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L'enclume et le marteau
Angles Déficit budgétaire et lutte contre les inégalités
Publié dans Le Temps le 13 - 09 - 2012

Faire du recul des inégalités un objectif guidant la répartition des richesses, suppose qu'une société place l'idéal égalitaire au cœur de son système de valeurs. C'est le cas généralement des sociétés démocratiques.
En réalité, les choix politiques ne traduisent pas toujours les principes affichés. Et même quand il y a une véritable volonté et politique de lutte contre les inégalités, les résultats ne sont pas toujours à la hauteur des efforts consentis. Nous observons dans les pays occidentaux, malgré les multiples actions et prestations sociales en faveurs des plus démunies, la pauvreté dans ces pays ne cesse de progresser et la montée de l'exclusion d'une certaines frange de la population est devenue une menace réelle sur la cohésion sociale et la stabilité des institutions. Comment faire, alors, de l'égalité une réalité et comment la financer?
Pour garantir la cohésion sociale, il faut limiter contre les inégalités sociales. Les pouvoirs publics disposent d'une palette d'instruments, à la fois correcteurs des inégalités et transformateurs de la société.

Correction des inégalités monétaire et sociales

La correction des inégalités monétaires est souvent considérée comme un axe primordial de la politique de lutte contre les inégalités, car elles sont souvent le point d'ancrage des autres inégalités. L'Etat peut :
-agir sur la formation des revenus en revalorisant les salaires minimums ;
-corriger les inégalités via l'impôt sur le revenu. En effet, l'impôt progressif permet, en plus du resserrement des revenus, de diminuer la concentration des patrimoines et des revenus qui en auraient été issue ;
-redistribuer des prestations sociales pour limiter la pauvreté. Ainsi, les facteurs traditionnels de la pauvreté, tels le handicap physique, le nombre élevé d'enfants ou vieillesse peuvent être enrayés.
L'action des services publics contribue à la réduction des inégalités, en faisant en sorte que chacun puissent accéder, sans distinction de niveau de revenus, à une offre de biens et de services essentiels.
L'Etat tunisien assure déjà l'accès de tous –ou presque- à des services comme les routes, la sécurité ou encore l'éducation et la santé.
La création des entités régionales permet non seulement de luter contre les dysfonctionnements bureaucratiques et la lourdeur administrative mais surtout elle permet le développement des complémentarités et l'émergence des synergies inter et intra-Région. Ainsi, la régionalisation permet une meilleure efficacité (efficience) des différentes institutions et organisations publiques dans l'exercice de leur fonction (leur pouvoir), ce que les spécialistes appellent « le principe de subsidiarité » : Ce qui est national à l'Etat, ce qui régional à la Région, ce qui est communale à la Commune, en l'occurrence à la Municipalité (voir aussi notre article : « la décentralisation : une nécessité démocratique » in la revue Leaders, N°10 de mars 2012).

Les moyens de financement de la lutte contre les inégalités

D'après le graphique élaboré en 2011 par le Comité pour l'annulation de la dette du Tiers Monde, sur les 19 milliards de dollars de dette extérieure publique contractée par la Tunisie entre 1987 et fin 2009, près de 10 milliards sont considérées comme étant «une dette odieuse» par conséquent la Tunisie est en mesure de demander leur annulation !
En effet, d'après la théorie du centre international canadien sur la loi du développement durable les trois conditions pour pouvoir désigner la dette tunisienne comme étant une dette « illégitime », « odieuse » donc, sont réunies : absence de consentement, absence de bénéficie, créanciers avertis.
En réalité, la situation est éminemment plus complexe et surtout elle dépend de la nature des rapports de forces actuelles, d'où certaines interrogations s'imposent sur l'identité des créanciers, la nature des dettes, les conditions, les circonstances, identification des projets qui ont pu bénéficier de ces emprunts,...bref, il faudrait un véritable audit mais aussi une forte détermination politique pour demander et exiger l'annulation partielle de notre dette, c'est-à-dire l'annulation totale des 10 milliards qui sont dus à la dictature.

