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La société civile enrichit le débat
Justice transitionnelle
Publié dans Le Temps le 16 - 12 - 2012

«On ne peut tourner la page du passé avant sa lecture», déclare Me Amor Safraoui
«La réussite de l'expérience tunisienne est très importante pour l'avenir des Droits de l'Homme dans la région», affirme Mona Rashmawi
«Chaque peuple a ses propres mécanismes de réparation», rappelle Michel Tubiana
«Il faut rompre avec la chasse à l'homme au nom de la protection de la Révolution », précise Abdelbasset Ben Hassen
«Que faire de ceux qui pratiquaient la délation ?», s'interroge Imed Daymi
Un projet de loi sur la Justice transitionnelle fin prêt se trouve entre les mains du Gouvernement. Il n'a pas été présenté à l'Assemblée Nationale Constituante. Il est encore temps de l'enrichir. Dans cet esprit, la Coordination Nationale indépendante pour la justice transitionnelle a organisé depuis avant-hier un colloque international de deux jours sur ce projet de loi.
Me Amor Safraoui, président de la Coordination, situe le débat dans le cadre de la conjoncture politique et sociale du pays. Il commence par féliciter l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) pour sa sage décision d'annuler la grève générale. « C'est une preuve de plus à porter à l'avantage de la société civile tunisienne pacifiste qui n'a cessé de faire entendre la voix de la raison et d'appeler sans répit à instaurer un climat de paix et de concorde. Le peuple tunisien refuse la violence. Toutefois, tout en appelant à la paix civile, nous tenons à la Justice transitionnelle. On ne peut tourner la page du passé avant sa lecture. La conciliation vient après le questionnement, sans esprit de vengeance, ni sélectivité, selon des normes précises », dit-il. Il considère que l'aveu de l'incriminé, la quête du pardon et l'acceptation de la victime d'accorder ce pardon, sont des éléments essentiels de la justice transitionnelle. Cette justice doit être transparente. Me Safroui, révèle entre autres quelques points de faiblesses et défaillances dans le processus tunisien de justice transitionnelle.
«L'Assemblée Nationale Constituante n'a pas honoré ses engagements, encore moins assumé ses responsabilités dans l'élaboration de la loi sur la justice transitionnelle, contrairement à l'article 24 de la loi fondamentale d'organisation provisoire du pouvoir. La Constituante s'est désengagée de son rôle pour se voir substituée par le ministère des Droits de l'Homme et de la Justice transitionnelle, créé par un simple arrêté. En plus le ministère n'a pas réussi à coordonner et canaliser comme il faut les initiatives de la société civile et n'a pu maîtriser le processus.
Il n'a pu prendre les mesures urgentes nécessaires aux familles des martyrs et des blessés de la Révolution. En plus la société civile était désunie, ce qui a diminué son efficacité », dit-il. En dépit des difficultés et des insuffisances, la Coordination tient à l'esprit de participation pour instaurer la justice transitionnelle.
Mona Rashmawi, directrice du secteur règle du droit, égalité et non-discrimination au Haut-commissariat onusien des Droits de l'Homme, considère que la chose la plus importante dans la justice transitionnelle est le regard qu'elle porte sur le passé. C'est une étape importante dans la construction démocratique, pour garantir un non retour aux pratiques passées. La justice transitionnelle véhicule une vision futuriste de l'Etat de Droit et de la primauté des Droits de l'Homme, sans considération de race, de sexe ou de convictions religieuses. La conférencière pense que la réussite de la justice transitionnelle en Tunisie intéresse les Tunisiens, en premier lieu, mais pas seulement. « La réussite de l'expérience tunisienne est très importante pour l'avenir des Droits de l'Homme dans la région. Nous avons suivi les consultations concernant le projet de loi et considérons qu'elles doivent intéresser tout le monde », dit-elle. Ayant lu, le projet de loi, elle révèle l'importance de la complémentarité des différentes procédures en matière de justice transitionnelle.
Michel Tubiana, président du Réseau Euro-méditerranéen des Droits de l'Homme, rappelle que le problème de la Justice est qu'elle est « une œuvre humaine, par définition imparfaite. Le fait que cette justice soit transitionnelle, signifie qu'on part d'une période donnée pour aller quelque part.
