Sous le ciel étoilé du théâtre de plein air de Kélibia, les projections se poursuivent à un rythme effréné. Le troisième jour du festival, le public toujours aussi nombreux a eu droit à un menu fourni au niveau de la quantité et moins bon quant à la qualité. Les trois compétitions internationale, nationale et écoles de la soirée n'ont pas révélé grand-chose. On se rend compte que les Tunisiens ont oublié qu'ils ont fait une révolution. Au placard la révolution, un mauvais rêve qu'apparemment nombreux veulent vite oublier.
Les écoles ne font rien de bon. Les deux films présentés dans le cadre de la compétition école sont totalement dépassés par les événements. L'un « La maison de mon père » de Hatem Houria, une fiction de 17 minutes, revient de la manière la plus banale sur l'histoire de la Tunisie à l'époque du protectorat à travers l'histoire d'une maison qu'on veut faire vendre à son propriétaire. Symboliquement, la maison c'est la Tunisie à ne pas vendre sous n'importe quelle condition. Le deuxième « Excusez-moi », fiction de 11 minutes de Mohamed Bassoumi (AAC), se veut un cours d'initiation à la photographie. L'image est floue parfois pas du tout visible, les cadrages hésitants. Un film pas du tout inspiré à la limite décevant.
Les films de la FTCA, programmés dans la section compétition nationale, n'ont pas non plus bonne mine. Les deux documentaires, l'un du club de la Hamma de Gabès « Colporteurs » réalisé par Abdallah El-Fateh Aoun et l'autre « Breeding the fish » d'un cinéaste indépendant de Kébili Aymen Yaacoub sont d'une pauvreté désarmante. A l'heure où les caméras numériques sont capables du meilleur, on constate que chez nos amateurs, elles ne servent vraisemblablement pas à grand-chose. En effet, la sécheresse des idées et de leur développement sous une forme visuelle bat son plein. « Fusion » de Idriss Jemai du Club Culturel Tahar Hadded, sort du lot en se consacrant sur la thématique du rapport de l'œuvre et du récepteur. La fusion put être telle que ce dernier s'incruste aux côtés du portrait féminin de l'œuvre exposée. Le film joue sur l'ambiguïté du réel et de la fiction.
La compétition internationale est meilleure mais ne présente pas une grande originalité. Les films parlent surtout des souffrances des hommes à l'instar du documentaire palestinien « Combien tu étais seul fils de ma mère » d'Ibrahim Nawajha. Un film d'archives en noir et blanc sur la mémoire des Palestiniens dont le combat pour la libération n'est pas prêt de s'achever. Très quelconque sur le plan de la forme mais intéressant comme document pour marquer l'histoire d'un peuple opprimé.
L'idée de la mort traverse « Traces » film tunisien d'Olfa Ben Chaâbane (ESAC). Une jeune fille désespérée veut se suicider. Elle cherche le moyen de le faire en passant de la salle de bains à la cuisine, la chambre à coucher, le salon etc. L'idée de l'enferment et du suicide, on la retrouve dans « Sprachlos » de l'Allemand Adrian Copitzki, un huis-clos illustrant le sort d'un suicidé vivant dans la solitude et l'indifférence. Même sa femme occupée au téléphone ne se rend pas compte de sa mort. Est-ce la fin de l'humanité ? semble s'interroger le réalisateur !
On retrouve l'espoir de la vie dans « Sens » de l'Egyptien Mohamed Ramadan qui lui aussi se déroule en huis-clos ; Une infirmière tente de réveiller un homme du coma en prenant soin de lui. « Love is blind » du Turc Ertug Tufekçioglu est un joli conte d'une femme éprise d'un panneau de signalisation qu'elle prend pour un amoureux mais se rend compte vite qu'il la trompe comme un homme. Même les objets ne sont pas fidèles et sont capables de trahison. Engagement, indépendance et détresse caractérisent cette soirée. En attendant demain.