Risques

La Tunisie dispose encore d'une légère marge de manœuvre, la dette publique représente aujourd'hui 46% de son PIB : Elle peut encore emprunter particulièrement auprès de nos partenaires du Golf, voire même organiser un emprunt obligataire national où la bourgeoisie tunisienne et certains Tunisiens résidents à l'étranger pourraient apporter, grâce à un sursaut patriotique, leur concours à cet effort national. Ces nouveaux emprunts ne doivent surtout pas servir pour payer les frais de fonctionnement de l'Etat (salaires des fonctionnaires et dépenses courantes) mais ils doivent impérativement, nécessairement, être investis dans un grand programme d'infrastructure (routes, hôpitaux, universités,...) et des projets rentables à moyen et long terme. Il faudrait donc une politique budgétaire expansionniste, active, contra-cyclique, en somme une politique de relance par l'investissement. Pour que cette politique atteigne son objectif, son optimum, et que le principe du multiplicateur keynésien joue pleinement, il faudra, obligatoirement, confier les travaux à des entreprises tunisiennes tout en leur fixant l'obligation d'utiliser, dans la mesure du possible, que des produits et des matériaux locaux. Autrement, nous courons deux risques majeurs :
1/ l'argent injecté dans le circuit économique, au prix d'un endettement, risquerait de relancer, en cas d'importation excessive, l'économie de nos partenaires, surtout chinois –dont la qualité des produits laisse, d'ailleurs, à désirer- et européens. L'exemple de la France en 1981 en est un bel exemple : Pierre Mauroy, Premier ministre socialiste de François Mitterrand, avait mis en place une politique de relance par la consommation. Ce choix s'est avéré contreproductif : une hausse excessive de l'inflation -près de 10% en 1983 et un taux d'intérêt qui a atteint les 14%- et, surtout, un déficit chronique du commerce extérieur. En effet, la hausse de la consommation ayant entraîné une forte augmentation des importations.
2/ Un endettement excessif pourrait avoir pour conséquence la perte de notre souveraineté à l'instar de l'Egypte en 1882 ainsi d'autres nations : Terre-Neuve (une grande île au large de la côte atlantique de l'Amérique du Nord) qui a renoncé à sa souveraineté au profit de l'Angleterre en 1934 sous le poids d'une dette devenue insoutenable. Autre exemple assez frappant : le bombardement par l'Allemagne, la Grande-Bretagne et de l'Italie en 1902 des ports du Venezuela considérée comme mauvais payeur ((in la revue Diplomatie, op. citée).

Recettes fiscales supplémentaires

Pour éviter la pression fiscale afin de relancer le travail et la production, conformément au courant libéral ; il convient de repenser notre système fiscalité et surtout d'inventer de nouvelles recettes fiscales. En ce sens, je propose 4 pistes nouvelles de prélèvements fiscaux ; ces nouvelles recettes pourraient se traduire par une amélioration significative du solde budgétaire sans dégrader pour autant le pouvoir d'achat de nos concitoyens ou la compétitivité de nos entreprises :
-La création d'un impôt de solidarité sur la fortune : la France a mis en place ce dispositif en 1988. Il s'agit d'un impôt annuel calculé sur l'ensemble du patrimoine des ménages (lorsque le patrimoine dépasse un certain seuil). L'assiette de l'impôt intègre la résidence principale, l'ensemble des actifs mais il exclut l'outil de travail (l'entreprise d'un entrepreneur).
-L'instauration d'un timbre fiscale de 10 dinars par visiteur pour les touristes occidentaux.
-Soumettre les bénéfices réalisés par les entreprises non-résidentes à l'impôt sur les sociétés au même titre que les entreprises résidentes.
-Augmenter les impôts locaux tout en les indexant sur le niveau des revenus de telle manière que les familles les plus modestes auraient à payer une contribution symbolique et les familles les plus aisées contribueraient à la hauteur de la qualité de leur résidence et de leur revenus.

Bilan

Nous avons montré à travers cette contribution que les politiques publiques de lutte contre les inégalités sont soumises à des contraintes de différentes natures : Tout d'abord, les difficultés économiques limitent les ressources fiscales et conduisent à réduire les dépenses publiques. Avant même la révolution, les comptes publics étaient déficitaires. Pour combler ce déficit budgétaire, le régime déchu s'est trouvé toujours dans l'obligation d'emprunter de plus en plus alimentant ainsi la dette publique : fin décembre 2010, cette dette était de 30 milliards de dinars contre 5 milliards début 1988 (en dinars courant) ; aujourd'hui nous sommes endettés à près de 38 milliards de dinars. D'où la nécessité pour la Tunisie d'une part, de se prévaloir du principe de la dette odieuse pour pouvoir alléger sa dette extérieur de près de 10 milliards de dollars qui sont dus à la dictature et, d'autre part d'inventer des recettes fiscales supplémentaires tout en préservant le pouvoir d'achat des Tunisien et la compétitivité de nos entreprises.
Nous avons montré également que la lutte contre les inégalités est une nécessité démocratique. L'Etat peut revaloriser les revenus et développer des prestations sociales grâce à une politique de redistribution pour réduire les inégalités de types monétaires qui sont considérées comme étant le point d'ancrage des autres inégalités. Mais aussi, une façon décisive de réduire les inégalités consiste à offrir des services publics : Que ce soit en matière de santé, d'éducation ou de logement, ces services fournissent des prestations gratuites qui redistribuent la richesse nationale et agissent directement sur la formation des inégalités (inégalité des chances ou inégalité sociales de santé).
Enfin, nous insistons sur la nécessité, dans le cadre d'un plan de relance de confier les travaux à des entreprises tunisiennes tout en leur fixant l'obligation d'utiliser, dans la mesure du possible, que des produits et des matériaux locaux. En effet, c'est seulement ainsi pour que le principe du multiplicateur keynésien puisse jouer pleinement. Autrement, comme nous l'avons souligné plus haut, l'argent injecté dans le circuit économique, au prix d'un endettement, risquerait de relancer, en cas d'importation excessive, l'économie de nos partenaires, surtout chinois et européens.

Par Dr Ezzeddine Ben Hamida - Professeur de sciences économiques et sociales
http://ezzeddine.ben.hamida.overblog.com


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