oulid, la route menant de Soliman à El Haouaria est coupée par une voie qui conduit à Menzel Témime : la C. 45. A moins de 2 kilomètres après le carrefour, une petite route part, à gauche de la C. 45, va au village de Tazoghrane dont le nom semble bien avoir une origine berbère. Elle se termine en piste carrossable à proximité du marabout qui sert de sépulture à Sidi Maoui, le fils de Sidi Maaouia. Le matin, de bonne heure, les amateurs de marche pourront laisser leur véhicule soit au carrefour, à la garde du cafetier installé là, soit le long de la petite C. 45 et aller à pied jusqu'au marabout dont on voit le dôme. Sidi Maoui et vivement vénéré actuellement. Le marabout, aux murs immaculés dans lequel il repose, domine un petit cimetière bien entretenu. Les très nombreux ex-voto qui tapissent les murs, à l'intérieur du marabout prouvent la vénération que lui témoignent de nombreux fidèles. Mais, nous a-t-on dit, Sidi Maoui de Tazoghrane n'est que le fils de Sidi Maoui ou Maaouia qui serait inhumé aux alentours de Menzel Témime. Nous vérifierons. Tout près du marabout, une table rocheuse : un dolmen, émerge des herbes sèches. Il est consacré, parait-il, à la mère de Sidi Maoui : Lella Khira : La dame la meilleure ! Serait-ce la survivance d'un culte beaucoup plus ancien qui a été « islamisé » ? On reprend la route après un moment de méditation et, à quelques kilomètres, une plaque, le long de la route d'El Haouaria, indique Bir Jedi à gauche. Une piste très carrossable mène à une plage de sable superbe. A gauche d'un cap rocheux, la mer dévore les vestiges d'une bourgade d'époque romaine Mraïssa / Siminina et des carrières antiques que nous avons déjà décrites.
Sidi daoud
Après avoir dépassé le bourg de Zaouiet El M'gaïez qui s'est doté récemment d'une grande mosquée au minaret élancé, on tourne, à gauche, vers le bourg de Sidi Daoud. Pas un seul tunisien ni même aucun étranger, certainement, ignore l'existence de cette bourgade tant ses conserves de thon, en particulier, sont renommées ! Au fur et à mesure que l'on s'approche, on découvre un bourg moderne entourant un port récemment réaménagé qui s'ouvre sur une mer dont le bleu se mêle, à l'horizon, à l'azur du ciel sur lequel se découpe la silhouette légèrement plus sombre de l'île de Zembra. La pêche au thon devait être déjà une des activités de l'antique Missua dont l'histoire ancienne est peu connue bien que la cité ait été une étape importante sur la route maritime reliant Carthage à la Sicile et à l'Italie. Véritable base navale et actif port de pêche, elle est mentionnée sur une mosaïque trouvée au port d'Ostie, voisin de Rome, qui mentionne de nombreux autres ports méditerranéens. Le commerce du Garum, condiment liquide fabriqué à partir de « poisson bleu » salé et aromatisé, inventé par les Grecs, mais dont les Romains étaient friands, devait leur procurer de gros revenus. Hélas, son site antique bien que très important n'a fait l'objet d'aucune fouille ni d'aucune mesure de protection. Le bourg moderne s'agrandit à ses dépends et l'efface peu à peu. Les derniers vestiges, dont un vivier à poissons taillé dans le rocher, se trouvent au bord de la mer. Sidi Daoud, qu'on vénère profondément, serait venu au XIIIème siècle du Maroc. Il serait originaire de la tribu des Sanhaja. Il aurait été un « moine-guerrier » dans un ribat : un monastère fortifié, qui s'appelait Nouba ainsi que le bourg voisin, tous deux disparus aujourd'hui. C'était la capitale du Cap Bon à l'époque des Califes Omeyyades. Sidi Daoud aurait accompli de nombreux miracles dont une pêche miraculeuse en compagnie de Sidi Maaouia, son compagnon. Les amateurs de vestiges antiques et de plage peu fréquentée contourneront le bourg par le Nord et rejoindront, deux kilomètres plus loin, les restes d'une carrière antique proche d'un lieu-dit Aouinet Lâgha.
El Haouaria
Bien sûr que l'on pourrait s'arrêter à El Haouaria, l'antique Hermaea, consacrée, comme la péninsule qui la porte, au dieu Hermès. Les carrières antiques, la très belle plage voisine de Ras Drek portant un temple et une citadelle punique ainsi que les vestiges du marabout consacré mythiquement à Sidi Labiadh qui a donné son nom au Jebel qui le porte, mériteraient qu'on s'y arrête mais ils nous semblent trop connus. La plage d'El Haouaria est belle. On pourra aller s'y baigner. Ensuite, on reprendra la route. En continuant sur la route C. 26, en direction de Kerkouane, on arrive bientôt au village très étendu de « Achraf ».
Sidi Cherif
Sidi Cherif ! Aujourd'hui, depuis que la télévision nationale a parlé de lui, tout le monde vous indiquera le modeste marabout qui abrite sa sépulture et SON OLIVIER. Allez le voir, il est encore plus gros que vous ne l'imaginez. Sidi Cherif serait lui aussi venu du Maroc vers l'an 1100 et c'est lui qui aurait planté cet arbre qui serait donc millénaire. De son tronc énorme partent des branches qui ont le diamètre d'un tronc « normal ». Certaines, tordues, desséchées, sortent du feuillage comme des bras gigantesques. Vous verrez que même millénaire, il porte encore des olives ! Deux ou trois autres « géants » lui tiennent compagnie. S'ils ne sont pas millénaires, ils sont, au moins, plusieurs fois centenaires. Tout proche, au bord de la route, un cafetier l'a fait peindre sur le mur de son établissement en guise d'enseigne ! Après une pieuse visite au petit marabout tout simple mais bien entretenu, consacré à Sidi Cherif, on peut reprendre la route et, à 2 kilomètres environ, une plaque vous indiquera la plage de Takerdouch que l'on découvre au bout d'une bonne voie carrossable toute droite. Ce nom semble avoir une origine berbère. Au premier contact, on est un peu déçu : on arrive sur une côte rocheuse. Il suffit de s'avancer un peu et de mieux examiner l'ensemble du paysage. Un cordon de petites dunes borde, sur plus d'un kilomètre, une superbe plage de sable. Ainsi, après avoir été occupé toute sa journée, on pourra se restaurer agréablement sans avoir, à aucun moment, maugréé contre la longueur « interminable » de la journée. Les promeneurs liront avec beaucoup d'intérêt, à notre avis, un ouvrage intitulé : « A la découverte du Cap Bon » un guide historique et archéologique rédigé par S. Aouanallah et M. Fantar, historiens et archéologues. Cet ouvrage a été édité par l'Agence de mise en valeur du Patrimoine et de Promotion Culturelle.