« La justice transitionnelle est un concept nouveau qui répond à autant de sociétés et de peuples. Il n'y a pas un code de justice transitionnelle. Elle est ce que les peuples en font », dit-il. Il s'agit tout d'abord de dire la vérité. Il n'y a rien de pire pour un peuple que de perdre la mémoire. C'est aussi bien le cas des victimes que des bourreaux. Il faut aussi réparer. « Chaque peuple a ses propres mécanismes de réparation. Il n'y a pas seulement l'argent qui compte. L'expérience du Maroc a montré qu'il y a d'autres méthodes de réparation », dit-il. Concernant la sanction, il pense qu'il faut qu'il y ait « un peu d'humanité. Un arbitrage est nécessaire entre ne rien faire et sanctionner. Il s'agit de trouver le juste équilibre. C'est un exercice qui appartient à chaque peuple. Les expériences sont à partager, mais en aucun cas, on ne peut dire voilà ce qu'il faut faire ». Il considère que la société civile tunisienne a fait preuve d'une grande combativité. Il l'invite à ancrer les idéaux de la justice transitionnelle au sein de la société tunisienne.
Abdelbasset Ben Hassen, président de l'Institut Arabe des Droits de l'Homme (IADH), rappelle que la réflexion sur la justice transitionnelle a commencé dès les premières semaines de la réussite de la Révolution. L'Institut a participé à la vulgarisation du concept. « Les Droits de l'Homme sont une responsabilité collective dans un pays en transition. C'est la responsabilité des instances de l'Etat, de l'Assemblée Nationale Constituante et de la Société civile. Chaque fois où on s'approche de la vision collective de la responsabilité, on s'approche de la réussite. Chaque fois où on verse dans les tiraillements politiques, on s'éloigne de la réussite. La société civile tunisienne n'est pas seulement une force de critique, elle est aussi une force de proposition », dit-il. L'Institut considère que la Justice transitionnelle fait partie d'une vision qui fonde la transition sur le respect des droits et des libertés. La justice transitionnelle s'intègre dans un mouvement d'ensemble incluant les réformes des institutions comme la justice, la sécurité, l'information...Abdelbasset Ben Hassen déplore les peurs engendrées par les tiraillements politiques. « La violence commence à être acceptée et banalisée. Ce-ci nous éloigne du dialogue pour trouver les solutions collectives sur des sujets comme l'enseignement, la santé, l'emploi...Tout en rêvant d'une justice transitionnelle qui a tardé à être mise en pratique, il faut rompre avec la chasse à l'homme au nom de la protection de la Révolution. Demander des comptes doit se faire dans le cadre de la loi c'est-à-dire en recourant à la Justice transitionnelle ». Le président de l'IADH appelle à mettre fin aux structures parallèles. « Sans justice transitionnelle, nous irons vers des pratiques qui mettent en péril la paix sociale, comme les décès dans les prisons suite à des grèves de la faim, la violence à Siliana... « La justice transitionnelle et les réformes politiques permettent de vivre ensemble », conclut-il.
Imed Daymi, ministre et directeur du cabinet ministériel, précise que le président Marzouki, tient à connaître l'avis de la société civile sur la justice transitionnelle. « La société civile soutient, permet de faire mûrir la justice transitionnelle et de la réussir. Le projet de loi est attendu par des dizaines de milliers de victimes.
En tant que citoyen, Imed Daymi, avance quelques remarques sur le projet de loi. « C'est un projet qui s'intéresse davantage à la victime que des bourreaux. Il faut écouter les auteurs et responsables des atteintes et les encourager à reconnaître leurs méfaits. Le projet de loi ne contient pas des outils de coercition progressifs. Par ailleurs certains actes ne tombent pas sous le coup de la loi. J'ai trouvé au palais présidentiel des documents compromettants, comme des lettres cultivant le culte de la personnalité, d'autres embellissant la réalité ou de délation... Que faire avec ces personnes ? Je n'ai pas la protection nécessaire pour les dévoiler à l'opinion publique. Certains auteurs s'activent encore dans la scène politique », dit-il.
Avec les retards enregistrés la mise en place de la justice transitionnelle coïncidera avec l'approche des prochaines élections. Comment éviter qu'elle soit instrumentalisée dans les tiraillements politiques ?


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